Après 55 ans de carrière, Patrick Norman vit en quelque sorte une consécration, cette semaine, alors qu’il est en spectacle pour trois soirs, à la Maison symphonique (jusqu’au 23 mai). Accompagné par l’Orchestre symphonique de Montréal, le septuagénaire interprète plusieurs de ses succès dont La guitare de Jérémie, habilement transformée par les arrangements imaginatifs d’Hugo Bégin. Toujours passionné, le chanteur de Quand on est en amour partage la scène avec sa compagne de longue date, Nathalie Lord; il qualifie leur relation de «lune de miel éternelle». Avec la complicité de maestro Jean-Marie Zeitouni, l’artiste se permet aussi de sortir de son répertoire habituel, en reprenant quelques titres d’envergure qui habitent ses rêves depuis des décennies.
Avec sa voix juste et posée ainsi que sa diction impeccable, l’homme de 77 ans respire la joie de vivre et de chanter! C’est tout un contraste par rapport au souvenir que vient de nous laisser le chanteur français Renaud, 72 ans, qui marmonnait et peinait à se déplacer sur scène, il y a quelques jours, à la Place des Arts.
Fidèle à ses habitudes, Patrick Norman chante l’amour, l’espoir et l’amitié. D’entrée de jeu, il offre Tu peux frapper à ma porte, suivie de L’hirondelle, propulsée par une dynamique sections de cuivres qui lui donnent un petit côté exotique pour ne pas dire mexicain.
Son amoureuse le rejoint ensuite sur scène et elle restera à ses côtés durant pratiquement tout le concert. Après La lumière de l’amour, en duo, Patrick sera le choriste de Nathalie pour Le coeur n’oublie jamais, qu’elle a écrite au sujet de la maladie d’Alzheimer et dont la musique est de Paul Daraîche. À la fois présente et discrète, madame Lord veille sur son homme. Tour à tour, soliste, duettiste et choriste, elle l’aide aussi à enfiler sa guitare car, le musicien confie qu’il aura bientôt une chirurgie à l’épaule.
Malgré ses maux, Patrick Norman vit des années de grande reconnaissance du public. Rappelons que l’an dernier, quelques mois après avoir été opéré au coeur, des dizaines de milliers de personnes réunies pour la Saint-Jean, sur les Plaines d’Abraham, lui ont spontanément chanté Quand on est en amour. Un moment qui restera sans doute dans les annales de la chanson québécoise.
Après avoir gravé 33 albums et gagné de nombreux prix à l’ADISQ, en plus d’avoir animé des émissions de télévision, notamment, avec Renée Martel, l’artiste n’a pas cessé de se renouveler. Il a récemment fait sienne La vie est bonne, une magnifique pièce de Nelson Minville qui mériterait de se hisser parmi les grands succès de Patrick Norman.
Au retour de l’entracte, le roi de la soirée ravit son public avec Stardust, un standard composé il y a près d’un siècle et interprété, entre autres, par Nat King Cole. Il reprendra aussi MacArthur Park, enregistrée par l’acteur irlandais Richard Harris, dans les années 1960.
Guitariste rigoureux, ce Montréalais né Yvon Éthier, qui a longtemps fait danser ses fans avec Iko Iko, hymne de la Nouvelle-Orléans, nous rappelle son goût pour l’exotisme en jouant Mister Brazil, l’une de ses compositions instrumentales, transformée par des arrangements opulents, auxquels contribue la plupart des pupitres de l’orchestre.
Puis, c’est avec l’air traditionnel Souvenir d’un vieillard que Patrick Norman bouleverse la salle! Ici, l’orchestre se fait discret. Chaque mot est pesé et livré avec émotion. On lui fait une ovation monstre!
Au rappel, ce sera la chanson-titre de son dernier album, Si on y allait, en duo avec sa douce et, finalement, l’incontournable Quand on est en amour. Ce refrain qui est entré dans nos mémoires, il y a 40 ans cette année, a aussi été un succès au Rwanda, touchant le coeur de victimes de violences en plein génocide, en 1994. Patrick Norman s’est d’ailleurs rendu dans ce pays d’Afrique, l’an dernier et il raconte son voyage hors du commun dans le documentaire, Le devoir de mémoire.
Bref, après une longue et florissante carrière, l’artiste qui a malgré tout été parfois regardé de haut, vit maintenant des années de grâce qui couronnent sa constance, son professionnalisme et son éternel optimisme. Aujourd’hui encore, il chante comme si c’était une évidence : «qu’importe le passé, il y a l’avenir.» Inspirant!
L’OSM salue les 55 ans de carrière de Patrick Norman
À la Maison symphonique, les 21, 22 et 23 mai à 20h.
Crédit photo: Antoine Saito