Une nouvelle vie commence pour L’orangeraie du Québécois Larry Tremblay : ce roman adapté au théâtre en 2016 devient maintenant un opéra, dont la musique est du compositeur franco-libanais Zad Moultaka. Le spectacle, présenté à Montréal et Québec, est mis en scène par Pauline Vaillancourt, co-fondatrice de Chants libres, une compagnie de production et de diffusion de nouvelles œuvres opératiques. À quelques jours de la première, le Nouvel Ensemble Moderne, dirigé par Lorraine Vaillancourt, travaille sous la supervision du compositeur. L’expérience de vie de ce dernier, à la fois orientale et occidentale, est un précieux atout pour mettre en musique la troublante histoire de L’orangeraie, selon Pauline Vaillancourt.
Zad Moultaka, né en 1967, «a vécu la guerre au Liban durant son enfance. Il comprend bien le texte de Larry qui nous amène à suivre le parcours tragique des jumeaux Amed et Aziz, deux enfants pris malgré eux dans l’engrenage de la guerre.» Alors que leurs grand-parents sont tués par un obus tombé sur l’orangeraie familiale, on crie vengeance ! C’est à ce moment que Zahed doit choisir lequel de ses jumeaux il sacrifiera; lequel deviendra un enfant kamikaze pour aller détruire les campements de l’ennemi.
Dix ans plus tard, l’un des deux fils, exilé en Amérique, participe à un tournage qui lui rappelle sa douloureuse histoire. Arrivera-t-il à faire la paix avec son passé tragique ?
Orient et occident
-PV : Pour traduire toutes ces ambiances, il nous fallait un compositeur qui connaît le Proche-Orient et aussi la vie occidentale, puisque c’est en Amérique que se conclut l’histoire de L’orangeraie.
-MYC : Comment définissez-vous le style musical de L’orangeraie ?
-PV : C’est très contrasté ! On traverse des moments de violence, mais il y a aussi de la tendresse. Tout cela s’entend dans la musique de Moultaka.
-MYC : Lors de la webdiffusion d’extraits de l’oeuvre, certains y ont perçu une parenté artistique avec l’univers de l’opéra L’amour de loin de Kaïja Saariaho. Qu’en pensez-vous ?
-PV : Je ne m’aventurerai pas sur le terrain des comparaisons, mais je peux dire que la musique de L’orangeraie est très collée au texte et qu’elle raconte, en elle-même, cette histoire de guerre et de paix. En plus, comme on a le compositeur avec nous, on en profite pour rajuster la partition au besoin, pour que tout soit fluide. L’écriture vocale est splendide ! Ajoutons que le compositeur retourne fréquemment en studio pour retravailler les enregistrements de choeurs qui seront diffusés durant le spectacle.
25 chanteurs et musiciens
Larry Tremblay, le dramaturge qui a signé, entre autres, The Dragonfly of Chicoutimi, Le Ventriloque et Abraham Lincoln va au théâtre, s’attaque cette fois-ci au travail de librettiste. La concision est un art en soi, souligne Pauline Vaillancourt, en précisant que le livret de L’orangeraie permet de raconter en 90 minutes, cette histoire dense et malheureusement toujours d’actualité. «Et, malgré la cruauté évoquée, l’écriture de Larry demeure poétique !»
En plus de seize musiciens du NEM, dirigés par Lorraine Vaillancourt, neuf chanteurs seront sur scène dont le contre-ténor Nicholas Burns (Amed), le ténor Arthur Tanguay-Labrosse (Aziz) et le ténor Jacques Arsenault (Zahed, père des jumeaux).
Sébastien Ricard remplacé
À noter que Sébastien Ricard qui devait jouer le rôle du comédien Mikaël est remplacé par Jean Maheux. «Sébastien qui est très en demande et qui a énormément travaillé ces derniers temps, a des problèmes de santé. Il a dû se retirer de notre projet.»
Plaidoyer pour la paix
Enfin, pour l’épauler dans son travail de mise en scène «très collée au texte», Pauline Vaillancourt fait à nouveau appel à l’artiste visuelle Dominique Blain avec qui elle a collaboré, lors de la présentation, en 2016, de l’opéra The Trials of Patricia Isasa (Kristin Norderval, Naomi Wallace). Leur défi est de transposer visuellement, les contrastes de guerre et de paix exprimés dans le texte et la musique de L’orangeraie. «Bien sûr, nous devons évoquer la violence qui est au coeur de l’histoire, mais à d’autres moments, on baigne dans la tendresse car n’oublions pas que L’orangeraie est un plaidoyer pour la paix.»
L’orangeraie
Zad Moultaka : musique / Larry Tremblay : livret
Pauline Vaillancourt : mise en scène / Dominique Blain : scénographie et vidéo
Interprètes
Nicholas Burns (contre-ténor) / Dion Mazerolle (baryton) / Jacques Arsenault (ténor) / Nathalie Paulin (soprano) / Arthur Tanguay-Labrosse (ténor) / Stéphanie Pothier (mezzo-soprano) / Alasdair Campbell (baryton) / Simon Chaussé (baryton) et Jean Maheux (dans le rôle du comédien Mikaël)
Nouvel Ensemble Moderne / Lorraine Vaillancourt, cheffe
À Montréal, au Monument-National : les 19, 20 et 21 octobre 2021, ainsi qu’en reprise les 5 et 6 novembre 2021 À Québec, au Diamant : les 5 et 6 novembre 2021