Après un immense succès de librairie, le roman d’Anaïs Barbeau-Lavalette prend l’affiche au TNM où les travaux de rénovation presque terminés promettent de belles surprises dont un nouveau théâtre baptisé Réjean Ducharme!
Une intrigue qui est une quête de vérité
La protagoniste ou narratrice cherche à comprendre qui était sa grand-mère ayant gravité autour des célèbres signataires du Refus Global et c’est toute une entreprise de fouilles du passé. Elle nécessite une mise en contexte social, religieux et politique que les premières quinze minutes réalisent.
Suzanne, la fameuse grand-mère, sera incarnée cinq fois par des comédiennes chevronnées soit Zoé Tremblay-Bianco, Marie-France Lambert, Evelyne Gélinas, Louise Laprade et en alternance par deux jeunes filles qui ont un rôle important tant en performance qu’en maîtrise de texte (Justine Grégoire et Agathe Ledoux). Paul-Émile Borduas est incarné par le bien connu Alex Bergeron qui récitera les plus beaux extraits, les plus fameux en tout cas du Refus Global.
Le public pourra s’enrichir de ces témoignages
Quiconque aura visionné attentivement et maintes fois l’instructif ou bouleversant documentaire Les Enfants du Refus Global de Manon Barbeau, lu ou mémorisé les passages-clefs du texte célèbre du Manifeste du Refus Global, suivra avec encore plus de netteté l’histoire bouleversante de la protagoniste magnifiant cette grand-mère poétesse, Suzanne Meloche.
Présentée au TNM depuis le 10 septembre, le texte est adapté d’un roman reconnu et apprécié. L’entreprise visant à comprendre le pourquoi de cet abandon de ses enfants (la mère et l’oncle d’Anaïs) bénéficierait, peut-être, aussi du heureux hasard être tombé, en librairie des livres usagés, sur le très beau recueil de poésie de Suzanne Meloche intitulé Les Aurores Fulminantes. Tout ceci pourrait, certes, aiguiser encore l’éclat du tracé de l’intrigue.
La tragédie de la schizophrénie de l’oncle François
Je prends un exemple de moment fort de la pièce : celle des centaines d’oursons que le personnage fugitif soit l’oncle d’Anaïs, François Barbeau, trimballe sur scène par manque d’affection. Il m’apparaîtrait peut-être comme le plus traumatisé de ce tableau familial, étant après tout le frère de la mère (soit Manon Barbeau non identifiée comme telle).
François est la plus vulnérable des victimes de cette accablante histoire. On voudrait creuser et procéder à une analyse psychologique du drame de sa schizophrénie conséquente au dépassement du supportable chez un individu trop malmené par ses proches.
Justificatif généralisateur motivant l’abandon des enfants tout petits
Le « On est allé trop loin » est un dédouanement facile. Il m’a semblé que le signataire réel, le peintre Barbeau (le grand père) aurait pu être moins épargné ici dans son attitude égoïste ou égotiste de faire distinction entre père biologique et père spirituel auprès de sa fille (Manon, mère d’Anaïs).
Les turpitudes de la débauche sexuelle de Suzanne
Était-il utile de révéler les fuites charnelles viscérales sans doute essentielles à guérir ses blessures auto-infligées et subies depuis l’enfance? Suzanne Meloche méritait-elle qu’on s’attache à amplifier d’éclairages aveuglants le projet d’exposer son cas? Le roman et la pièce de théâtre tentent, en effet, d’y répondre.
La femme qui fuit d’Anaïs Barbeau-Lavalette
Théâtre du Nouveau Monde
Du 10 septembre au 6 octobre 2024
Supplémentaire le 8 décembre à 14h
Adaptation théâtrale Sarah Berthiaume
Mise en scène Alexia Bürger
Durée : 1h25 sans entracte
Prochain spectacle du 19 au 27 octobre 2024
Je t’écris au milieu d’un bel orage
D’après Correspondance (1944-1959) par Albert Camus et Maria Casarès © Éditions Gallimard
Idéation et adaptation Dany Boudreault
Mise en scène Maxime Carbonneau