J’étais à la Première de la comédie musicale «Lily St-Cyr» hier soir et c’était extraordinaire. Je ne m’y attendais pas. Les productions des 3 pointes et evenko ont réussi à réunir des interprètes de haut calibre avec des voix magnifiques, mais surtout un texte captivant tout en humour sur une mise en scène minutieuse. C’est un spectacle à voir, autant pour ceux qui ont vécu les années 40 que pour les autres.
L’histoire est basée sur des faits de l’époque où Montréal échappait aux interdits et permettait tout dans le Red Light. Quand le gérant (Thomas) du Théâtre Gayety engage l’envoûtante Lily St-Cyr, il se met à dos sa femme (Sophie) qui désire être chanteuse, le propriétaire du théâtre concurrent, ainsi que la première femme élue à Montréal (Jessie) pour combattre le vice. Toutes ces histoires s’entrecroisent avec plusieurs surprises, jusqu’à une finale imprévisible.
À la Première, l’auteure Mélissa Cardona est venue présenter l’oeuvre et nous rappeler que la scène du TNM était l’endroit exact où s’est produit Lily St-Cyr, quand ce théâtre portait le nom du Gayety. Tout en soulignant qu’une rumeur veut que le fantôme de celle qu’on surnomme Miss Champagne (Lily St-Cyr) s’y manifeste à l’occasion.
Faute de fantôme, son esprit était sur scène grâce à la présence et au charisme de Marie-Pier Labrecque dans le rôle de Lily St-Cyr. Sa sensualité et son jeu, combinés à un accent qui semblait des plus naturels, m’ont impressionné. Elle interprète les chansons avec aplomb d’une belle voix juste et gracieuse.
Vocalement, Lunou Zucchini dans le rôle de Sophie, est tout simplement spectaculaire. Avec des chansons de Piaf, elle est brillante. Quand elle entonne les autres chansons, elle est intense et touchante grâce à une voix versatile, puissante en « belting » mais émotive quand elle se fait toute douce.
Le trio de femmes est complété par Jessie, une femme forte qui complote tant bien que mal contre le vice et pour le féminisme, jouée à merveille par Kathleen Fortin. Toujours intense, les chansons lui vont comme un gant. Une en particulier avec des airs de blues, et une autre très touchante à la fin du premier acte. On en aurait encore repris.
Roger La Rue est le caméléon jouant une multitude de personnages. Il est drôle en téléphoniste et chef de police, plus ou moins sérieux en propriétaire du Gayety ou radioman, et c’est son juge de la fin qui aura le dernier mot du spectacle. J’en dis pas plus. Sachez seulement qu’il réussit à voler la vedette à plusieurs occasions.
Maxime Denommée (Thomas le gérant) et Stéphane Brulotte (chum de Lily) complètent une distribution de premier choix. Ils sont irréprochables même dans un rôle secondaire, avec de très belles voix.
L’histoire est bien resserrée grâce à un texte où chaque mot a son importance. La mise en scène précise et soignée de Benoît Landry permet d’avoir une histoire fluide qui se déroule dans plusieurs lieux. Ils ne sont que 6 comédiens, et pourtant par moment on a l’impression qu’ils sont 15. Les costumes et perruques complètent l’illusion au point que ça m’a pris plusieurs scènes avant de reconnaître Lunou Zucchini en Sophie.
Quelques chorégraphies agrémentent les numéros musicaux. On a tous eu un gros coup de coeur pour la danse à claquette de la fin par le juge complètement fou.
Une grande palette de styles de musiques permettent de rappeler cette époque riche en couleurs, grâce à une belle instrumentation dans les arrangements. Plusieurs chansons de groupe comportent même des contrepoints et contrechants très accrocheurs.
«Lily St-Cyr» est une belle création Québécoise qu’il faut aller voir. C’est drôle, émouvant, agréable à écouter, et surtout une partie de notre histoire qu’il faut reconnaître. Je recommande très fortement.
Les bons coups: interprètes avec de superbes voix, mise en scène, textes, musique, faits d’époques relatés, éclairages
Les moins bons coups: on en aurait pris encore plus!
Équipe de création
Texte: Mélissa Cardona
Musique: Kevin Houle
Mise en scène: Benoît Landry
Chorégraphies: Alex Francoeur
Décor: Marilène Bastien
Costumes: Sylvain Genois
Accessoires: Julie Measroch
Éclairages: Martin Sirois
Conception environnement sonore/Arrangements: Guido Del Fabbro
Maquillages/Perruques/Coiffures: Virginie Bachand
Direction vocale/Arrangements: Émilie Josset
Sonorisation: Louis Morneau
Distribution
Marie-Pier Labrecque (Lily), Lunou Zucchini (Sophie), Kathleen Fortin (Jessie), Maxime Denommée (Thomas), Roger La Rue, Stéphane Brulotte.
Musiciens
Vincent Carré, Alexis Dumais, Stéphane Tellier, Guido Del Fabbro, Luzio Altobelli, David Carbonneau, Renaud Gratton, Julie Houle, Jean Derome, Guillaume Bourque.
Théâtre du Nouveau Monde (84 Rue Sainte-Catherine Ouest, Montréal)
Présenté en français du 12 au 22 juin 2024 à 20h.
Billets en vente (38$ à 86$) au https://www.lilistcyr.ca
CD disponible sur place.
De juillet à décembre, en tournée: Trois-Rivières, Saguenay, Longueuil, Laval, Gatineau, Québec, Valleyfield, St-Eustache, St-Jérôme, Lasalle, St-Hyacinthe, St-Jean-sur-Richelieu.
Durée: 2h25 avec entracte
Photos: Olivier Savoie Campeau