Avec une telle affiche, Benoît McGinnis et Guillaume Cyr en tête de distribution, et Vincent-Guillaume Otis à la mise en scène, la pièce Des souris et des hommes partait avec une bonne longueur d’avance. Mais s’attaquer à un classique du genre n’est pas non plus une mince affaire. Quelles ont donc été les réussites de cette soirée ?
Des souris et des hommes, c’est avant tout une profonde histoire d’amitiés entre deux gaillards que tout oppose. À ma droite, George, beau gosse, malin, débrouillard ; à ma gauche, Lennie, géant attachant et attardé mentalement, dont la force surhumaine sera au cœur du drame. Deux amis, deux frères, portés par l’instinct de survie de George, qui se fait un devoir de sortir Lennie des situations épiques, dans lesquelles il a une fâcheuse tendance à se retrouver. Nouvellement employés dans une ferme, ils doivent rivaliser d’astuces pour être respectés par le fils du boss Curley (Maxim Gaudette, qu’il fait bon de voir en méchant), les autres ouvriers et ne pas se laisser entraîner par les rêves de liberté de la si belle femme de Curley. Jusqu’au jour où Lennie commettra la seule erreur que George ne pourra pas réparer.
La première main d’applaudissements se fait en l’honneur de Jean-Philippe Lehoux, qui a réalisé une traduction juste et une adaptation québécoise réaliste du texte de John Steinbeck. Un parlé franc, en adéquation avec chacun des personnages, les rendant proches, accessibles. Un gros travail donc, et une réussite.
Continuons avec la distribution : un sans-faute. Du casting au jeu, on s’attache, on les comprend, on les déteste – j’ai même entendu plusieurs comparses émettre des Aawww devant l’attachement naïf du colosse pour ses lapins. L’exercice le plus périlleux revenait à Guillaume Cyr, qui devait se montrer respectueux, mais réaliste dans le rôle de Lennie. Le comédien disait récemment être né pour un rôle comme celui-là : ce n’est pas de la prétention, c’est la vérité et c’est, là encore, une réussite.
La mise en scène : fine, classique au demeurant, amis avec des touches plus originales, comme le dialogue d’entrée entre George et Lennie. Vincent-Guillaume Otis a puisé dans l’énergie naturelle de chacun des comédiens et il en ressort un jeu naturel et désarmant, qui a su installer ce qu’il faut de malaises lors des scènes plus tragiques. Une première mise en scène de cette envergure pour Vincent-Guillaume et une réussite.
La scène : brute – après tout, l’action se passe dans une ferme – mais aussi épurée, aérée. Pas d’artifices, mais des bruitages et des projections discrets. Un plein espace qui permet de bien visualiser chaque personnage et de se rendre compte de leurs attitudes, dans un même souffle. Vous l’aurez compris : une réussite.
Une formidable adaptation, donc, au final crève-cœur, mais portée avec sensibilité et intelligence : une combinaison gagnante comme celle de souris et d’hommes…
Des souris et des hommes est présenté jusqu’au 1er décembre, au théâtre Jean-Duceppe de la Place des arts. Des supplémentaires sont d’ores et déjà programmées pour les 24 et 25 novembre.
Texte John Steinbeck
Mise en scène Vincent-Guillaume Otis
Traduction Jean-Philippe Lehoux
Interprétation Benoit McGinnis, Guillaume Cyr, Nicolas Centeno, Maxim Gaudette, Mathieu Gosselin, Marie-Pier Labrecque, Martin-David Peters, Luc Proulx, Gabriel Sabourin