Le légendaire groupe américain The Manhattan Transfer célébrait ses 50 ans dans le cadre du Festival de jazz international de Montréal, hier soir (7 juillet). Qui n’a pas déjà roulé des épaules en entendant Boy from New York City ? Ce tube aura permis à Manhattan Transfer de marquer l’histoire de la musique en devenant le premier groupe à remporter un Grammy Award dans les catégories Pop et Jazz en une même année ! Où en sont aujourd’hui ces chanteurs de haute voltige ? La meilleure réponse à cette question est sans doute l’ovation qu’ils ont reçu au Théâtre Maisonneuve après un feu roulant de 90 minutes de doo-wop !

Entourés de trois musiciens, le quatuor n’a rien perdu de sa ferveur ! Quelles harmonies vocales ! Quel swing ! Quel voyage dans une époque où la musique se combinait à des mouvements gracieux et synchronisés ! Et voilà les quatre complices qui sont de profil, levant un bras et agitant la main, espiègles comme des gamins ! À d’autres moments, ils avancent délicatement leur jambe droite comme pour dessiner le mouvement du rythme du bout du pied. Plaisir sur scène ! Plaisir dans la salle !
Une aisance qui laisse pantois
Ils n’ont rien de hautain ces artistes de ligues majeures ! On ne tarde pas à embarquer avec eux pour Route 66 ou à trinquer virtuellement sur Java Jive («A cup, a cup, a cup, a cup, a cup»). Janis Siegel, Cheryl Bentyne et Alan Paul font maintenant équipe avec Tris Ethan Curless qui a succédé au fondateur du groupe Tim Hauser décédé d’une crise cardiaque en 2014. Curless qui a travaillé, entre autres, avec Bobby McFerrin (Don’t worry, be happy) et les formations Pentatonix et Straight No Chaser est lui aussi un chanteur épatant qui se promène d’une extrémité à l’autre de la gamme avec une aisance qui laisse pantois !
Birdland
Ces chanteurs qui pour la plupart approchent ou on atteint l’âge de 70 ans ont su tenir la forme ! Cela s’entend, entre autres, dans l’hallucinante Birdland, une reprise chantée de cette pièce célèbre et complexe (!) du groupe Weather Report. Des décennies plus tard, la magie opère toujours avec ce morceau qui leur a valu deux prix Grammy (meilleur arrangement vocal et meilleure performance jazz-fusion) en 1980.
Magie Rose
Ces chics types habitués au public montréalais savent dire «merci beaucoup» sur un ton respectueux. Taquine, Janis Siegel nous invite même à claquer des doigts en français : «Do it in french!»
Pour ma part, j’ai eu la chance de voir ce groupe à six reprises dont une fois au Domaine Forget et quatre fois au FIJM. Parmi les souvenirs qui lient The Manhattan Transfer à Montréal, il y a évidemment leur participation au mythique spectacle Magie Rose de Diane Dufresne, au Stade olympique, en 1984. Imaginez, la Québécoise avait terminé la soirée en chantant avec eux et en français, la pièce Je voulais te dire que je t’attends.
Dufresne n’a jamais fait de grands discours sur l’affirmation du fait français mais elle a posé, ce soir là entre autres, un geste éloquent ! Il faut voir les quatre américains s’avancer doucement vers la reine Dufresne et chanter avec l’énergie du désespoir ce texte crève-coeur de Michel Jonasz. Allez voir cette scène grandiose (Je voulais te dire que je t’attends)
Tequila
Parmi les nouvelles chansons de Manhattan Transfer : l’élégante bossa Sometimes I do et une reprise «doo-wopisée» de The man who sailed around his soul, du groupe XTC. Pour le reste, même si on a déjà entendu presque toutes les pièces au programme, on ne se lasse pas des jouissives Trickle Trickle et de leur reprise d’un des premiers succès d’Ella Fitzgerald A-Tisket-A-Tasket.
Des regrets ? Oui, car nous n’avons pas eu droit à Twilight Zone ni à l’emblématique Boy from New York City, d’abord enregistrée dans les années 1960 par le groupe de soul américain The Ad Libs et que toute une génération a redécouverte grâce à The Manhattan Transfer. Cela dit, le groupe termine avec une irrésistible Tequila qui figure également sur The Junction, le plus récent opus de ce quatuor en or ! Décidément, la classe et la rigueur ne se démodent pas !
The Manhattan Transfer / Théâtre Maisonneuve / 7 juillet / Dans le cadre du FIJM






























































