Les mots de Réjean Ducharme résonnent au Quat’Sous, cet automne, dans un spectacle regroupant des extraits de L’avalée des avalées, Le Nez qui voque, L’Hiver de force et L’Océantume. Le metteur en scène Frédéric Dubois présente, À quelle heure on est mort ? avec les interprètes Bozidar Krcevinac et Marie-Madeleine Sarr. Il s’agit d’une «recomposition d’un moment de théâtre», à partir du collage de textes de Ducharme réalisé par Martin Faucher et qui devait être joué, en 2020, par Gilles Renaud et Louise Turcot. Ces derniers sont d’ailleurs présents, à travers de nombreux extraits audio, durant À quelle heure on est mort ?
Ducharme et le confinement
D’entrée de jeu, on entend Turcot et Renaud raconter le deuil qu’ils ont vécu quand la pandémie les a amenés à abandonner leur spectacle intitulé À quelle heure on meurt ? C’est donc sur les ruines de cette pièce que Dubois construit sa nouvelle proposition théâtrale.
Le texte évoque la fin d’une étape : celle de l’enfance du duo composé des personnages de Ducharme: Chateaugué et Mille Milles. Tour à tour, espiègles, enjoués et colériques, les comédiens Marie-Madeleine Sarr et Bozidar Krcevinac contribuent à donner un sens très actuel aux thèmes de Ducharme en temps de pandémie, qu’il s’agisse de la révolte, de la mort, du deuil, de l’acceptation et du confinement.
À ce dernier sujet, notons que les deux personnages s’assurent d’ailleurs régulièrement de garder leurs distances, comme en témoigne clairement la première photo. Une précaution tout à fait conforme à l’esprit du mystérieux auteur québécois qui vivait en retrait du monde.
Des échos du passé
À plusieurs moments, on sent que les jeunes protagonistes déjà très déçus de la vie pourraient décider d’y mettre fin. D’ailleurs, on se souvient que le personnage de Mille Milles dans le roman Le Nez qui voque projette de se suicider pour ne jamais devenir un adulte. Cyniques face à l’idée qu’on se fait du bonheur, voudront-ils persévérer ? Stop ou encore ?
Parallèlement à cela, on nous ramène des extraits audio de Louise Turcot, notamment, qui raconte qu’elle a d’abord cru qu’elle pourrait reprendre son travail dans À quelle heure on meurt ? Mais, après quelques mois d’hésitation, il est devenu clair que ce projet ne se réalisera pas et elle en souffre : «c’est comme si dans un élan de création, Riopelle était resté figé avec son gros pinceau dans les airs!»
Ces nombreux retours en arrière, combinés à la qualité moyenne des enregistrements de Renaud et Turcot, finissent par lasser. On a vite compris leur déception et on la partage !
L’atout principal de À quelle heure on est mort ? est le naturel et l’apparente complicité des comédiens Marie-Madeleine Sarr et Bozidar Krcevinac. Ils apportent une fraîcheur aux textes de Ducharme qui collent à notre époque pandémique.
Enfin, il faut vous dire que d’énormes travaux sur l’avenue des Pins compliquent l’accès au Théâtre de Quat’Sous. Ce n’est pas une raison suffisante pour ne pas y aller, mais il vaut mieux se mettre en route un peu plus tôt que d’habitude.
À quelle heure on est mort ?
D’après le collage de Martin Faucher à partir de l’oeuvre de Réjean Ducharme
Mise en scène : Frédéric Dubois
Avec : Bozidar Krcevinac et Marie-Madeleine Sarr et des extraits audio de Gilles Renaud et Louise Turcot Décor : Anick La Bissonnière et Julie Charrette
Au Théâtre de Quat’Sous, jusqu’au 30 octobre