L’adaptation théâtrale de La Métamorphose, célèbre texte de Kafka, était sans doute l’un des spectacles les plus attendus de la rentrée culturelle montréalaise. On avait hâte de voir comment l’auteur et metteur en scène Claude Poissant transposerait sur scène les mésaventures de Gregor, un jeune homme qui se réveille un matin transformé en un monstrueux insecte, à l’effroi de sa famille ! Quelle forme allait prendre cette «bibitte» incarnée par Alex Bergeron ? Voyons où nous mène ce projet audacieux.
Miser sur l’imagination du spectateur
Ne vous attendez pas à des costumes spectaculaires ou des effets spéciaux pour illustrer la transformation de Gregor en insecte répugnant. Le metteur en scène mise sur l’imagination du spectateur pour que chacun invente dans sa tête la forme de ce cancrelat qui inspire le dégoût à son entourage. Après tout La Métamorphose est essentiellement un récit métaphorique sur les changements qui affectent les gens souvent à leur insu.
Mais, il y a sans doute aussi des risques à ne rien montrer des images fortes que porte un texte. Bien loin de tomber dans l’épouvante, le spectacle ne suggère même pas l’affreuse transformation qui est pourtant au coeur du propos. Gregor est bien mis et bien coiffé comme on peut le voir sur la photo. On parle de la métamorphose sans jamais la voir ! Mais, ne va-t-on pas au théâtre aussi pour être surpris voire choqué par ce qu’on nous montre ?
Kafka transposé au Québec dans les années 60
Dans le but de nous rapprocher de cette histoire du célèbre auteur pragois, publiée il y a plus de cent ans, Poissant l’a transposée au Québec. Gregor et sa famille vivent donc dans la région de Montréal, dans les années 60. Bien sûr, La Belle Province de cette époque a vécu des métamorphoses après la mort de Duplessis, mais on ne sent pas cette effervescence dans cette pièce au rythme lent.
Nos Montréalais kafkaïens ne parlent pas le joual mais plutôt un français standard. C’est d’ailleurs plutôt étonnant d’entendre le père de Gregor, un Québécois de classe moyenne, demander à son locataire s’il aime Brahms !
Distribution et décor
Le talentueux Alex Bergeron arrive à tirer son épingle du jeu dans cette adaptation discutable de La Métamorphose. Belle performance également de Myriam Gaboury en Greta (soeur de Gregor).
Soulignons enfin la trouvaille de Pierre-Étienne Locas qui signe la scénographie : la chambre de l’homme-insecte demeure un espace mystérieux qu’on épie grâce à des jeux d’éclairages durant toute la pièce d’une durée de 90 minutes.
La Métamorphose
À la Salle Denise-Pelletier jusqu’au 16 octobre 2021
D’après l’œuvre de : Franz Kafka
Texte et mise en scène : Claude Poissant
Avec : Geneviève Alarie, Alex Bergeron, Myriam Gaboury, Alexander Peganov et Sylvain Scott
Scénographie : Pierre-Étienne Locas
Éclairages : Renaud Pettigrew