L’Orchestre classique de Montréal présentera une création d’envergure en concert, lors de la Journée mondiale de lutte contre le sida. Il s’agit du cycle de chansons théâtrales Unruly Sun inspiré de la vie du réalisateur et activiste queer britannique Derek Jarman. L’oeuvre sera à l’affiche, un soir seulement, dans la salle Le Chapiteau du Cirque Éloize. Entrevue avec le metteur en scène de ce spectacle qui sera aussi présenté à Hamilton et Toronto.
Les mémoires d’un artiste insoumis
Les chansons de Unruly Sun, interprétées par le ténor libano-américain Karim Sulayman, sont basées sur les mémoires de Jarman, intitulés Modern Nature. Ce réalisateur, qui a notamment signé des clips pour les Pet Shop Boys et Marianne Faithfull, voit sa vie bouleversée, après avoir reçu un diagnostic de sida, au milieu des années 1980.
Il décide alors de s’installer dans une cabane de pêcheur à Dungeness, sur la côte sud de l’Angleterre. C’est dans ce lieu appelé Prospect Cottage que l’homme tient son journal intime. Bien sûr, il y est question du défi de vivre avec le sida, du chagrin de voir ses proches mourir, mais aussi de ses efforts pour créer un jardin dans son nouvel environnement. Jarman revient aussi sur sa démarche artistique et son implication comme militant des droits des homosexuels.
Les créateurs de l’oeuvre
«Ce sera un spectacle sobre avec quelques projections évoquant l’univers de Jarman», souligne le metteur en scène Michel-Maxime Legault qui entend mettre l’accent sur le texte. «Tout est axé sur la poésie qui ressort du livret signé Mark Campbell», librettiste de plusieurs opéras dont As One, récemment présenté par l’OCM.
Quant à la musique de Unruly Sun, elle est écrite pour piano et quintette à cordes. La partition est du Canadien Matthew Ricketts, maintenant installé à New York. Rappelons que ce compositeur a notamment écrit, en collaboration avec l’auteur cri Tomson Highway, l’opéra Chaakapesh: The Trickster’s Quest, créé avec l’Orchestre symphonique de Montréal, en 2018.
«Lyrique et politiquement mordant»
Cette fois-ci, Ricketts, dit avoir été fasciné par la complexité du personnage central de l’oeuvre: « En tant que compositeur intéressé par la façon dont la musique, le texte et la narration pourraient se combiner pour créer une sorte de théâtre magique, Unruly Sun est un projet de rêve. Le texte de Mark Campbell, à la fois poétique, lyrique, surréaliste, profondément personnel et politiquement mordant, offre une myriade d’opportunités d’enchantement musical», estime le compositeur.
Alors, comment définir le style musical de Unruly Sun ? «Je n’oserais pas comparer cette musique à celles d’autres compositeurs», répond le metteur en scène, «mais je peux vous dire qu’il y a des mélodies et qu’on n’est pas du tout dans l’atonalité.»
Un lieu inusité
Mais pourquoi avoir choisi les locaux du Cirque Éloize, alors qu’il n’y a pas de numéros de cirque dans ce spectacle ? «D’abord, la salle Le Chapiteau est exceptionnelle avec ses grands murs et ses immenses fenêtres et, surtout, nous recherchions ce type d’acoustique.» Michel-Maxime Legault a d’ailleurs pu se familiariser avec cet espace situé dans l’ancienne Gare Dalhousie dans le Vieux-Montréal, alors qu’il a travaillé, plus tôt cette année, à la mise en scène du spectacle Entre ciel et mer du Cirque Éloize.
C’est donc dans un lieu plutôt inhabituel qu’on découvrira Unruly Sun que le ténor Sulayman chantera en anglais avec surtitres en français et en anglais. En fait, en quels mots pourrait-on traduire le titre du spectacle ? «Un soleil indiscipliné», répond Michel-Maxime Legault, enthousiaste à l’idée de faire découvrir au public Montréalais, la forte personnalité d’un homme qui a su garder sa dignité malgré l’atrocité du sida.
Unruly Sun
Mardi 1er décembre à 19 h 30 – Cirque Éloize (417, rue Berri)
Karim Sulayman, ténor
Michel-Maxime Legault, mise en scène
Anne-Catherine Simard-Desrape, éclairages
Matthew Ricketts, musique
Mark Campbell, livret
Quintet à cordes de l’OCM et piano
En anglais, avec surtitres en français et en anglais
Photo du ténor Karim Sulayman fournie par l’OCM