Denis Bernard brûle les planches au Théâtre Duceppe dans Salle de nouvelles, une adaptation du film américain Network, sorti en 1976. Le comédien se glisse dans la peau d’un présentateur-vedette qui est prêt à tout pour faire monter ses cotes d’écoute. Cette comédie noire nous entraîne principalement sur un plateau de télévision, au bulletin de 18h., où les opinions émises peuvent faire basculer des carrières et même un réseau tout entier. Mais, cette satire est-elle toujours d’actualité? À l’ère des médias sociaux, est-ce encore dans de tels rendez-vous télévisuels que se joue la bataille des opinions?
Denis Bernard est à l’aise comme un poisson dans l’eau dans la riche scénographie de ce spectacle où les caméras nous montrent sous divers angles son personnage de Howard Beale. Cet ex-roi de l’info n’attire plus suffisamment de téléspectateurs et on l’avise qu’il sera congédié dans deux semaines. Sous le choc, l’homme revient en ondes et il déclare qu’il se suicidera en direct avant la fin de son mandat. Son désarroi touche le public et les cotes d’écoute remontent en flèche. Ses patrons revoient alors leurs plans: Howard Beale deviendra l’idole du peuple.
Qu’il soit sincère ou un peu fêlé, Beale nous fait une démonstration éclatante de l’information-spectacle dans toute sa splendeur, truffée de raccourcis. Denis Bernard donne à son personnage des allures de prédicateur enragé, dénonçant les uns et les autres. En exploitant la colère populaire, il a même développé des slogans que le public du Théâtre Duceppe est invité à répéter énergiquement avec lui : «On est écoeuré.e.s pis on a fini de se faire niaiser!» Pour ajouter au cynisme ambiant, on nous indique quand applaudir. Et puisqu’il s’agit bien d’info-divertissement, on a même invité une chanteuse de variété.
La mise en scène de Marie-Josée Bastien est d’un dynamisme sans faille. Il n’y a pas de temps morts dans cette pièce bien rodée. Il faut dire que Salle de nouvelles a été présentée à Québec, au Trident, en 2021.
Comme on pouvait s’y attendre, Denis Bernard porte le spectacle sur ses épaules, tant son personnage est omniprésent. Il est entouré par une distribution efficace. On y remarque, entre autres, Gabrielle Côté qui défend avec beaucoup d’aplomb son rôle de Diana, une jeune femme ne reculant devant rien pour gravir les échelons dans l’équipe de Beale.
Cela dit, si les bulletins de nouvelles ont toujours un certain impact, de nos jours, n’est-ce pas plutôt avec X (Twitter), Facebook et une multitude de canaux liés à l’internet qu’on cherche et réussit souvent à façonner l’opinion public? Dans cette adaptation de Network, il y a bien quelques timides références à notre réalité d’aujourd’hui dont des téléphones cellulaires. Il est aussi question d’Amazon. Mais, au bout du compte, malgré ses qualités, Salle de nouvelles nous donne l’impression d’avoir assisté à la parodie d’une époque presque révolue, alors que la télé peine de plus en plus à s’imposer surtout chez les nouvelles générations.
Salle de nouvelles
Avec: Denis Bernard, Mustapha Aramis, Sylvio Arriola, Charles-Étienne Beaulne, Emmanuel Bédard, Florence Blain Mbaye, Luc Bourgeois, Gabrielle Côté, Hugues Frenette, Eliot Laprise, Marie Michaud, Marie-Eve Pelletier
Au Théâtre Jean-Duceppe, jusqu’au 7 octobre
1h 50 sans entracte
En coproduction avec Le Trident et le Théâtre Niveau Parking
*Photos fournies par le Théâtre Jean-Duceppe