Le très jeune violoncelliste Victor Julien-Laferrière, ayant un brillant avenir devant lui, a eu le bon flair de s’associer un excellent pianiste accompagnateur en la personne de Jonas Vitaud. Leur magnifique programme présenté dimanche 27 octobre à la salle Pollack de l’Université McGill devant le public un tantinet clairsemé de la plus ancienne série de concerts en Amérique du Nord, le Ladies Morning Musical Club, a retenu l’attention avec fascination.
Les deux jeunes musiciens ont séduit dès l’amorce du programme avec des Variations de Beethoven montrant déjà la belle connivence et l’écoute quasi parfaites des deux chambristes entre eux. Après les Variations sur la mélodie du Bei Männern, welche Liebe fühlen de Mozart que Beethoven a composées en 1801, ce fut la fameuse sonate humoristique de Francis Poulenc écrite en 1948 pour Pierre Fournier. Pour nous qui la reconnaissons surtout dans sa version originelle d’accompagnement avec l’illustre dédicataire aux côtés du pianiste Jacques Février (EMI Angel C06973128), ce fut une énonciation rafraîchissante et bien intime, cocasse comme il se doit, de la part du sensible Victor Julien-Laferrière en belle communion avec Jonas Vitaud.
Après l’oeuvre de Janacek beaucoup moins connue quoique fort radieuse, la très belle sonate pour violoncelle et piano en sol mineur opus 19 de Serge Rachmaninoff, tout comme auparavant dans la sonate de Poulenc, a encore permis d’apprécier les merveilleux dialogues où chacun laissait à l’autre dignement sa juste place, chacun ajoutant des effets insistances expressives lui étant propres mais compatibles avec la dynamique élocutoire de l’autre, qualités fondamentales de symbiose entre ces deux touchants jeunes musiciens. En somme, ce furent deux duettistes s’épousant avec verve puisque les deux parties instrumentales sont sollicitées également en haute valeur de virtuosité et de nuances bouleversantes.
Ce fut donc un vrai succès authentiquement célébré tellement l’enthousiasme des applaudissements ultimes avant leur rappel redoublaient vigoureusement de sforzando par crescendis bien perceptibles. Tout ce sang neuf fait beaucoup de bien au monde musical montréalais, car la jeunesse attend son tour pour jouer dans nos rares séries de concerts ou de récitals établis où toujours les mêmes défilent, au détriment de la relève qui, j’en ai hélas de trop nombreux témoignages et constats, se décourage de la carrière ne prenant pas son envol. Ici, je ne vois pour eux deux que des encouragements à persévérer en splendide musique!