Le pianiste Jean-Michel Blais qui ne cesse d’agrandir son cercle d’admirateurs, depuis la sortie de son nouvel album, n’en revient pas lui-même de s’être retrouvé si rapidement à la Maison symphonique. «Je ne dors par depuis le mois de janvier», lance-t-il à la blague tout en narguant les retardataires qui s’amènent après la pièce Roses jouée en ouverture: «Désolé, vous avez manqué la meilleure!». Le ton est donné et cette légèreté contribue à égayer les pièces de Dans ma main, titre inspiré du sombre poème Monde irrémédiable désert de Saint-Denys Garneau.
Planer le sourire aux lèvres
Seul sur scène, l’artiste qui est brièvement passé par le conservatoire, reste bien en contrôle de sa musique «postclassique» qui s’abreuve aux mélanges de styles, avec des références à la musique populaire et des envolées électroniques. Avec son humour, une bonne sono et des éclairages soignés, Blais réussit, pendant plus d’une heure, à faire un concert dynamique avec ses pièces plutôt calmes et planantes. Rappelons que son disque Il paru en 2016 avait été mentionné dans le top 10 des meilleurs albums de l’année du prestigieux magazine américain Time.
La musique de Blais rappelle parfois celle d’Einaudi, de Jean-Michel Jarre, d’André Gagnon et même de Dionne et Brégent. Pas étonnant qu’elle attire un large public. Même si Igloo, Blind et God(s) ne manquent pas de décibels, on constate vite que les nombreux et imposants instruments qui l’entourent serviront plus tard à Ólafur Arnalds, l’autre invité de ce programme double. Blais, reconnaissant envers le Festival international de jazz de Montréal de pouvoir se produire devant la plus grande foule de sa carrière, remercie ceux qui sont venus pour lui et ils sont nombreux à en juger par la générosité des applaudissements.
Piano nordique
Après un long entracte de plus d’une demi-heure, la soirée s’est poursuivie un peu dans le même registre avec l’Islandais Ólafur Arnalds, à qui on doit notamment la musique de la série britannique «Broadchurch». Le pianiste au jeu généralement lent et aux motifs répétitifs est entouré d’une violoncelliste, deux violonistes, un altiste et un batteur et percussionniste. Équipé d’un synthétiseur, Arnalds ajoute quelques touches électroniques à certaines de ses pièces. Il dispose aussi de deux pianos droits « mécaniques » actionnés par un contrôleur qui déclenche les partitions jouées par les deux instruments placés au fond de la scène. Sans doute peut-on se permettre ici encore de parler de musique «postclassique», raffinée et lumineuse. Très à l’aise, le musicien parle chaleureusement de sa grand-mère, raconte avec humour l’époque où il a vécu au Canada. Malgré tout, des spectateurs quittent au cours de sa prestation. Ce programme double était-il trop généreux ?
Photo: Benoit Rousseau