L’esprit du regretté Jean-Marc Vallée planait sur la Salle Wilfrid-Pelletier, en cette soirée d’ouverture de la 44e édition du Festival international de jazz de Montréal. De nombreux artistes dont Patrick Watson, Alexandra Stréliski et Martha Wainwright ont interprété des pièces emblématiques de ce cinéaste qui accordait une grande place à la musique dans ses films. De Patsy Cline à David Bowie, en passant par Aznavour et Charlebois, ce «mixtape», ou collage de chansons, a pris la forme d’un hommage tout en douceur au réalisateur qui s’est éteint prématurément, il y a deux ans et demi.
Le fil conducteur
D’entrée de jeu, c’est la voix de Jean-Marc Vallée qui a résonné dans la salle! On a écouté religieusement l’artiste parler de l’importance de la musique dans sa vie, au son des premiers accords de Cold little heart, chanson de la série télévisée Big little lies. Puis, Beyries a enchaîné avec Don’t, une autre pièce de la trame sonore de cette émission américaine, où Vallée s’est illustré comme réalisateur.
Avec une dizaine de musiciens et choristes sur scène, sous la direction de Jean-Phi Goncalves, Beyries a poursuivi avec Harvest moon de Neil Young. Éblouissante!
Puis, à nouveau, des archives sonores nous ont permis d’entendre Vallée raconter que sa mère a rencontré son père chez le disquaire où il travaillait. Elle a alors acheté le disque What a difference a day makes. En ce soir de «Mixtape», c’est Martha Wainwright qui a repris ce classique, avant de s’attaquer à l’irrévérencieuse Bloody Mother Fu****** As*****, un autre titre marquant de Big Little Lies.
Même s’il n’est pas chanteur, Maxime Le Flaguais nous a donné des frissons en récitant le texte de la chanson Hier encore, pendant qu’on voyait défiler sur des écrans, des images de son défunt père Michel Côté, tirées du film C.R.A.Z.Y. Alors que l’émotion était à son comble, le fils du réalisateur, Alex Vallée est venu interpréter I’m Losing You de John Lennon.
Grâce à sa mise en scène efficace, Marc-André Grondin, a réussi à nous faire passer d’un interprète à l’autre, harmonieusement.
Pour sa part, Alexandra Stréliski qui a collaboré à plusieurs reprises avec le cinéaste nous a raconté l’un de leurs échanges cocasses: «Je lui ai dit: “Je pense que j’aime plus la bouffe que la musique”. Il a ri et m’a répondu: “Je pense que j’aime plus la musique que le cinéma”.»
En plus de jouer ses compositions Plus tôt et Le nouveau départ, la pianiste a accompagné les Petits chanteurs du Mont-Royal, ovationnés pour leur interprétation tout en nuances de Creep de Radio Head. Les PCMR se sont ensuite approchés de Patrick Watson pour chanter avec lui The great escape. De toute beauté!
C’est Elisapie qui a fait revivre Crazy, chanson-titre d’un film culte du disparu. Elle a aussi interprété Navvaatara, que Vallée a utilisée dans Café de Flore, avant de revenir avec sa version en inuktitut de Wish You Were Here de Pink Floyd.
Comme si Jean-Marc Vallée était lui-même le fil conducteur de cette soirée, sa voix sert d’enchaînement à plusieurs numéros, mais ses mots se perdent parfois sous la musique. Quant aux projections sur des écrans de différents formats suspendus au-dessus de la scène, elles sont malheureusement floues; on peine à saisir les images projetées.
Et puis, compte-tenu du grand nombre d’invités, il aurait été bon qu’un représentant du FIJM vienne nous présenter le concept particulier de «Mixtape».
Enfin, cet hommage plutôt sage dans l’ensemble s’est terminée sur une note festive, alors que le public s’est levé pour danser au son de Sympathy for the devil des Rolling Stones.
Bref, en reflétant la diversité des goûts musicaux du disparu, «Mixtape» nous a rappelé de belle façon que Jean-Marc Vallée était sans doute le plus grand mélomane des cinéastes québécois!
Voir la programmation du FIJM qui se poursuit jusqu’au 6 juillet.