Que de vastes talents nous sont révélés ou confirmés en ce centenaire du prestigieux Concours Chopin de Varsovie!
Vingt pianistes ont désormais été choisis pour être ré-écoutés en un troisième récital de 55 minutes dit du troisième tour.
Il s’y trouve encore deux Canadiens qui demeurent en lice pour les grands honneurs parmi les plus de six cents qui avaient à l’origine postulé : en dix jours, nous sommes passés de 85 retenus au premier tour, à 40 élus d’intérêt pour le second tour et, là, il n’en reste plus que 20!
La crème de la crème
Ainsi, maintenant, Kevin Chen (20 ans) et Éric Guo (23 ans) seront nos Canadiens du troisième tour de piste musical…ce qui me rappelle les exigences de mes nombreux 1500 mètres en athlétisme où, au fil de trois tours et trois quart de tour tout se jouait au sprint ultime de la finale jusqu’à la ligne d’arrivée!
Des révélations musicales majeures
Ce concours passera à l’histoire musicale mondiale pour avoir révélé la plus impressionnante moisson de talents phénoménaux.
À prime abord, quatre révélations des plus purs génies d’interprétation pianistique promettent nos plus grands futurs bonheurs.
Au premier chef, je nommerai ici, dans l’ordre d’une infime préférence, le fulgurant Hyo Lee (18 ans) soit l’incarnation même de la grâce, de l’inspiration lucide, celui dont on n’oubliera jamais l’adresse et l’alacrité: il reste l’adolescent au plus magnifique sourire -quasi étrusque- de pure félicité musicale. Il nous vient de la Corée du Sud.
Autre pure merveille
Ensuite, rien de moins qu’une déesse de la gracilité dotée d’un insurpassable talent de phrasé noble, tout en équilibre et en profondeur de réflexion! Voici donc la richissime Tianyao Lyu (très bientôt elle fêtera ses immenses 17 ans!). Son aisance technique est désarçonnante.
L’Orphée prodigieux Yang Jack Gao
De ma vie (que j’espère pouvoir prolonger encore un autre 65 ans grâce au baume de cette musique si parfaitement interprétée), je n’ai entendu prodige pareil au don de faire surgir du seul art de caresser ou heurter avec finesse l’ivoire et l’ébène du bout de ses prodigieux doigts de magicien … un tel talent que celui du Chinois Yang Jack Gao (22 ans).
Sa sensuelle interprétation survoltée et dionysiaque des 24 Préludes opus 28 de Chopin, en direct de ce stressant deuxième tour de piste relègue aux oubliettes les plus grandes versions d’aujourd’hui (Éric Lu, Béatrice Rana) et même d’hier (Arrau, Anda, Pollini, Moravec, presque jusqu’à…Cortot!).
Un Georgien comme Czyffra!
Autre Everest de ce concours aux mille frissons — je vous l’écris, ce Concours c’est mieux que tout vaccin nous prémunissant à jamais contre toutes les horreurs meurtrières de notre suicidaire époque — voici l’onguent miraculeux d’une technique irréprochable: d’un lyrisme prométhéen doté d’une virile exacte mesure avec des doigts de Titan protecteur du lyrisme et de la poésie chopinesque, oui, en un seul et même emballage voici David Khrikuli (24 ans).
Il doit être de notoriété, quelque part au paradis désigné par l’Empyrée qu’à la naissance de Khrikuli, les âmes ailées de George Czyffra de Claudio Arrau et celles de Richter et Clara Haskil elle-même, en pleine bagarre de Champs Élysées avec leurs dix doigts chacun ont chacune cherché à entrer dans ce corps imposant.
Je ne sais laquelle des divinités musicales a triomphé et s’y trouve maîtresse de ce cerveau héroïque, mais ma crainte semble être qu’elles y soient toutes présentes en ce corps et se cèdent, en pax aeterna, la place et la prédominance! Quel trésor artistique!
Et ce n’est pas tout: Zitong Wang
Évidemment, je ne me consolerai jamais de l’élimination du chic Taïwanais Kai-Min Chang (24 ans) hier soir, lui dont les programmes furent sans contredit parfaits tout comme je déplore que la plus pure des déesses musicales la jeune Chinoise Yanyan Bao (19 ans), dotée de toutes les finesses, et aussi que le Britannique de 17 ans Jacky Zang aussi soient aussi disparus des listes au profit du désastreux, musculaire et brutal Américain William Yang (24 ans) qui passe comme un film violent, encore, au tour suivant, tout en épatant je ne sais qui du jury en pointage.
Je l’entends avec longanimité tout en décibels et en désenchantant ratés de piètre éloquence.
Antidote à ce malheur, j’étancherai ma soif de poésie via l’éblouissante Zitong Wang (26 ans) passée au troisième tour pour me les faire oublier ces évanescents d’un coriace concours.
Zitong, avec son aisance enchanteresse de surdouée se libérant des plus ardues difficultés, en pur cantabile, lénifiera nos deuils imprévus.
Eric Lu et Tomoharu Ushida
À part la Japonaise Miyu Shindo (23 ans) qui atteint également le troisième tour, j’écoutais hier soir l’exquis Japonais Tomoharu Ushida (bientôt 26 ans), si distingué de raffinement, assis au Valhalla de l’impeccable salle de la Philharmonie de Varsovie en me disant que j’étais déjà aux Portes du Paradis.
Autre étoile du Concours Chopin, Eric Lu (27 ans), demeurera au sommet de son art et il sera le point de mire de ces trois derniers talents confirmés mis en évidence ici.
Ainsi, dimanche soir, 12 octobre 2025, à l’ultime séance des cinq derniers récitals contigus de cinquante minutes chacun du second tour, j’ai eu la certitude d’être le témoin de cette domination de la sensualité et de l’ingéniosité des artistes asiatiques.
Car, sur les 20 en troisième étape de quatre, 15 pianistes le sont de prima faciès en totalité ou en bonne partie. Trois Polonais restent en lice pour faire honneur à l’école nationale de piano qui reste, ici, un culte patrimonial et une religion auxquels j’adhèrerais volontiers si Dieu eût voulu que je sois Polonais.
Photo : Krzysztof Szlezak































































