Dans la nouvelle pièce de Dany Boudreault, Corps célestes est le titre d’un film porno réalisé par le personnage de Lili, incarnée par Julie Le Breton. Cette actrice et réalisatrice de films pornographiques retourne dans sa famille, après une quinzaine d’années d’absence. Les retrouvailles seront explosives. Le spectacle commence alors qu’on entend Lili décrire une séquence torride, où les mots remplacent les images. «Corps célestes» : mots pornos.
Lili, dont le vrai prénom est Hélène, retrouve donc sa mère (Louise Laprade), qui passera la majeure partie du spectacle sans parler et assise dans un fauteuil roulant. Puis il y a la soeur de la visiteuse (Évelyne Rompré) et le conjoint de cette dernière (Brett Donahue) avec qui Lili a déjà eu des rapports sexuels. Enfin, le fils du couple, un jeune garçon incarné par Gabriel Favreau, assoiffé de savoir, apportera sa part de questions et remarques embarrassantes. Ce huis clos familial se déroule dans une maison située au fond des bois, où l’on entend gronder des avions.
D’entrée de jeu, la table est mise pour de fortes tensions, voire des règlements de compte. Le Breton crédible dans son personnage «urbain», apparemment libre, croisera le fer avec sa soeur aigrie et en colère, jouée avec intensité par Rompré. Quant au personnage de Donahue, le seul homme dans cette galère, c’est celui que l’auteur a le moins approfondi. Difficile de s’y attacher. En plus, il doit jouer une longue réplique en anglais, le dos partiellement tourné au public, ce qui ne facilite pas la compréhension. Même sa partenaire de jeu lui dira: où sont passés ces beaux efforts pour me parler en français ?
Quant au jeune garçon qui semble vouloir vivre en femme, il est imprévisible et provocant. Il sera souvent le déclencheur des détonations qui secoueront toute la maisonnée. Il dira, entre autres, à sa tante Hélène qu’elle est sur le déclin. Cette dernière réagira en le giflant et elle sera giflée à son tour par sa soeur (Flo), indignée qu’on s’en prenne à son fils. Enfin, l’aînée de cette famille (Louise Laprade) sortira de son mutisme, à travers une étonnante scène que nous ne dévoilerons pas ici.
En résumé, cette pièce est habilement mise en scène par Édith Patenaude qui a simplement recours à un efficace jeu de rideaux pour délimiter différents lieux. Ces retrouvailles familiales ne sont pas banales, mais que disent-elles au juste ? Ces scènes pornographiques décrites en détail tout au long du spectacle apportent quoi ? Et surtout, fallait-il laisser Corps célestes s’étendre ainsi durant deux heures sans entracte ?
Corps célestes
Texte : Dany Boudreault
Mise en scène : Édith Patenaude
Interprétation : Brett Donahue, Gabriel Favreau, Louise Laprade, Julie Le Breton, Evelyne Rompré
Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, du 21 janvier au 15 février 2020
Crédit photo : Valérie Remise
Évelyne Rompré et Julie Le Breton