De nouveaux visages s’amènent au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui qui présente Équinoxe, une pièce de Hugo Fréjabise réunissant douze comédiens, dans la petite salle Jean-Claude-Germain. On fait ainsi place à la compagnie Joussour qui, jusqu’à maintenant, a offert ses spectacles dans des espaces publics, comme le Marché Jean-Talon, ainsi que des ruelles ou des parcs. Au coeur de cette création, les membres d’une troupe de théâtre se réunissent pour décider s’ils sont prêts à poser un geste radical pour en découdre avec le divertissement théâtral. Oseraient-ils assiéger le Parlement? Pareil projet sème la division, au point d’entraîner un coup de théâtre dont les spectateurs seront témoins…
Après une longue absence, dix compagnons de scène s’offrent des retrouvailles dans une maison de campagne loin de la ville. On lève son verre, on porte des toasts. Plus la nuit avance, plus les langues se délient, notamment, sur des questions de loyauté envers le groupe. Ça tourne parfois en prises de bec et en attaques personnelles.
On devra patienter un moment avant de savoir dans quel but Joaquim a convié sa bande ? En fait, le jeune homme estime que le théâtre ne sert plus à rien, s’il ne conteste pas l’ordre établi de notre société axée sur le commerce. Révolutionnaire dans l’âme, il propose au groupe de s’armer et de faire irruption au Parlement!
Immédiatement, les débats s’enflamment! Les artistes doivent-ils s’aventurer dans de tels coups d’éclat ? On passe au vote. Cinq pour et cinq contre. Les opposants à ce projet dangereux claquent la porte! Entracte!
Surprise durant l’entracte!
Fidèle à son habitude de faire surgir le théâtre en des lieux inhabituels, Fréjabize s’empare du hall d’entrée du CTDA, durant l’entracte. Alors que des spectateurs prennent un verre et discutent de la première partie du spectacle, voilà que les cinq récalcitrants font irruption. Tiraillés après avoir quitté leurs partenaires, ils vocifèrent en cherchant une façon d’aller les retrouver sans perdre la face.
Guerre et paix
Y parviendront-ils ? C’est ce qu’on verra durant la deuxième partie de la pièce, où l’on s’interroge sur le rôle du théâtre dans un pays en paix, comparativement à un territoire en guerre. La soirée se conclut d’ailleurs avec une courte vidéo où un directeur de théâtre palestinien dit continuer de croire que son art peut changer le monde, même après des décennies de bombardements israéliens.
Ce petit film apparaît comme une réponse aux longs questionnements sur l’engagement, le dialogue et le sens des mots abordés dans Équinoxe. Il faut aussi souligner que ce remue-méninges est précédé d’une sorte de préambule souvent inaudible. Deux femmes vêtues de blanc se prélassent sur des chaises longues, au son d’une musique banale provenant d’un poste de radio. Elles s’expriment, tantôt en français, tantôt en arabe avec surtitres français. Il est question de dieux, ainsi que de l’auteur Albert Camus et aussi de bourgeoisie intellectuelle. Ce duo énigmatique s’éclipsera devant l’arrivée des membres de la troupe de théâtre.
Bien que plusieurs de ces comédiens démontrent une belle aisance sur scène et qu’ils se donnent à fond dans des joutes verbales souvent étoffées, une certaine lassitude gagne néanmoins le spectateur. La symbolique de l’équinoxe, où le jour a une durée égale à celle de la nuit, laisse entendre que tous les discours s’équivalent mais, le spectacle dure plus de 3 heures et on finit par avoir l’impression de tourner en rond.
Équinoxe
Texte et mise en scène : Hugo Fréjabise
Avec : Stéphanie Arav, Esther Augustine, Roxane Azzaria, Marion Bajot, Louis Carrière, Sarah Cavalli Pernod, Jonathan Massové Guerville, Sara Naïm, Anna Sanchez, Pierre-Alexis St-Georges, Jean-Luc Terriault et Hanna Zeïda
À la salle Jean-Claude-Germain du CTDA, jusqu’au 14 octobre 2023