Trois autocuiseurs de marque «Cuckoo», massivement utilisés en Corée du Sud, sont les partenaires de scène de Jaha Koo, Sud-Coréen d’origine qui vit maintenant en Europe. Deux de ces appareils sont dotés de voix synthétiques. Ils s’invectivent et donnent leur opinion, ce qui fait rigoler les spectateurs et évite de tomber dans le pathos, alors que l’histoire racontée est d’une grande tristesse.
Le trentenaire, qui a quitté son pays à l’âge de 28 ans pour poursuivre ses études en théâtre à Amsterdam, souligne que le «Cuckoo» s’est imposé après la crise économique qui a humilié son peuple à la fin des années 90. D’entrée de jeu, une série de très ou trop courts extraits vidéos montrent, des manifestations réprimées dans la violence, à cette époque, à Séoul. Avec retenue et une dose de mélancolie, l’artiste explique comment des décisions économiques prises en haut lieu, plus précisément au Fonds monétaire international, ont, selon lui, empoisonné le quotidien de ses concitoyens désormais obsédés par la performance et la réussite financière. Cette pression constante coïnciderait d’ailleurs avec une augmentation spectaculaire du taux de suicide en Corée du Sud, depuis le début des années 2000.
Jaha Koo ramène la grande histoire à l’échelle de sa vie, lui dont plusieurs amis se sont suicidé. Il est, notamment, hanté par la mort de Jerry qui s’est jeté d’un balcon, après des années à travailler comme un forcené. Ses témoignages concis et touchants imposent respect et compassion, en plus de nous porter à nous interroger sur nos propres diktats économiques. Cependant, ce spectacle d’une heure semble s’essouffler durant les dix dernières minutes, alors que Koo extrait du riz d’un autocuiseur pour en faire des galettes, pendant qu’on nous repasse des phrases prononcées durant le spectacle. Après nous avoir ému et nous avoir fait rire avec ses autocuiseurs, on s’attendait à une finale à la hauteur de ce départ à toute vapeur.
Cuckoo
Conception, mise en scène, texte, musique et vidéo : Jaha Koo
Interprétation : Jaha Koo, Hana, Duri et Seri
Programmation des Cuckoos : Idella Craddock
(En Coréen avec surtitres français et anglais)
À la Cinquième Salle, jusqu’au 2 juin