Des voix sublimes en prises de rôle de l’héroïne Floria Tosca incarnée par la soprano kosovare Marigona Qerkezi et celui de son amant Mario Vavaradossi interprété par le rigoureusement vif et brillantissime ténor Carlos Cardoso ont enchanté le fervent public danois de Copenhague.
Éros et Thanatos
Les duos d’amour et de mort depuis le tragique modèle de Tristan et Iseut ont connu des réplications fabuleuses au sein de toutes les grandes cultures de l’Occident et la Floria Tosca de Giacomo Puccini trouve en son Mario inflexible tout à fait l’écho passionnel du plus parfait des crimes politiques à Épée de Damoclès.
Astucieux metteur en scène
L’Opéra royal du Danemark qui nous a invités au passage d’une escale à Copenhague en route pour l’enlevant Concours Chopin de Varsovie présente donc une foudroyante nouvelle adaptation du metteur en scène Kasper Holten, réussissant un tour de force scénique.
En concentrant cet opéra de près de quatre heures en moins de deux, il dynamise la triple division des lieux entre le divin idéalisé superposé au terrestre des passions exacerbées recouvrant le sous-terrain des prisons torturantes. Les trois décors surgissent ou s’engouffrent par surélévation et engouffrements. Les choeurs s’y insèrent. Les arias défilent en évitant tous les longs développements à transition, ce qui implique la superposition de scènes simultanément en évanescence, sur ces trois niveaux de décors et de sens philosophiques.
J’ai vécu d’Art et d’Amour
La vibrante soprano kosovare Marigona Qerkezi joue donc en prise de rôle l’héroïne Floria Tosca immortalisée par Maria Callas ou encore Renata Tebaldi, voire même la parfaite Montserrat Caballé et certainement, plus près de nous, Angela Gheorgiu. La Kosovare Qerkezi atteignit devant nous ce juste milieu d’expression passionnée entre l’insurpassable comédienne Callas, la légendaire puissance vocale de la regrettée Leontyne Price et les éclatants ébats des émouvantes renommées européennes citées plus haut.
Un Carlos Cardoso solide
Cet équilibre d’épanchements vocaux se joignit à l’autorité vocale du rutilant ténor Carlos Cardoso. C’était aussi sa prise de rôle, celui de Mario Cavaradossi, ce prisonnier politique, cet obéissant amant sacrifié à toutes les causes du coeur et de la Raison d’État.
Le rôle du méchant Scarpia fut rendu honorablement par le baryton hispanoaméricain Daniel Luis de Vicente appartenant lui aussi à la seconde distribution (alternée avec la première).
Un public distingué de connaisseurs
C’est un auditoire dans la jeune quarantaine mais majoritairement dans la cinquantaine et soixantaine, chic et élégant, un public distingué d’admirable tenue, ne se levant pas pour ovationner en automates mais nourrissant des applaudissements modulés avec nuances auprès de la valeur reconnue à chacun des interprètes.
Restés sereins et généreux de vivats, les spectateurs ne se sont levés unanimement qu’à la venue sur scène du chef énergique Daniele Squeo à la tête de l’Orchestre Royal du Danemark alors que le programme révélait des chefs de choeurs de garçons et de filles complétant le Choeur Royal de l’Opéra. Une soirée en somme condensée et inoubliable.
Photo: Miklos Szabo































































