En près de 60 ans de carrière, la chanteuse Shirley Théroux présentait son tout premier spectacle solo sur une scène montréalaise, ce jeudi (26 mai). «Ce soir, je réalise un rêve ! Un rêve d’enfant !» Toujours passionnée par son métier, la dame nous révèle avec humour des anecdotes inédites et savoureuses de la petite histoire du show-biz québécois: ses débuts dans les concours d’amateurs, ses souvenirs du «nightlife» montréalais de sa jeunesse, l’arrivée de Télé-Métropole (TVA), l’époque des Tannants, etc. Compte-rendu d’une soirée mémorable qui s’est déroulée en présence de plusieurs vedettes dont Joe Bocan, Marie-Claude Barrette, Mario Dumont, Louise Latraverse, Marie Carmen et Marie Denise Pelletier.
Pour l’ouverture de son spectacle, la septuagénaire interprète «quand on a choisi de vivre pour chanter par amour du métier» qu’elle a enregistrée en 1972. Un demi-siècle plus tard, cette profession de foi lui colle toujours à la peau.
Née à Montréal en 1945, la petite Shirley participera très jeune à des concours d’amateurs. Rieuse, elle se souvient : «quand on gagnait, on nous remettait une boîte de chocolats Laura Secord, ou une montre.» Bien avant d’être majeure et sans même en parler à sa mère, elle s’était permis d’aller chanter dans un club de la rue St-Denis où Jean Simon l’avait remarquée.
Puis, tout a démarré lorsqu’elle a remporté la finale des Découvertes de Yoland Guérard à Télé-Métropole, en 1963. Cette émission, «c’était un peu l’ancêtre de Star Académie et La Voix», souligne-t-elle. La gagnante avait alors eu la chance de participer à 13 émissions à cette antenne. Dans les faits, elle aura été reçue à 45 émissions de télé cette année-là ! Vous comprenez maintenant pourquoi vous me connaissez depuis longtemps, résume-t-elle avec une pointe d’autodérision.
Shirley la comique
Elle n’a rien oublié de l’époque des Tannants, aux côtés de Joël Denis et Pierre Marcotte de 1972 à 1977. «C’est la première émission québécoise qui a réussi à attirer 2 millions de téléspectateurs !» Bien sûr, il y avait des sketches. On nous donnait une ligne et on improvisait; «on était là avant la Ligue nationale d’improvisation !»
Il faut l’entendre raconter comment elle et ses comparses se débrouillaient avec les moyens du bord. Joël Denis empruntait plus ou moins clandestinement la perruque de «Nestor», personnage interprété par Claude Blanchard. Pire encore, un midi, une assistante s’est emparée de la moustache que portait Symphorien au grand dam de Gilles Latulippe !
C’est à cette même époque qu’elle a épousé Pierre Marcotte avec qui elle a eu un fils, Bruno-Pierre, qui est justement dans la salle. Hilarante, la maman raconte que quelques heures après son accouchement, elle était allée voir son poupon en se déplaçant au moyen d’une chaise roulante qui a eu une crevaison !
A-t-elle peur de vieillir ? «Pas du tout ! Je ne serai jamais vieille !» Regrette-t-elle les décennies passées à son restaurant La Boucherie ? «Pas du tout ! Je considère que j’ai eu 20 bonnes années sur 28. C’est une bonne moyenne!» Au fond, il y a bien longtemps que Shirley a fait sienne la philosophie de Liza Minnelli : «there’s no business like show business». C’est ce qui l’anime depuis toujours.
Shirley chante
Si la télévision l’a longtemps tenue occupée, au point de négliger la scène, elle n’en garde pas moins d’excellents souvenirs des Tannants. «Je chantais deux chansons par émission, cinq fois par semaine durant trente-neuf semaines et cela a duré cinq ans», précise-t-elle, en soulignant que son répertoire compte des centaines de chansons ! Aujourd’hui encore, elle navigue dans une impressionnante variété de styles : Fly me to the moon, Smile, La fille d’Ipanema, La maison sous les arbres, Vous étiez belle madame, Fais comme l’oiseau, etc.
Accompagnée du pianiste Éric Senécal, elle lance son tube C’est beau un homme avec ondulations des hanches et des épaules. Fougueuse ! Sa voix gronde ! Elle semble si heureuse sur scène !
Après avoir interprété avec émotion une chanson qu’elle a elle-même composée pour son père, elle peine à retenir ses larmes en reprenant une pièce qu’affectionnait particulièrement sa mère, Trois fois merci ! «Cette chanson dit exactement ce que je voulais vous dire ce soir» : Tu m’as donné un amour merveilleux / Tu m’as donné ce qu’il y avait de mieux / Mon coeur et moi nous te disons tous deux / Merci ! Trois fois merci !
On l’applaudit d’aller ainsi encore et toujours au bout de ses rêves. La soirée se termine avec une ovation bien sentie !
Shirley Théroux au Gesù, le 26 mai 2022
«Sous la direction artistique de son amie, l’humoriste Lise Dion»
Crédit photo©Suzette Paradis