On parlera sans doute longtemps de la première du spectacle Harmonium symphonique – Histoires sans paroles qui a eu lieu mardi soir (24 mai), avec une centaine d’artistes sur scène dont l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières, le Choeur des jeunes de Laval, ainsi que les solistes Kim Richardson et Luce Dufault. En fait, la musique du mythique groupe québécois est portée à un niveau de raffinement orchestral inégalé jusqu’à maintenant. En fin de soirée, Serge Fiori, ému aux larmes, a pris la parole pour dire qu’il venait de vivre l’un des plus beaux moments de sa vie !
D’entrée de jeu, clarifions une chose : ceux qui aiment Harmonium ou qui veulent faire découvrir son oeuvre aux plus jeunes, ont tout intérêt à se rendre à l’Amphithéâtre Cogeco, d’ici le 4 juin. Il ne faut pas rater cette occasion de partager l’héritage de Serge Fiori, en communion avec des milliers d’autres spectateurs émus et cela dans des conditions acoustiques et visuelles exceptionnelles !
L’album double Harmonium symphonique – Histoires sans paroles, dont on a vendu 150 000 copies, est joué presque intégralement. Grâce à l’immense talent de Simon Leclerc, les chansons d’Harmonium, toutes reconnaissables instantanément, deviennent une symphonie.
Quant aux mélodies, elles sont souvent reprises par le Choeur des jeunes de Laval, qui s’en tient à des phonèmes (/a/, /o/, etc.) Il n’y a pas de paroles dans cette histoire où l’on est guidé par d’inoubliables envolées musicales : Aujourd’hui, je dis bonjour à la vie / Le premier ciel / Un musicien parmi tant d’autres, etc.
C’est Luce Dufault qui a l’honneur d’interpréter la partition vocale de la pièce-titre du concert Histoires sans paroles. Quant à Kim Richardson, elle est au coeur d’un des temps forts de la soirée avec son solo vocal dans L’Exil : puissance, justesse, intériorité… Frissons !
Visuel
Sur un gigantesque écran qui couvre tout l’arrière de l’immense scène de l’Amphithéâtre Cogeco, on voit d’abord apparaître des images d’une ville, devant laquelle un homme est assis sur un banc. Un peu plus tard, ce même homme en chair et en os descendra du plafond sur son banc et s’immobilisera au-dessus de l’orchestre. Un enfant viendra se joindre à lui pour assister à ces histoires sans paroles. Ce dernier descend parfois sur scène comme si le rêve se confondait avec la réalité.
On aura compris que conjointement à ce que raconte la musique, il y a aussi une histoire racontée en images, grâce à la scénographie de Marcella Grimaux. Soulignons aussi la collaboration de l’entreprise montréalaise PixMob dont les effets spéciaux ont, notamment, contribué à illuminer le plus récent spectacle de la mi-temps du Super Bowl.
Chaque spectateur de Harmonium Symphonique se voit d’ailleurs remettre à son arrivée une plaquette qu’il porte au cou et qui s’illuminera aux moments opportuns de certaines chansons. Cela vient augmenter encore le sentiment de vivre un moment fort ensemble avec les artistes et les autres spectateurs. Réussi !
Parmi les trouvailles visuelles de la soirée : quelle bonne idée d’avoir créé des personnages qui évoquent les lapins de la pochette de l’album Si on avait besoin d’une cinquième saison ! Ces belles bêtes semblent incrédules de voir tout ce monde rassemblé ! Amusant ! Émouvant !
Cela dit, ce spectacle dure plus de deux heures et demie, incluant un entracte; de nombreuses pièces sont plutôt lentes et s’étirent parfois jusqu’à une dizaine de minutes. Les magnifiques paysages paisibles qui apparaissent n’arrivent pas toujours à dynamiser la soirée.
Quant à l’homme sur son banc, il descendra six fois du plafond au cours du spectacle ! L’effet de surprise cesse d’opérer !
Orchestre symphonique de Trois-Rivières : «sur la coche!»
La cheffe d’orchestre Dina Gilbert dirige musiciens et choristes avec enthousiasme. L’OSTR a d’ailleurs eu droit à des félicitations bien senties de Serge Fiori : «j’ai rarement entendu un orchestre symphonique sur la coche comme ça!»
On remarque toutefois l’absence à cette grande première de l’orchestrateur Simon Leclerc qui est à l’origine de cette renaissance d’Harmonium. Cet arrangeur exceptionnel ne s’est pas contenté de transposer les chansons en gonflant le nombre d’instruments.
Il en a plutôt fait une oeuvre symphonique qui commence avec l’Épilogue de L’Heptade; plus tard viendra le Prologue. Faut-il y voir le symbole d’un nouveau point de départ pour la musique d’Harmonium ? Oui, c’est justement en ces termes que Leclerc avait résumé sa démarche, lors de la parution de l’album double symphonique en 2020. C’est donc un peu beaucoup la vision et le discours musical de cet artiste qui est joué à l’Amphithéâtre Cogeco. Pourquoi, alors, ne pas avoir confié la direction de l’orchestre à Simon Leclerc, créateur de cette nouvelle partition symphonique d’Harmonium, en plus d’être un chef très expérimenté ?
Parmi les autres héros de cette aventure, Sylvain Quesnel, aux guitares, affiche une maîtrise remarquable de l’instrument qui est au coeur de tant de pièces d’Harmonium.
Écrans
En début de soirée, Bernard Derome apparaît sur les écrans situés chaque côté de la scène. Dans un décor où l’on retrouve le tableau de Riopelle reproduit sur le coffret Harmonium symphonique, le célèbre présentateur de nouvelles nous incite, entre autres, à fermer nos téléphones et à déballer nos bonbons avant le début de la représentation. Pince-sans-rire, il ajoute : «Si la tendance se maintient, la soirée sera bonne et les souvenirs seront nombreux.» Une prédiction qui confirme une fois de plus la crédibilité de ce journaliste qui a fait époque !
Ce sera le seul moment où les écrans latéraux seront utilisés. Pour le reste, on estime que l’ampleur du dispositif scénique permet de suivre ce qui passe sur scène, peu importe l’endroit de la salle où se trouve le spectateur.
Serge Fiori : «Je pense que c’est ma plus belle soirée, ever !»
À la fin du spectacle, l’icônique Serge Fiori est monté sur scène en larmes. Il a dit, essentiellement : «Vous m’avez manqué ! … C’est pour vous autres que j’ai fait tout ça. … Je pense que c’est ma plus belle soirée, ever!»
Histoires sans paroles
Harmonium symphonique
- Du 24 mai au 4 juin, 2022
- Spectacle : 20h30
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