La vingt-cinquième édition du festival de films français connu à Montréal sous le nom de Cinémania bat son plein surtout au Cinéma Impérial mais également aux salles des cinémas du Musée, du Parc, Outremont et de la Cinémathèque québécoise.
Roubaix, une lumière
Jusqu’au 17 novembre inclusivement, nous aurons déniché pour vous d’excellents longs métrages mais notons un premier film remarquable: intitulé Roubaix, une lumière, il fut dirigé par Arnaud Desplechin et se trouve illuminé d’images somptueuses de la déliquescence de cette ville, en plus d’être muni d’une esthétique léchée, ainsi que d’une magnifique trame sonore nous envoûtant du début à la fin du film.
Les confondantes actrices Lea Seydoux (Claude), Sara Forestier (Marie) puis surtout l’exceptionnel Roschdy Zem (Daoud) campant un sympathique commissaire de police nous font comprendre ce qu’il retourne de l’atmosphère de cette ville à la frontière de la Belgique défrayant trop souvent la nouvelle du fait divers criminel… du moins du point de vue de l’ordre public ou policier.
C’est le capitaine Daoud qui perçoit et fait la lumière autour d’une multitude de dénonciations frauduleuses: ayant vécu dans ce patelin depuis toujours, on ne le berne pas facilement. Il devient en quelque sorte le Arsène Lupin moderne, le capteur d’écran cinématographique ou sur le plan du jeu, le Jean Gabin adapté à notre temps multiculturel. Il donne le spectacle de l’assurance de la démarche policière, la superbe conduite d’une garde à vue et d’une enquête préliminaire des deux jeunes femmes peu à peu démasquées. De l’autre côté les actrices mettent en scène autant leurs confusions sentimentales empêtrées d’émotions délinquantes que la révélation progressive de leurs motivations derrière toute leur dissimulation forcée.
Sympathie pour le Diable
Le film est un cinq étoiles et plus encore, car il est non seulement bien tourné mais excellemment construit sur le plan narratif. On ne peut en dire autant du film Sympathie pour le Diable de Guillaume De Fontenay mettant en vedette le Québécois Niels Schneider (révélé jadis dans un des premiers films bouleversants de Xavier Dolan, il y a bien longtemps de cela). Ce film raconte les aventures d’un reporter, Paul Marchand (donc Schneider), en Serbie et en Bosnie mais surtout durant le siège de Sarajevo. Il fut assez longtemps correspondant pour la radio de Radio-Canada tant en Bosnie qu’au Proche-Orient alors qu’il cherchait, peut-être à bon escient, à imposer un journalisme plus engagé, moins facétieusement neutre.
Le projet de faire son éloge post-mortem est valable mais le film est pétri de longueurs narratives, d’images répétitives, banales à la fin, face auxquelles nous avons vite appris à nous immuniser sans compter les incohérences de cette tentative d’apitoiement envers un homme encore jeune, certes, mais qui fit transport de détonateurs au profit de certains belligérants et qu’on voit inlassablement muni d’un cigare à la Castro, espèce d’embout ridicule qui lui donne un objet pour téter sa colère. La platitude d’une histoire d’amourette brodée sur fond de guerre civile avec ça, on n’est guère impressionné par ça non plus.
Mais surtout on ne peut pardonner à Niels Schneider une diction presque toujours calamiteuse qui nous empêche, même avec la meilleure oreille musicale ou délicate qui soit, de saisir ses paroles. S’il fut un supposé génie du journalisme de guerre et reporter courageux, ça nous échappe alors forcément. La plus belle des quelques bouleversantes scènes, celle du mioche dont un franc-tireur fait impitoyablement sauter la cervelle aurait dû être mise en entrée en matière, scène-choc idéale pour ce film violent, et le scénario réorganisé pour montrer le degré de démence des belligérants avec leurs revendications ou positions plus nettement, car, à 28 ans de distance, peu de jeunes comprendront cet étrange plaidoyer journalistique assez désespérant.
Pour ceux qui ont connu Paul Marchand comme reporter et en gardent authentiquement un souvenir net, peut-être son héroïsme un peu douteux poindra t-il à l’horizon. Ajoutons que comme Schneider campe dans ce film un garçon plutôt foncé voire noiraud et que toute sa pigmentation faciale à lui et sa physionomie est celle d’un blond de Syracuse pour prendre une métaphore, beaucoup trop beau pour le faciès que Marchand détenait d’ailleurs, c’est encore là beaucoup de choses qu’il faut avaler sans arrière-pensée. L’ennui nous gagne, la lassitude de ne pas se trouver captivé par cette histoire de génocide mal construite (même si les scénaristes ont admis avoir dû, dépassés, disent-ils, demander à Marchand lui-même d’organiser la logique des événements épars pour les rendre plus palpables). Niels Schneider joue cependant dans au moins trois films à l’affiche du festival Cinémania et donc nous surveillerons ces autres investissements de l’écran par la vedette québécoise.






























































