Vendredi soir à la Place des Arts a eu lieu la première représentation du spectacle « Ça fait 50 ans qu’on se connaît », où plus d’une quinzaine de succès de Beau Dommage jouissent de magnifiques arrangements symphoniques interprétés par l’Orchestre Métropolitain et… 11 chanteurs !
Le rideau translucide sur lequel on pouvait voir en filigrane la pochette de leur tout premier album lancé en 1974 s’est levé sur Montréal avant de souligner la présence de cinq membres du groupe légendaire qui ont salué la salle Wilfrid-Pelletier du haut de leur balcon et qui furent chaudement applaudis. L’émotion était dès lors palpable.
Difficile d’expliquer pourquoi le public soit par la suite resté si poli devant les pièces présentées. Bien qu’il ait fortement démontré son appréciation à la fin de chaque air, il a fallu attendre à la presque toute fin avant qu’il ne se dégêne et entonne La complainte du phoque en Alaska, encouragé par les artistes sur scène.
Des niveaux sonores à revoir
Il est possible qu’il se concentrait sur les excellents virtuoses, malheureusement souvent enterrés, par le micro des interprètes qui semblaient nerveux (ou peut-être intimidés par la présence du groupe?) et qui peinaient à doser les grandes envolées et les retenues. À ce sujet, pourquoi 11 chanteurs ?
Antoine Gratton, arrangeur et directeur musical, explique qu’il voyait une grande importance dans l’anonymat de l’interprète, qu’ils étaient tous au service de la chanson : la vraie vedette. Ainsi, dans la majorité des pièces, on retrouvait plusieurs chanteurs à la fois, mais dont les harmonies n’étaient pas toujours aussi cohérentes que sur les bandes originales, pourtant une grande force du groupe maintenant cinquantenaire. Visiblement, toutes les voix ne se marient pas aussi bien que celles de Desrosiers, Rivard et Bertrand.
Ils sont toutefois tous individuellement d’excellents chanteurs et méritent d’être nommés et reconnus. Dans l’ordre ci-bas :
Allyson Pétrin, Audrey-Louise Beauséjour, Jules, Lyxé, David Latulippe, Krystel Mongeau, Alexandre Désilets, Sophie Grenier, Franck Julien, Coral Egan.et Audrey-Michèle.
Des choix déchirants
C’est le groupe même qui a fait le choix des chansons. Alors qu’il désirait représenter tous les albums et tous les auteurs, la contrainte de temps a fait en sorte que certains grands succès ont dû être écartés tel que J’ai oublié le jour ou encore Tout va bien.
Évidemment la quasi-totalité du premier album se retrouve sur la liste des élues tant les chansons furent – et sont toujours – si populaires. Ginette, Tous les palmiers, Le picbois, Le géant Beaupré, Harmonie du soir à Châteauguay (cette dernière nous a d’ailleurs amené un rigolo solo d’égoïne!), etc. Mais l’une des conditions sine qua non à ce concert selon le batteur de Beau Dommage Réal Desrosiers, était l’inclusion de Un incident à Bois-des-Filions, une chanson de vingt minutes qui constituait toute la face B de l’album de 1975 Où est passée la noce ? et qui comportait déjà à l’époque une section de cordes.
L’Orchestre Métropolitain dirigé par Adam Johnson, l’entame en pénultième segment où pendant 22 minutes, 10 des 11 chanteurs seront debout, immobiles, parmi les musiciens pour interpréter ce texte chargé, sur des orchestrations tout aussi prog que l’originale. Un tour de force !
Tout aussi agréable pour les yeux
L’habillage visuel fût très agréable illustrant bien tantôt la froidure de Montréal sur J’aimais l’hiver de Rivard, tantôt la nuit étoilée sur le trio Rouler la nuit, Marcher tout seul la nuit sur une route de campagne et Heureusement qu’il y a la nuit, qu’on a brillamment réuni de par leur champ lexical évident.
Les guirlandes de lumières rouges et vertes ont tôt fait sourire sur 23 décembre, mais la plus belle demeure La complainte du phoque en Alaska où une grosse boule en miroir tournoyait entourée de ballons rouges montant et descendant du plafond de la scène.
Ayant brisé la glace avec Montréal, le spectacle boucle la boucle avec Le blues d’la métropole où les artistes nous réservent quelques surprises à commencer par le directeur musical Antoine Gratton qui émergera et verra son clavier surplomber l’orchestre.
Heureux de les revoir sur scène, le public applaudira à tout rompre les 5 membres de Beau Dommage à qui on a eu la délicate attention d’offrir des fleurs.
Le spectacle sera aussi présenté à Trois-Rivières, Sherbrooke et Québec. Les rares billets restants peuvent trouver preneur ici.