Ces deux là … Lemire, Verville: comme ils nous ressemblent. Dans leur texture, leur accent bien entendu, leurs propos. Ils sont, pour une salle pleine à craquer de baby-boomers chez Duceppe, un point d’ancrage, une opération de reconnaissance, une espèce de sécurité, un bon bain chaud, une soupe réconfortante. Tout pour nous rassurer.
Pendant près de deux heures avec entracte, Daniel Lemire et Pierre Verville nous entraînent ainsi dans un huis clos désopilant à l’abri de ce monde dont le climat en furie et le quotidien sous haute technologie nous échappe.
Au programme de ce spectacle qui tourne depuis deux ans et demi et qui prend fin sous peu, il y a plus que les sujets politiques, sociétaux et artistiques abordés, il y a deux personnages qui marquent l’humour depuis la fin du dernier siècle.
Daniel Lemire, la soixantaine, est cet inlassable créateur de punchs et de personnages saugrenus, à mi-chemin entre une certaine jeunesse et ce brin de vieillesse qui poind. Pierre Verville, quant à lui, la cinquantaine, le stamina, quelques acrobaties au passage, est un auteur inoxydable dont les imitations sont inimitables. En duo, ils nous rivent à leurs sujets.
Pour Verville que ce soit Pierre Bruneau et son ton nasillard, Justin Trudeau, «very 2020», toujours hésitant dans son rôle de chef d’un pays, André Sauvé, branché sur le 220 volts, Brian Mulroney, crooner infatigable, Luc Plamondon, brouillon et perdu dans son univers, mais aussi Claude Dubois, Richard Desjardins, Paul Piché, tous ceux-là et d’autres qu’il a sans doute choisis sur le volet, font rire parce qu’on est plongés au coeur même de leurs personnalités singulières.
Pour Lemire, ce sont les personnages inventés et candides. Ainsi l’arrivée de Yvon Travaillé, de l’oncle George et de Ronnie causera un vif émoi dans la salle. Mais ce sont aussi les sketches loufoques dans lesquels ses personnages se mettent les pieds dans les plats pour cause de leur inconscience que ce soit le pilote ivre, le douanier candide, le motard intimidant, le policier bon enfant, on aime y croire.
À la cadence fluide de ce spectacle humoristique bien rôdé, mis en scène par Denis Bouchard, s’ajoute une panoplie de costumes songés, de mimiques et de musiques évocatrices dans un décor simplifié pour laisser toute la place au jeu.
En finale, on assiste à une saynète hilarante avec Eddy Savoie et ses résidences Soleil. Puis avant que le rideau tombe, Pierre Verville se transformera en Charles Aznavour qui chante la classique Emmenez-moi sous les applaudissements nourris.
Avec ces deux-là, on aimerait que ça continue…