Il en a du front, Christian Bégin, pour animer La Nuit de la déprime sur un ton aussi joyeusement insolent! Sarcastique, il n’hésite pas à se payer la tête de ses nombreux invités, dont Ariane Moffatt, Vincent Vallières, Laurence Jalbert, Patsy Gallant, Martha Wainwright, Sam Tucker, Luc De Larochellière, etc. Tous se prêtent au jeu pour une bonne cause. Les profits de cette soirée bénéfice qui en est à sa troisième édition, sont versés à la Fondation Ronald-Denis; cet organisme vient en aide aux personnes souffrant d’obésité et qui sont souvent affectées par la dépression. Chose certaine, en ce 23 janvier, la morosité a été délogée par les éclats de rire, au Théâtre St-Denis.
D’entrée de jeu, Bégin chante Laissons entrer le soleil, une version française de Let the Sunshine in, popularisée par Julien Clerc, en 1969. Accompagné du coeur Antidote, l’espiègle au pantalon à pattes d’éléphant se permet aussi une chorégraphie désopilante!
L’animateur emprunte ensuite un ton jovialiste pour tenter de nous convaincre qu’il y a de la beauté partout, qu’il s’agisse de La Belle et la Bête ou du Quartier DIX30…
Du même souffle, il invite sa première invitée, Andrea Lindsay, à ouvrir le bal avec Je suis venu te dire que je m’en vais. Cette langoureuse mélodie de Gainsbourg est délicieusement servie par l’Ontarienne, dont le timbre de voix et le petit accent ne sont pas sans rappeler une certaine Jane Birkin.
Après une audacieuse relecture de Ne me quitte pas, par Lulu Hughes, l’animateur y va d’une remarque à double sens qui déclenche des rires. Bégin souligne que si Brel n’était pas déjà mort, l’interprétation de Lulu l’aurait sans doute achevé !
Et puisqu’il est question de déprime, Normand Brathwaite nous ramènera Les larmes de métal, son tube des années 1980, enregistré avec le groupe Soupir. Pur bonheur nostalgique!
Des duos étonnants
Pour terminer la première partie de la soirée, on invite l’infatigable Patsy Gallant. Toujours «glam», la septuagénaire interprète Shallow (du film A Star is born), en duo avec Antoine Gratton qui est aussi le remarquable chef d’orchestre du spectacle.
Après l’entracte, on verra, entre autres, Ariane Moffatt et Rita Baga jouer les amants torturés sur un classique de Dalida: Paroles… Paroles… En plus d’être une populaire drag queen, Jean-François Guevremont sait aussi chanter et se glisser avec grâce dans la peau de la célèbre star française née au Caire. Pour sa part, Ariane enfile un veston, le temps d’incarner Alain Delon suppliant ! On ne voit pas cela tous les soirs, souligne judicieusement Bégin !
Une déprime qui fait du bien…
Presque tous les numéros de cette Nuit de la déprime ont enthousiasmé le public! Cette soirée est une «catharsis», selon Bégin. On ne peut que lui donner raison, car dans ce contexte humoristique, les chansons tristes font souvent rire les spectateurs et allègent leurs coeurs.
On a, notamment, applaudi à tout rompre, Martha Wainwright, après sa vibrante reprise de Both Sides, Now de Joni Mitchell.
Et quelle bonne idée d’avoir invité Stéphane Archambault pour la touchante, Si on chantait ensemble du regretté Jean Lapointe!
Enfin, plusieurs sont restés bouche bée devant l’interprétation spectaculaire de Je suis malade par Vladimir Korneev. Avec sa voix puissante et sa forte présence sur scène, ce chanteur allemand, né en Géorgie (ex-Union-Soviétique), avait aussi fait grande impression à la Maison symphonique, le mois dernier, dans le spectacle Parapapam, aux côtés de Roch Voisine et Guylaine Tanguay (lire notre compte rendu).
D’où vient l’idée du «Blue Monday» ?
En terminant, rappelons les grandes lignes des origines de La Nuit de la déprime. Vous avez sans doute déjà entendu parler du «Blue Monday». Ce nom est utilisé pour désigner, généralement, le troisième lundi de janvier. Ce jour serait le plus déprimant de l’année, selon des recherches supposément basées sur divers paramètres dont la météo et les factures accumulées durant les Fêtes.
Vous aurez compris que ce concept plus ou moins farfelu, lancé par le Britannique Cliff Arnall, en 2005, n’est qu’un prétexte pour attirer l’attention du public sur la difficile réalité de nombreuses personnes psychologiquement fragilisées.
C’est dans cet esprit que le chirurgien Ronald Denis a mis sur pied une fondation qui a pour mission première d’accompagner les personnes souffrant d’obésité morbide, en rendant la chirurgie bariatrique accessible à un plus grand nombre de patients.
Le succès de La Nuit de la déprime, une levée de fonds au profit de la Fondation Ronald-Denis, se poursuit. Les billets sont déjà en vente pour la quatrième édition qui aura lieu le 22 janvier 2024. Billets
*Photos de Sébastien Jetté