C’est devant un public enthousiaste et complice que Marc Messier présentait, hier soir (2 décembre 2021), la première médiatique de son tout premier spectacle solo en cinquante ans de carrière. Il ne s’agit pas d’un show d’humour à proprement parler, mais le comique l’emporte la plupart du temps. À travers un dialogue avec son égo, l’artiste enjoué raconte l’histoire de sa vie qui rejoint aussi la nôtre.
Monologuiste heureux
Grand admirateur du monologuiste Yvon Deschamps, Messier réalise un rêve avec Seul en scène! où il est à l’aise comme un poisson dans l’eau ! Le décor se résume à trois balançoires qui semblent suspendues dans le temps et une chaise où le conteur ira s’asseoir par moments.
En nous ramenant dans sa ville natale de Granby à l’époque de sa jeunesse, le septuagénaire raconte avec humour son éveil à la sexualité, notamment lors d’une soirée où l’on avait invité Gerry Boulet et les Gants blancs. Messier venait de découvrir son égo qui l’avait incité à s’acheter un petit habit gris à 17,95$.
Cette voix intérieure l’incitant à se mettre en valeur allait s’imposer, malgré des réticences. En effet, à l’époque, les Québécois n’étaient pas encouragés à développer leur égo. Espiègle, Messier mentionne, entre autres, l’exemple du Frère André qui aurait pu faire une carrière lucrative dans la «business du miracle», n’eût été de son humilité.
Un soupçon de fabulation
On s’en doute, le sacripant mélange des faits réels à quelques doses de fabulation. Il prétend, entre autres, avoir vécu l’apparition de la fille de dieu, ce qui amène le conteur au moment féministe de la soirée. Lui qui a failli devenir «le beau-frère de Jésus» estime qu’il était ainsi préparé à jouer dans le monde surnaturel de Shakespeare, l’une de ses nombreuses expériences au théâtre.
L’homme de scène prend aussi plaisir à réciter du Baudelaire et emprunte les mots de Vigneault pour parler de la difficile conciliation carrière-amour : «Quand on court après la fortune, on risque de perdre l’amour / J’ai payé de mes clairs de lune de vouloir allonger les jours / Augmenter le chiffre d’affaires, pour gagner quoi? – quelques billets! / Qui ne pourront jamais refaire le hasard que je gaspillais…»
Autodérision
Intrigué par les pouvoirs de la chirurgie esthétique, qu’il observe quotidiennement à l’émission Les Feux de l’amour à TVA, le comédien raconte la crise intérieure qu’il a vécue quand on l’a invité à jouer dans La mort d’un commis voyageur, au Rideau vert. «T’as un nez de comédie, alors que là tu vas jouer un drame!», lui a martelé son égo.
Tout en évoquant l’immense succès de Broue et ses nombreux rôles mémorables dans La Petite Vie, Lance et Compte, Les Boys, etc, l’artiste revient volontiers à l’autodérision. C’est ainsi qu’après une dispute (fictive?) avec «un membre d’une communauté religieuse», un policier s’adresse à Messier : «J’vous replace là, Monsieur Meunier» (Claude). Puis l’agent de la paix corrige pour «Monsieur Côté» (Michel) et termine leur entretien en le saluant comme étant «Monsieur Gagnon» (personnage de Lance et compte interprété par Messier).
Célébrité, succès, etc., Messier nous rappelle que tout est relatif et qu’il vaut mieux apprendre à composer avec le vieillissement. Il affirme d’ailleurs qu’une des premières manifestations de l’andropause est une grande attirance vers la Floride pour y passer l’hiver.
La force du rêve
Dans le programme du spectacle, le metteur en scène Mani Soleymanlou écrit : «…je me demandais pourquoi à son âge… vénérable, après tout ce qu’il avait accompli, avait-il besoin de se mettre en danger. Un solo, écrit par lui, joué par lui… c’était de la folie !»
La réponse est maintenant claire ! Folie ? Oui. Folie douce et belle à voir d’un grand enfant de 73 ans qui aime encore se donner un élan sur sa balançoire.
Marc Messier seul… en scène!
Textes : Marc Messier
Collaborateurs aux textes : Mani Soleymanlou et Louis Saia
Mise en scène : Mani Soleymanlou
Première médiatique au Théâtre Outremont : 2 décembre
Québec / Salle Albert-Rousseau : 7 décembre
Gatineau / Salle Odyssée : 13 décembre.
En tournée un peu partout au Québec, au printemps 2022.
Trois supplémentaires ont été annoncées : à Brossard le 16 mars, à Montréal le 8 avril et à Québec le 18 avril.
Détails et billets : Messier