Après avoir été présenté chez Duceppe en fin d’année de 2018, voici que cette nouvelle mouture de la pièce Des souris et des hommes, mettant en vedette Benoît McGinnis et Guillaume Cyr, dans une mise en scène de Vincent-Guillaume Otis et une adaptation québécoise de Jean-Philippe Lehoux, part en tournée au Québec en ce début d’année 2020. Le 12 janvier, c’est à la Salle Albert-Rousseau que la pièce a été présentée dans une salle comble.
Résumé : Dans les années 30, au début de la Grande Dépression, George et Lennie rêvent. De liberté, de prospérité et d’un peu de bon temps. Inséparables, ils voyagent de ferme en ferme, travaillant dur afin de réunir assez d’argent pour réaliser leur projet : posséder leur propre terre, élever des lapins et goûter un bonheur tranquille. George, débrouillard et protecteur, veille depuis toujours sur Lennie, son ami simple d’esprit. Pourvu d’une force herculéenne, Lennie aime caresser tout ce qui est doux de ses mains redoutables. Dans cette vie de misère, de labeur et de survie, où prime généralement le chacun pour soi, George et Lennie comptent l’un sur l’autre. Ils se heurteront, malgré cela, à une cruelle fatalité.
Qui ne connaît pas ce chef-d’œuvre de la littérature américaine de John Steinbeck? Bien que c’est un classique qui a été adapté plusieurs fois, au théâtre et au cinéma, il est intéressant de voir cette version signée Jean-Philippe Lehoux. J’avais encore en tête le film de 1992 avec les excellents John Malkovich et Gary Sinise. Je dois dire que Benoît McGinnis et Guillaume Cyr forment un duo très crédible et d’emblée, on les trouve sympathiques. On veut y croire en cette amitié improbable, en ce rêve américain, cette soif de liberté et de prospérité pour ces deux êtres démunis.
Ce qui fait la force de cette histoire, ce sont ces deux personnages bien sûr. Ce colosse avec une déficience intellectuelle, qui est doux comme un agneau, mais ne mesure pas l’étendue de sa force physique. Et son fidèle ami qui s’est juré de rester avec lui pour le protéger, malgré le boulet qu’il représente pour sa propre vie. Mais au-delà des personnages, il y a ce texte riche, puissant et émouvant. Et le fait d’avoir fait une mise en scène sobre, dans un décor minimaliste, avec tous les personnages sur scène (souvent en arrière-plan, dans la pénombre), cela nous donne tout le loisir de nous concentrer sur le texte, la finesse des mots, la justesse des émotions qu’il véhicule, la puissance de l’imagination.
Pendant les 90 minutes qu’a duré cette pièce, j’ai moi-même été happée par ce rêve que Benoît McGinnis laisse miroiter à plusieurs moments. J’ai rêvé d’une fin heureuse pour ces deux marginaux.
Mais comme on le sait, la finale est assez tragique et lourde émotionnellement. Cela a pris quelques minutes au public à se ressaisir lors de la tombée de rideau. Les acteurs ont été chaudement applaudis par la suite, une fois le public revenu de ses émotions.
Au final, je retiens que cette pièce de 1937 est toujours aussi actuelle, dans l’ère de Donald Trump, avec le racisme et le rêve américain inaccessible pour les démunis et les êtres différents. Bien que la solidarité et l’espoir d’une vie meilleur sont mis de l’avant, on comprend que c’est l’arrogance, l’injustice et l’individualisme qui prime encore aujourd’hui.
Texte John Steinbeck
Mise en scène Vincent-Guillaume Otis
Traduction Jean-Philippe Lehoux
Interprétation
Georges : Benoit McGinnis,
Lennie : Guillaume Cyr,
Whif : Nicolas Centeno,
Mae : Marie-Pier Labrecque,
Curley : David Laurin,
Carlson : Jean-Sébastien Lavoie,
Crooks : Martin-David Peters,
Candy : Luc Proulx,
Slim : Gabriel Sabourin
Concepteurs Julie Basse, Normand Blais, Romain Fabre, Jean Gaudreau, Yves Labelle, Marc Sénécal
Assistance et direction de plateau Stéphanie Capistran-Lalonde
Pour voir les dates des autres arrêts de la tournée, cliquez sur ce lien :
https://duceppe.com/a-l-affiche/tournee-des-souris-et-des-hommes/
https://www.sallealbertrousseau.com/
Crédit photos : Courtoisie de Chez Duceppe.