Notre histoire s’est-elle déroulée comme la raconte les historiens ? Des faits ont-ils été plus ou moins déformés ? Pourquoi certaines personnes qui ont joué des rôles apparemment dignes de mention ne figurent pas dans nos livres d’histoire ? Ce sont des questions que soulèvent Alexandre Castonguay, Patrice Dubois et Soleil Launière dans leur spectacle Courir l’Amérique, présenté au Théâtre de Quat’Sous. Voyons si l’exercice apporte aussi des réponses.
Les oubliés de l’histoire
D’abord, précisons que ce trio évoque différents oubliés ou mal-aimés de l’histoire, dont on parle dans les livres Ils ont couru l’Amérique et Elles ont fait l’Amérique, de Serge Bouchard et Marie-Christine Lévesque. Nos «comédiens-historiens» s’attardent, entre autres, à l’explorateur Étienne Brûlé, accusé de trahison par Champlain. Puis, on se demande pourquoi l’histoire n’a pas fait une plus grande place à Marie-Anne Gaboury, grand-mère de Louis Riel et qui serait la première femme blanche à avoir exploré l’Ouest canadien. En fait, Gaboury, née à Maskinongé, s’est mariée avec le coureur des bois Jean-Baptiste Lagimodière en 1806 et, contrairement aux coutumes de l’époque, elle a voyagé avec son mari et vécu dans ce qui est aujourd’hui l’Ouest canadien.
Ces questions revêtent rapidement une allure de procès contre des historiens qui, bien évidemment, ne sont plus là pour nous éclairer. À ce jeu de questions sans réponses s’ajoute le récit du périple du comédien Alexandre Castonguay qui a décidé de parcourir le pays, d’est en ouest, pour rencontrer divers acteurs de l’Amérique d’aujourd’hui.
Cela nous amène, entre autres, à tout un questionnement sur la pertinence du nom de la réserve faunique La Vérendrye, puisque l’explorateur Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye aurait peu à voir avec ce territoire. Dans ce même esprit, faudrait-il, alors, revoir d’innombrables noms d’immeubles, de parcs, de rues, etc ?
Quant au moment du spectacle consacré à Susan La Flesche Picotte, qui aurait été la première femme autochtone médecin des États-Unis, il s’étire jusqu’aux confins du supplice ! On fait répéter quelques phrases clés de l’histoire personnelle de cette femme à un groupe de sept citoyens invités à monter sur scène pour illustrer la pluralité humaine. Or, chacun semble répéter de mémoire ce résumé de la vie de La Flesche Picotte, en oubliant parfois certains détails. L’exercice aussi prévisible qu’interminable a pour but de démontrer que les différents récits transforment l’histoire. Quelle trouvaille!
Même en suivant l’actualité au quotidien, on constate qu’elle n’est pas comprise de la même façon par tout le monde. Alors, qu’il y ait eu certains décalages entre les faits et l’histoire, on s’en doute bien depuis longtemps. Et si Castonguay a couru l’Amérique à sa façon, on cherche en vain dans ce spectacle ce que son voyage lui a appris sur les acteurs de l’histoire d’aujourd’hui. Tourner autour de questions sans issue pendant 1 heure 40 devient lassant. Courir l’Amérique ? Mais, où cela mène-t-il ?
Courir l’Amérique
Un spectacle de Alexandre Castonguay, Patrice Dubois et Soleil Launière
D’après les livres Ils ont couru l’Amérique et Elles ont fait l’Amérique de Serge Bouchard et Marie-Christine Lévesque
Au Théâtre de Quat’Sous, jusqu’au 28 mars
Crédit photo : Sylvie-Ann Paré