Louise Bédard met en danse trois duos dans sa nouvelle création, Promesses. Un travail du détail qui s’articule autour des arts visuels, du travail, mais aussi de la rupture, celle des gestes, des voix et de l’espace.
Avant d’être une promesse, l’origine de cette nouvelle offrande de Louise Bédard, était une prémisse : chaque danseuse et chaque danseur devait personnifier dans ses échanges ce qui fait d’elle, de lui, une femme ou un homme. Une force singulière émerge de ce jumelage, alors que s’exerce devant nous, le duo Marie Claire Forté et Nicolas Patry, tous deux rencontrés avec la chorégraphe lors de l’activité Midi-coulisses de l’Agora de la danse.
Louise Bédard nous parle de ses influences, qui poursuivent le travail amorcé dans La Démarquise. Une conception statuaire, dans laquelle les nappes utilisées par les artistes rappellent les drapés grecs. La danseuse et le danseur, tous deux grands, élancés, au physique sec, musculeux, et agile, se lancent dans un tango impromptu, à la découverte de l’autre. C’est une évolution, un effeuillage – pas au sens courtisant du terme – plus une découverte de l’autre, de ses caractéristiques.
Ce dernier duo est prévu en fin de spectacle, et intervient dans une sorte d’accalmie. Une rupture donc, qui avec cette immersion dans les temps anciens, est l’un des fils conducteurs de la pensée de la chorégraphe : « Dans notre quotidien, on fait souvent des choses qui n’ont pas rapport. La rupture demeure. » soutient-elle. Pour preuve, elle nous amène à donner notre avis sur une portion en cours d’élaboration. Des onomatopées, puis des mots, ceux du texte de l’autrice Guylaine Massoutre, deviennent une partition sonore à poser sur des gestes. Ou peut-être l’inverse ? Louise Bédard en est à ce stade dans sa réflexion, car elle cherche la justesse de l’émotion. Elle confronte sa danseuse et son danseur à leurs fragilités : parler, chanter, être à proximité du public, dans la pénombre ou dans des lumières vibrantes.
« Dans la vie, il y a plein de contraintes ». C’est ce qui anime celle qui fête cette année les 30 ans de sa compagnie, Louise Bédard Danse. Cette notion de travail soutenu, de labeur, elle en fait une pièce maîtresse de sa pièce : « Je veux que l’on sente que déplacer un objet, ce peut être facile ou non, selon la nature de cet objet ».
Si les corps sont soumis à la rigueur de l’Histoire et du travail, elle sculpte tout autant l’espace. La scène configurée en L, offre deux sens de projection, deux angles, et pourquoi pas, deux ressentis voire deux interprétations. Ces difficultés la nourrissent, car ce sont ces perspectives différentes qui amènent à changer les choses.
Au-delà de la simple notion de couple, chaque duo évoluera en aparté. Si celui de Marie Claire Forté et Nicolas Patry s’inscrit dans une découverte à la fois corporelle et vocale, celui de Alejandro De Leon et Louis-Elyan Martin jouera sur l’ambiguïté, inspirée d’un tableau romantique de Caspar David Friedrich. La fougue des jeunes Sébastien Provencher et Marilyn Daoust sera contrebalancée par l’immobilité et le minimalisme que leur impose la chorégraphe.
Une expérience à la fois physique et sensorielle sur la relation des corps et de leur aura, un cheminement physique et artistique, et une incursion dans ces images picturales… De prémisse à promesse, c’est la conception virtuose et minimale que nous propose d’expérimenter. Louise Bédard.
Crédit photo : Mathieu Cormier
Promesses est présenté à l’Agora de la danse les 5, 6, 7 février à 19h et le 8 février à 16h et 20h.
Durée : 2h, sans entracte
Chorégraphe : Louise Bédard
Interprètes : Marie Claire Forté, Marylin Daoust, Nicolas Patry, Sébastien Provencher, Alejandro De Leon, Louis-Elyan Martin