Faut-il affronter son propre Schmürz pour se construire une conscience ?
Un homme digne de ce nom ne fuit jamais, fuir c’est bon pour les robinets. – le père
Dès le 27 septembre 2017, Le Théâtre Denise-Pelletier entame sa nouvelle saison dans la grande salle avec Les Bâtisseurs d’empire ou le Schmürz, pièce majeure de Boris Vian, écrite en 1957, qui fascine par la limpidité de son absurdité. Éminemment intime, cette œuvre à la fois drôle et anxiogène questionne l’espèce humaine, ses peurs, sa conscience. L’auteur de L’écume des jours et brillant jazzman crée ici un suspense revanchard qui s’amuse à se demander s’il faut sacrifier l’autre pour bâtir son propre empire ? Le metteur en scène Michel-Maxime Legault plonge avec sa manière précise et son ton narquois dans cette dispute entre l’engagement et le détachement.
Ami secret, confident, animal de compagnie, victime, prisonnier, bourreau, conscience, fantôme, mais qui est donc ce Schmürz (Sasha Samar) ? La vie pourrait être si simple sans lui, sans cette chose qu’on voudrait bien ignorer. Et comment s’en défaire ?
Déglingue redoutable à l’humour atypique, Les Bâtisseurs d’empire trace en caractère oblique le portrait d’une famille bourgeoise, microcosme d’une société en recherche de règles claires. Si les faux-semblants du père (Gabriel Sabourin) comme de la mère (Josée Deschênes) attisent la révolte de leur adolescente Zénobie (Marie-Pier Labrecque), tous cependant, incluant leur servante (Marie-Ève Trudel), participent malgré tout à cette recréation d’un monde systémique où le jeu des rôles est loi. Mais, le logement se fait de plus en plus petit, la famille s’évapore et le Schmürz est toujours là.
Pour Michel-Maxime Legault, monter cette pièce est vertigineux. L’œuvre peut être interprétée de mille manières sur le plan psychologique, politique, social, anthropologique même. « En choisissant de laisser cette ouverture, de ne pas enfermer la pièce dans une époque précise – dont celle à laquelle elle a été écrite pendant la guerre d’Algérie – exige un questionnement constant. Sans que le spectacle ne soit détaché de tout contexte, il faut trouver la manière pour que le spectateur s’y retrouve, y trouve son propre sens. On a chacun son Schmürz ! »
Boris Vian (1920-1959) Né en France, Boris Vian est un artiste complet : écrivain, poète, parolier, critique et musicien de jazz. Ingénieur de l’École centrale, Vian est aussi scénariste, traducteur (anglo-américain), conférencier, acteur et peintre. Sous le pseudonyme de Vernon Sullivan, il a publié de nombreux romans parodiant le style du roman noir américain, parmi lesquels J’irai cracher sur vos tombes, qui fut interdit pendant un temps. Boris Vian a abordé à peu près tous les genres littéraires : poésie, document, chroniques, nouvelles, chansons et théâtre. Son œuvre est une mine dans laquelle on continue encore de découvrir de nouveaux manuscrits au XXIe siècle. Peu reconnue de son vivant, son œuvre littéraire a été saluée par la jeunesse dès les années 1960-1970. L’écume des jours, en particulier, avec ses jeux de mots et ses personnages à clef, a fait de lui un véritable mythe. Il est désormais un classique qu’on étudie dans les collèges et les lycées. Les Bâtisseurs d’empire ou le Schmürz a été jouée pour la première fois deux ans après sa mort. Réputé pessimiste, Boris Vian adorait cependant l’absurde, la fête et le jeu.
Le metteur en scène Michel-Maxime Legault
Michel-Maxime Legault est diplômé du Conservatoire d’art dramatique de Québec. Il est cofondateur du Théâtre de la Marée Haute pour lequel il a signé les mises en scène de Ce que nous avons fait, Irène sur Mars (avec Jean-Philippe Lehoux), Parfois, la nuit, je ris tout seul (avec Marcel Pomerlo), Kvetch, Rhapsodie-Béton, Top dogs, Kick, Stop the tempo et Comment je suis devenu touriste. Il a aussi mis en scène Moi et l’Autre de Talia Hallmona et Pascale Brullemans (Prix Louise-LaHaye 2015) et Warwick de Jean-Philippe Baril-Guérard. Depuis 2005, il a joué dans plusieurs pièces dont Dans ma maison de papier, Les Savants, Vie et Mort du Roi Boiteux, Les Jumeaux Vénitiens, De l’Amour et des Restes Humains, Le Père Noël est une ordure et Piaf entre autres. Il est également diplômé d’une neuvième année de piano classique à l’École de Musique Vincent d’Indy. Il a enseigné le jeu scénique d’opéra à l’Université Laval et l’Université de Sherbrooke. Il est également professeur d’interprétation invité à l’École de théâtre du Cégep de St-Hyacinthe et à l’École nationale de théâtre du Canada. En novembre, il mettra en scène Savoir compter de Marianne Dansereau au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui.
Les Bâtisseurs d’empire ou le Schmürz de Boris Vian
Mise en scène : Michel-Maxime Legault
Avec Olivier Aubin, Josée Deschênes, Marie-Pier Labrecque, Gabriel Sabourin, Sasha Samar et Marie-Ève Trudel.
Concepteurs et collaborateurs artistiques : Jean Bard, Marc Senécal, David-Alexandre Chabot, Laurier Rajotte, Dominique Cuerrier et Danielle Lecourtois.
Du 27 septembre au 21 octobre 2017
Salle Denise-Pelletier du Théâtre Denise-Pelletier, 4353, rue Ste-Catherine Est, Montréal
Billetterie : 514 253-8974 www.denise-pelletier.qc.ca www.admission.com