Une fois surgissant sur scène, drapée d’élégance radieuse telle une des Muses grecques les mieux incarnées à scintiller sur la scène de la salle Bourgie élue pour recevoir le CMIM, je me suis vu frappé par la foudre de cette présence scénique de la très jeune soprano Ariane Cossette qui aura ébloui tout auditeur avisé.
Aucun(e) concurrent(e) de ce concours n’avait su, jusqu’à ce jour-là (nous étions déjà lundi 26 mai), m’ensorceler aussi magistralement… Est-ce écrire que je me suis laissé électriser de la sorte ? Ariane Cossette dispose, je l’affirme le cœur sur la main de ce je-ne-sais-quoi de pure capacité d’emporter vers la rêverie, de ce don de réanimer un songe théâtral par l’adresse de ses gestes, les frémissements discrets mais perceptibles de sa voix qui la font ou l’ont fait et la feront devenir une des plus grandes voix de l’ art opératique au pays.
Massenet: Le Cid
La diction française, l’expressivité de cette Chimène pleurant son père tombé sous l’épée de son Rodrigue adoré (mais fils vengeur impossible à vénérer ouvertement) fut un moment de pure révélation: j’y ai reconnu toute l’intensité sonore irréprochable, bien entendu la justesse musicale impeccable en nuances, en dynamiques et bouleversantes par-dessus le marché, d’Ariane Cossette qui s’est postée là au faîte de l’interprétation dramatique du célèbre Pleurez mes yeux du Cid de Massenet.
Une salle vibrant d’émotion magistrale
Ariane Cossette possède glorieusement cette voix de prima donna (je l’imagine dans Wagner et Strauss) mais elle ne la laisse s’envoler qu’avec cette charge émotive et émouvante qui la rend cristalline et qu’on accepte de savourer avec cette force ou cette fascinante portée… Un peu comme on s’enivre volontiers d’un nectar onirique mielleux semblable aux Sauternes grands crus tourbillonnant jusqu’au rebord cristallin des coupes promettant la plus haute allégresse musicale.
A Streetcar named Desire
Suivit dans son bref programe de trois arias conçu pour la situer dans le firmament opératique, en langue anglaise tout aussi limpide, le I want Magic d’André Previn tiré d’A Streetcar named Desire. Là encore, l’interprétation dramatique est renversante, le jeu scénique à point: l’actrice est là doublée d’une très grande interprète vocale, cette artiste étant, à mon avis, inouïe. En langue italienne un Oh smania! Oh furie! de Mozart réussi (extrait d’Idomeneo) complétait son programme.
Avant le volet Mélodies commençant les 28 et 29 mai à la salle Bourgie, invitons le public à revenir en salle pour la suite du concours, car elle est tout à fait adaptée au volet de récital vocal qui exige moins de connaissances des librettos, plus d’épanchement poétique, aussi un tout aussi important rôle musical dévolu au pianiste accompagnateur : l’intimité quoi et non les grands éclats des planches et de la scène venus surtout d’Italie, d’Allemagne ou d’Autriche, d’Europe centrale, de Russie et de France.
Le volet Aria s’écoutait en diffusion Web
On aura perçu que la salle Bourgie est bien minuscule pour les grands airs d’opéra accompagnés au modeste piano de concert (et non à l’orchestre comme ils étaient désignés de l’être) : on peut facilement défoncer le tympan des auditeurs si on évalue mal l’espace sonore de la salle qui n’avait jamais été autrefois qu’un lieu de prière.
On aura aussi remarqué le peu de public présent à la salle Bourgie, car c’est une assistance fort minimale aux séances mais elle s’explique: les mélomanes auront en effet tendance à écouter ce volet Aria de chez eux plutôt que de supporter ces tonitruantes voix à grand déploiement exercées pour des salles de 3000-places-et-cinq-balcons ou mezzanines.
La puissance vocale déchaînée est sûrement le nec plus ultra des célèbres voix inoubliables passées au Teatro Colon, à La Scala ou à l’ancien Carnegie Hall ou au Met, c’est bien convenu. À la Salle Bourgie, les verres de Tiffany aux fenêtres prouvent leur résistance héroïque mais les auditeurs reviendront s’asseoir, je le souhaite, au bord de ces vitraux pour entendre les mélodieuses voix des concurrent(e)s en récital.
Photo : Alex Robinson































































