C’était soir de fête hier à La Ronde pour la finale du grand concours pyrotechnique de l’International des Feux Loto-Québec. Après les discours de Martyne Gagnon (Directrice de l’International) et de Janine Durette (Présidente de La Ronde), le public a très apprécié la prestation musicale de Gregory Charles et de son orchestre. La foule a chanté et dansé sur des airs connus interprétés de façon spontanée par ce roi de la musique. Puis, ce fut la remise des prix tant convoités avec le Jupiter d’Or au Portugal (Grupo Luso Pirotecnia), l’Argent à l’Australie (Howard & Sons) et le Bronze aux États-Unis (Atlas PyroVision). D’autres prix ont été accordés aux États-Unis pour sa trame sonore sur le thème «Esprit de la jungle» et à l’Australie pour son respect de l’environnement. Un dernier feu d’artifice a suivi sur le thème de «25 ans à vous divertir en grand» (voir photo en haut) pour fêter les 25 ans du Casino de Montréal. Ce dernier spectacle de la saison a ébloui la foule grâce à un choix musical populaire et de belles pièces pyrotechniques. La fête s’est continué pour les gagnants et j’ai eu la chance de parler à chacun des lauréats. Voici les commentaires que j’ai recueillis.
Jupiter d’Or: Portugal (Grupo Luso Pirotecnia)
C’est sur des thèmes d’émissions de télévision que le groupe Luso a fait preuve d’originalité et présenté le feu gagnant, tout en détails et finesse sous le thème de «Restez à l’écoute». Représentante pour le groupe, Mélanie Cagnon, explique que l’équipe en a eu l’idée parce que le directeur artistique Vitor Machado utilise des sonneries d’appel (ringtones) des émisssions de télévision des années 80 sur son téléphone portable. Personne n’avait jamais fait ça, mais ils ont vite compris l’opportunité d’aller au-delà des années 80 comme le thème de Conan O’Brian, les émissions de nouvelles, les sciences-fictions, et de les regrouper en blocs. À chaque nouveau spectacle, le groupe pousse l’innovation plus loin en créant des nouvelles structures dont ils sont plutôt fiers. Par exemple, à leur dernier passage à La Ronde en 2012, ils avaient créé l’effet de pendules. Cette fois-ci, c’est une grande structure ronde flottante de 18m de diamètre qui pouvait tirer des fontaines de feux à 360 degrés. Mélanie rajoute «on est aussi plutôt fier de notre nouveau système de fixations qui permet d’avoir des angles de tirs très précis pour un spectacle visuellement symétrique, et ça paraît quand on regarde les photos prises du feu, les croisés et les angles sont parfaits». Une autre nouveauté, un DJ est venu compléter la trame musicale dans les dernières minutes, tout en synchronisation. DJ Hools (Julien Collet) n’est pas peu fier de sa prestation, il me confie «juste avant d’entrer, j’ai vu l’amplitude, cette énergie je l’ai remise dans mon show fois 10, et comme on ne peut pas répéter avant, c’est once-in-a-lifetime». Il ajoute que c’est une finale que La Ronde n’a jamais eue, donc Luso a littéralement réinventé la roue avec un DJ en direct. Techniquement, ils ont utilisé plus de 5000 signaux de lancements avec près de 90% des produits qui sont fabriqués par le groupe Luso.
Jupiter d’Argent: Australie (Howard & Sons)
Le thème «Les feux sous toutes leurs formes» a permis aux Australiens de décrocher l’Argent avec un feu très varié. Sylvain Lubert, qui représente Howard & Sons, explique «le thème a été choisi pour représenter les types de formes en terme d’artifice et surtout ne pas rester dans du traditionnel et montrer les possibilités qu’on peut faire». Le concepteur Stuart Bensley a imaginé des effets et il a ensuite choisi des musiques pour les représenter (souvent c’est l’ordre inverse). En faisant un éventail de styles différents de musique aussi grand que pour les effets visuels, il a pu piger autant dans des musiques modernes populaires que classiques. Sylvain ajoute «on est fier d’avoir été décalé et fait différent des autres en créant des mouvements variés, comme dans le grand 360 degrés sur le lac et le mouvement de spirale» (des rampes de tir avaient été placés pour former un grand cercle sur le lac). Ils ont aussi gagné le prix pour l’environnement probablement parce qu’ils ont utilisé beaucoup de bombes mono-coups où le support reste sur place et qu’il y a ainsi moins de retombées. Sylvain avoue qu’ils sont différents «parce que nous sommes une équipe pluri-ethnique avec des émotions, techniques et cultures différentes, et surtout que notre concepteur Stuart est exceptionnel». Ils ont utilisé des pièces de Chine et d’Italie, avec plus de 6000 signaux de lancement et 6700 effets, dont plusieurs sont des mono-coups pour faire du mouvement.
Jupiter de Bronze: États-Unis (Atlas PyroVision)
C’est sur des chansons connues dans le thème «Esprit de la jungle» que le feu des États-Unis a remporté le Bronze. Stephen Pelkey et Barbara Pelkey, propriétaires et concepteurs de Atlas PyroVision, m’expliquent qu’ils ont voulu profiter des différents films comme «The Lion King» et «Jungle Book» qui ont été repris récemment pour le plaisir des jeunes et moins jeunes. Stephen avoue que «par un pur hasard, la nouvelle version du Lion King est sorti en même temps que notre spectacle, tout un bonus pour nous! On passe pour des visionnaires mais c’est un hasard». Il ajoute «on voulait quelque chose d’unique, alors on s’est tourné vers des versions qui étaient moins connues du public comme des versions orchestrales, et on a construit une histoire autour de ces chansons», ce qui leur a d’ailleurs mérité de gagner le prix de la meilleure trame sonore de la compétition. Stephen et Barbara sont fiers de leur équipe car ils expliquent qu’un spectacle de cette envergure implique beaucoup de personnes, avec une trame sonore qui a pris de 6 à 8 semaines, puis une autre équipe pour le design conceptuel. De 50 à 60 personnes doivent ensuite préparer chaque tableau. Ils terminent par l’installation à La Ronde «avec 7000 ou 8000 éléments à installer et brancher, cela fait beaucoup à contrôler pour ne pas avoir d’erreur, malgré qu’il y en a toujours avec autant d’éléments» avoue-t-il. Atlas PyroVision est une véritable entreprise familiale où le couple Pelkey travaille aux côtés de quatre de leurs six filles et deux de leurs gendres. Stephen rajoute que «pour une entreprise comme nous, l’invitation à participer à ce concours est un véritable honneur». Les pièces de leur spectacle provenaient de Chine, d’Italie et d’Espagne, dont plusieurs ont été faits sur mesure pour accompagner la particularité de la musique choisie. Plus de 8000 signaux de lancement avec 4000 mono-coups ont été utilisés.
Entrevue avec Lynda Normand, responsable du jury
Les gagnants sont toujours choisis par un jury de 19 personnes sélectionnées chaque année parmi le public pour noter les spectacles. Mais derrière ce jury se cache l’âme d’une équipe et la responsable du jury depuis 2008, Lynda Normand, une passionnée des feux depuis qu’elle en a vu un à partir des estrades de La Ronde. Comptable de métier, elle me confie que cette aventure l’a fait grandir énormément en lui permettant d’exercer du leadership tout en nourrissant de belles relations avec les membres du jury qui changent année après année. Je lui ai demandé ce qui la passionne autant pour ces spectacles, elle avoue que «c’est l’émotion surtout, quand le feu me parle et que je comprenne ce que le concepteur veut transmettre par son thème, j’aime aussi qu’on me raconte une histoire avec le feu». Sur la musique, elle ajoute «j’aime beaucoup la musique, elle doit me parler, un vrai juge ne devrait pas être influencé comme ça, pour ça que je ne suis pas juge (rire)». Elle résume par «un feu gagnant me fera verser des larmes!».
Qu’est-ce que Lynda Normand recherche quand elle sélectionne un membre du jury? Mis à part les conditions de représenter toutes les couches de la société et tous les âges de façon équitable, elle s’assure qu’ils en ont déjà vus et seront présents. Elle confie «je cherche des passionnés qui peuvent en parler mais sans être des spécialistes, et surtout je ne veux pas entendre que tous les feux sont pareils!». Il est rare qu’elle soit en désaccord avec le choix du jury, elle sent qu’elle représente bien la moyenne du jury. Elle parle avec fierté de 2015 quand le jury a choisi gagnant l’Angleterre, premier feu de la saison, alors que souvent on a tendance à oublier les premiers spectacles. Elle ajoute «pour moi c’était mission accomplie». Pour terminer, je lui demande quelques anecdotes, mais elle concède que chaque année est différente. N’empêche qu’il y a eu une année où chaque soir de feux avait une tuile qui lui tombait dessus et qu’elle anticipait la prochaine. Mais sa plus belle anecdote est arrivée la semaine dernière, jour de son anniversaire de naissance, alors que les 5000 personnes dans les estrades lui ont chanté «Bonne fête», quelle émotion!
Gagnants de la 35e édition de l’International des Feux Loto-Québec
Jupiter d’Or: Portugal (Grupo Luso Pirotecnia)
Jupiter d’Argent: Australie (Howard & Sons)
Jupiter de Bronze: États-Unis (Atlas PyroVision)
Meilleure trame sonore: États-Unis (Atlas PyroVision)
Prix sur le respect de l’environnement et développement de technologies vertes: Australie (Howard & Sons)
https://www.laronde.com/fr/larondefr/linternational-des-feux/accueil
Photos des feux: Carl Desjardins, photographe officiel de l’IFLQ
Photo de Lynda Normand et son équipe: Benoît Z. Leroux
Dernière photo: Daniel Ouimet