Le Théâtre du Nouveau Monde présente, pour la première fois, une pièce de Larry Tremblay, auteur québécois reconnu internationalement, grâce à ses succès The Dragonfly of Chicoutimi, L’orangeraie, etc. Quinze ans après la création de Abraham Lincoln va au théâtre, on a confié à Catherine Vidal, la mise en scène de ce texte construit comme un enchâssement de poupées russes. Bruno Marcil et Didier Lucien, ainsi que Luc Bourgeois et Mani Soleymanlou, en Laurel et Hardy, interprètent cette partition sur la schizophrénie américaine, teintée d’un humour grinçant.
Jeu de miroirs
En entrant dans la salle, le spectateur se voit lui-même en train de se diriger vers son siège, puisqu’on a installé un immense miroir à l’arrière-scène. C’est l’élément principal du décor de cette pièce où tout n’est que jeu de miroirs, où chaque vérité semble se confondre avec un mensonge ou le travestissement d’une réalité incertaine.
Pourtant, le titre du spectacle repose sur un évènement historique, puisque le président des États-Unis, Abraham Lincoln, a été assassiné, en 1865, alors qu’il assistait à une pièce de théâtre. Son assassin, John Wilkes Booth, était d’ailleurs un acteur.
À partir de cette tragédie intimement liée au domaine théâtral, Larry Tremblay nous entraîne dans l’univers de Marc Killman, un metteur en scène tyrannique, qui s’inspire de ce fait historique pour créer un spectacle sur les paradoxes d’une Amérique qui ne va pas bien. Il engage deux acteurs pour qu’ils rejouent l’assassinat présidentiel en empruntant les figures comiques de Laurel et Hardy.
Killman (Bruno Marcil) s’attribue le rôle d’Abraham Lincoln, mais, il meurt à son tour. On embauche alors un autre acteur, incarné par Didier Lucien qui, au cours des répétitions, deviendra le nouveau metteur en scène du spectacle.
Luc Bourgeois en Laurel et Mani Soleymanlou en Hardy forment un duo comique épatant! Le rythme de leurs répliques sonne comme de la musique! Avec leur évidente complicité et leurs gestes synchronisés, ils s’avèrent l’atout majeur de ce spectacle où ils sont présents du début à la fin, contrairement à Bruno Marcil et Didier Lucien qui parviennent difficilement à s’imposer.
Pour ajouter à cette mise en abyme humoristique, on a recours sporadiquement à des projections de scènes qui montrent les acteurs dans différentes poses mais, ce n’est pas toujours drôle. D’ailleurs, si brillant soit-il, ce jeu de la vérité qui dure près de deux heures, finit par lasser. On sait depuis longtemps déjà que la désinformation est souvent reine dans notre monde. Cela dit, les théories du complot prennent aujourd’hui des proportions inégalées à travers les réseaux sociaux, ce qui est absent de ce texte publié en 2008 et qui aurait pu être rafraîchi.
Abraham Lincoln va au théâtre
Texte: Larry Tremblay
Mise en scène: Catherine Vidal
Avec: Luc Bourgeois, Didier Lucien, Bruno Marcil, Mani Soleymanlou
Au TNM, jusqu’au 8 avril
*Au centre de la photo d’accueil : Bruno Marcil / Crédit: Yves Renaud