Première du spectacle «Amsterdam», en hommage à Jacques Brel, ce soir (25 juillet), au TNM, un théâtre où le célèbre belge s’est lui-même produit plusieurs fois, à l’époque de la Comédie canadienne. «Quand on n’a que l’amour», «Ne me quitte pas», «La quête», «Amsterdam», etc. sont habilement intégrées dans l’histoire imaginée par Mélissa Cardona, à partir de personnages des chansons du grand Jacques, qu’il s’agisse de Jef, Mathilde, Clara, Fanette, Madeleine, etc.
À l’évidence, Jean-François Pronovost, (le Passe-Montagne de la nouvelle mouture de Passe-Partout) se glisse avec brio dans la peau du jeune Brel, à l’époque où il travaille à la cartonnerie de ses parents et qu’il commence à écrire des chansons. La vie relativement tranquille de l’artiste naissant et de ses collègues de travail sera bouleversée par l’arrivée d’un imprésario (Jean-François Blanchard) et de son épouse (Ève Gadouas), à la recherche de nouveaux talents invités à prendre la route de Paris. L’ambition secouera alors l’amour, l’amitié et la loyauté à l’intérieur de ce groupe de jeunes.
Une histoire qui colle aux chansons de Brel
Les personnages développés par l’auteure apportent de nombreuses résonances aux pièces interprétées par les onze artistes présents sur scène. Par exemple, Jef (Mathieu Richard) livre certaines strophes de «Ne me quitte pas», sur un ton déchirant de supplication, en alternance avec, entre autres, Jacques (Jean-François Pronovost) et Clara (Elodie Bégin) qui chantent leurs craintes de perdre l’être aimé avec plus de retenue, mais les larmes au bord des yeux. L’art de la nuance !
Les performances vocales sont honnêtes, compte tenu du fait qu’il s’agit de comédiens qui chantent, au son de musiques préenregistrées. En plus, ils exécutent des chorégraphies qui, en général, collent aux chansons et donnent du rythme au spectacle. On s’interroge toutefois sur certains choix de la chorégraphe Marie-Eve Archambault, notamment, pour «Le Plat pays», où le vent est illustré par un amusant mouvement de roulement des mains, ce qui ne correspond pas au ton lugubre de la chanson : «Avec le vent du nord qui vient s’écarteler Avec le vent du nord écoutez-le craquer».
Parmi les temps forts du spectacle, soulignons «Les Vieux amants», avec Jean-François Blanchard et Ève Gadouas et leurs querelles incessantes. Là encore, l’histoire de leurs personnages (Romain et Éliza) atteint un sommet d’émotion à travers la chanson. Bien joué ! Enfin, un frisson traverse la salle quand tout le groupe murmure «Voir un ami pleurer», après le suicide de Jef. Bouleversant !
Cela dit, tout n’est pas triste dans «Amsterdam». Par exemple, on ouvre la deuxième partie avec l’époustouflant Pronovost qui arrive de la salle en chantant a cappella «La valse à mille temps». Espiègle, il se penche vers un spectateur : «Au deuxième temps de la valse Nous comptons tous les deux une, deux, trois». Malgré le débit plus que rapide de cette valse, le jeune homme ne perd pas un mot et il parcourt le parterre dans tous les sens sans s’essouffler. Épatant ! Cette entrée en matière traîne toutefois en longueur, comme de nombreux textes qui gagneraient à être resserrés dans ce spectacle de 2h15 avec entracte.
Une équipe qui sait garder son sang-froid
Saluons le sang-froid des chanteurs qui ont dû composer avec de récurrents problèmes de son, durant la première partie du spectacle qui a d’ailleurs commencé avec une vingtaine de minutes de retard. Plus encore, on a perdu des débuts de phrases musicales, parce que les micros n’étaient pas ouverts aux bons moments. Plutôt étonnant, car «Amsterdam» a déjà été présenté des dizaines de fois en tournée et au Théâtre des Grands Chênes de Kingsey Falls, l’été dernier. Parions que le spectacle sera encore meilleur, une fois passé le stress de cette première laborieuse au TNM.
Amsterdam (Un théâtre musical d’après l’œuvre de Jacques Brel)
Mise en scène : Mélissa Cardona
Avec : Jean-François Pronovost (Brel), Mathieu Richard, Jean-François Blanchard, Ève Gadouas, Annie Kim Thériault, Elodie Bégin, Martin Lebrun, Sarah Leblanc-Gosselin, Albane Sophia Château, Eloisa Cervantes, Véronique Savoie et Jean-Bernard Hébert (voix hors champ)
Arrangements musicaux : Sébastien Marchand
Direction vocale : Othniel Petit-Frère
Chorégraphe : Marie-Eve Archambault
Crédit photo : André Chevrier
Au Théâtre du Nouveau Monde, jusqu’au 10 août 2019
2 h 15, avec entracte