Un autre récital avait eu lieu à la Salle Bourgie, vendredi soir 18 octobre, dans le cadre de trois journées de célébrations italiennes du Consulat de ce pays à Montréal. Le Consulat italien avait choisi de nous faire écouter le pianiste-professeur de piano et souvent membre des jurys de concours internationaux M. Benedetto Lupo.
En première partie de programme, 15 fort intéressants préludes écrits par l’archi-célèbre Nino Rota (1911-1979), le mentor du pianiste Lupo à ses débuts. Ce sont de beaux miniatures de textures variées, en vrac donc une belle initiation en ce qui se créa solidement en un cycle formel. Le compositeur de plus de 150 musiques de films fort courus, jadis, n’est plus à décrire comme talent. Un ajout de deux valses sur le nom de Bach ouvragés par le même compositeur fut aussi offert.
Alfredo Casella en production tardive
Un autre intéressant compositeur italien qui fut en constante évolution et sous influence française, nous dit-on, que nous n’entendons que fort peu, de ce côté-ci de l’Atlantique et du nom d’Alfredo Casella (1883-1947) figurait à la première partie du programme. L’œuvre offerte fut Deux ricercari sur le nom de Bach: elle étalait un des fruits les plus avancés de sa production musicale sur le plan justement de la « recherche » sonore.
Les 24 Préludes d’Alexandre Scriabine
La seconde partie (incluant le rappel final par le Prélude opus 16 no.5) fut consacré à la musique d’un très grand génie, surestimé à son époque, et qui fit partie de mes obsessions passionnées de ma très jeune vingtaine: il s’agissait de ces miniatures d’Alexandre Scriabine (1872-1915) baptisés Préludes sous son onzième numéro d’opus.
Écoutés, joués, entendus, réanimés des centaines de fois par les plus grands maîtres du piano distinguons-en les maîtres absolus: l’élève de Svjatoslav Richter du nom d’Andrei Gavrilov, aussi Richter lui-même, ensuite sous les doigts du grand Vladimir Horowitz et sous l’esprit d’authenticité de l’époux de la fille (Marina) du compositeur, en cette légende du nom de Vladimir Sofronitsky. Je pourrais ajouter le reconnu Cyprien Katsaris et l’interprétation de l’intégrale de ces Préludes et Études par l’éloquent Piers Lane (4 disques sur Hypérion) sans oublier la fulgurance d’Ivo Pogorelich ici même en récital, à Montréal, au tout début des années 1980 avec plusieurs de ces préludes opus 11 à son récital et en rappel.
Urgence de jeunes pianistes italiens?
Le Consulat pourrait continuer de favoriser, dorénavant, lors de ses célébrations futures, la carrière des nombreux jeunes talents prometteurs, issus des concours de piano récents où parfois siégea en censeur M. Lupo. Par jouvence ou souci de réjuvénation, on pourrait appuyer la jeunesse italienne pour distinguer des prodiges du niveau de Leonardo Pierdomenico, Luca Buratto, Vincenzo Maltempo, Elisa Tomellini, même la finaliste Armellini du dernier concours Chopin. Enfin, je m’arrête là sur ce plaidoyer pour la jeunesse italienne, car on n’a qu’à consulter la très longue liste des phénoménaux jeunes pianistes italiens qui enregistrent avec des sensibilités polliniennes (l’inoubliable Maurizio) pour la fabuleuse étiquette Piano Classics.
Les jeunes pianistes italiens sont le reflet de tout ce vrai et authentique talent d’interprétation de la terre Italia (et je me suis gardé de nommer l’évidence de Béatrice Rana). L’Italie témoigne dans tous les domaines des arts et notamment de la musique contemporaine (comme au tennis d’ailleurs!) de son réservoir inspirant de talents, tel récemment ici ce Gabriele Strata prodigieux du dernier concours de Montréal, un talent réel fertilisant ce pays si émouvant et foisonnant de richesse inépuisable.
Benedetto Lupo, piano
PROGRAMME
SCRIABINE
Vingt-quatre préludes, op. 11
CASELLA
Deux ricercari sur le nom de B.A.C.H.
ROTA
Quinze préludes
Deux valses sur le nom de B.A.C.H.