Éblouissant! Ce mot résume à lui seul le spectacle des 7 Doigts, qui vient clôturer les festivités montréalaises du centenaire de Jean Paul Riopelle. À l’aide de technologies de projection vidéo à 360° et de capture de mouvement infrarouge, cinq artistes de cirque nous entraînent dans différentes périodes de la vie du peintre. Une narration accompagne le spectateur dans cet hommage bien senti. Riopelle grandeur nature est une mise en scène de Samuel Tétreault dont le père a été l’un des derniers galeristes de ce monstre sacré au rayonnement international.
Une «boîte à images»
Le spectacle est présenté dans le studio des 7 Doigts, sur le boulevard Saint-Laurent, en plein centre-ville de Montréal. Pourtant, en entrant dans la salle, on a tout de suite l’impression d’être entraîné loin de la ville! Cet espace est entouré d’écrans géants où l’on projette des images de paysages grandioses que Riopelle a pu observer depuis son atelier de l’Île-aux-Oies.
Sur une scène placée en plein milieu du studio, Claire Hopson, Saali Kuata, Arthur Morel Van Hyfte, Guillaume Paquin et Camille Tremblay exécutent différents numéros parfois directement associés à des tableaux, qu’il s’agisse de Poussière de soleil (1953), Ombre verte (1967) et, bien sûr, de nombreux Hiboux (1970).
Sangles, mât suspendu, filet aérien et corde lisse sont intégrés au récit préenregistré de ce voyage dans l’oeuvre du créateur fougueux et anticonformiste qui aurait eu 100 ans en 2023.
L’un des temps forts de la soirée suit l’annonce de la mort de l’Américaine Joan Mitchell, muse de Riopelle. Des centaines d’oies apparaissent alors sur les écrans pour traduire le choc ressenti par le Québécois!
On se souvient qu’à partir de ce décès survenu en 1992, l’artiste a commencé à travailler sur un immense triptyque, L’hommage à Rosa Luxemburg, consacré à celle qui fut sa compagne durant près d’un quart de siècle.
L’Oie des neiges, omniprésente dans cette oeuvre, est aussi représentée sur scène, puisque les circassiens chiffonnent habilement des feuilles de papier pour les transformer en «Oies blanches», comme on dit chez nous.
On comprend que ce numéro tenait particulièrement à coeur au metteur en scène Samuel Tétreault qui a aussi voulu souligner le travail de son père, Michel, audacieux organisateur du vernissage de cette fresque de 45 mètres, considérée comme le testament artistique du peintre.
« Mon premier contact avec l’œuvre de Jean Paul Riopelle remonte à octobre 1993 lors du vernissage de l’Hommage à Rosa Luxemburg à la galerie de mon père. J’avais dix-neuf ans… Je me souviens de l’effervescence de l’événement, de la présence rare de Riopelle et de cette fresque monumentale qui m’avait considérablement impressionné. La création de «Riopelle grandeur nature» est en quelque sorte un retour aux sources pour moi, une opportunité extraordinaire de combiner mes passions pour célébrer la vie, l’œuvre et le génie créatif de ce géant artistique québécois qui figure parmi les plus grands. »
Parmi les autres moments mémorables de cette création : un numéro de danse acrobatique, exécuté avec des capteurs de mouvements à l’infrarouge. Un artiste de cirque s’inspire alors du geste spontané, caractéristique du mouvement automatiste et, en dansant, il crée une œuvre d’art numérique qui apparaît sur écran. Magique!
En plus du talent des circassiens déjà nommés, il faut souligner l’excellence de la conception vidéo de Thomas Payette. La musique et les effets sonores de Colin Gagné et ses collaborateurs sont aussi un facteur clé de l’envoûtement qui se dégage de ce spectacle d’environ 70 minutes.
Une exposition multimédia
Ajoutons qu’une exposition multimédia intitulée Riopelle grandeur nature sera à l’affiche au studio des Sept doigts, du 16 février au 10 mars. Les visiteurs pourront, notamment, découvrir des projections vidéo à 360°, liées à l’univers du peintre et admirer une vingtaine d’oeuvres de Riopelle: eau-forte, lithographie, bronze, etc. On a aussi aménagé une reconstitution scénographique d’un atelier de Riopelle. Pour les détails concernant l’horaire de cette exposition, c’est ici.
Riopelle grandeur nature
Idéation et mise en scène : Samuel Tétreault
Au studio des 7 Doigts, 2111 boul. Saint-Laurent, Montréal
Jusqu’au 10 mars / Billets
*Photos fournies par le collectif Les 7 Doigts de la main