Le jazz avait des airs de jeunesse, ce soir, à la Salle Wilfrid-Pelletier. Avec ses chansons d’un autre siècle, dans le style de Ella Fitzgerald, la gracieuse Laufey a fait fureur auprès d’admirateurs qui, bien souvent, n’ont pas encore 20 ans! Comment expliquer la spectaculaire ascension de cette artiste de 25 ans qui a reçu un prix Grammy pour son album Bewitched, lancé l’an dernier? En plus de ses nombreux talents, la musicienne et compositrice islandaise-chinoise a su utiliser TikTok pour faire découvrir aux jeunes un univers musical vieillot dont ils raffolent!
Avant d’entrer en scène, Laufey laisse planer un certain mystère: ses musiciens jouent quelques mesures de Clair de lune de Debussy, alors que l’arrière-scène prend des allures de ciel étoilé. Puis, soudainement, elle s’avance au pas de course pour entonner, avec sa voix souple et soyeuse, While you were slipping, une chanson qui parle d’amour comme la plupart des titres de son répertoire.
Souriante, elle prend ensuite un moment pour remercier le Festival international de Jazz de Montréal qui l’avait invitée, dès 2022, à se produire au Studio TD. Deux ans plus tard, la star affiche complet à Wilfrid-Pelletier, en plus d’avoir triomphé à la Maison symphonique, en ce samedi après-midi pluvieux.
Tout en douceur, ses compositions Valentine, Second Best, Dreamer, etc., ne détonneraient pas aux côtés des standards que font revivre les Diana Krall et Melody Gardot.
Née à Reykjavik d’un père islandais et d’une mère chinoise qui est violoniste classique, Laufey est une multi-instrumentiste. Elle s’accompagne à la guitare, ou au piano, en plus de jouer du violoncelle.
Très à l’aise sur scène, elle sait présenter avec humour ses chansons tristounettes. «Est-ce qu’il y en a parmi vous qui sont en amour ? Est-ce que certains se sentent plutôt… en retard (falling behind)? J’ai une chanson pour vous !», ajoute-t-elle, en guise de présentation de Falling Behind, sur un rythme de bossa nova.
Elle poursuit avec Beautiful Stranger, au sujet d’un beau garçon qu’elle a croisé et avec qui elle aurait pu tomber en amour. Mais, comme elle n’a pas réussi à lui parler, elle a composé cette chanson mignonne qu’elle conclut au violoncelle. Magnifique!
Accompagnée d’un groupe de quatre musiciens (claviers, guitare, basse et batterie) ainsi que d’un quatuor à cordes, elle s’en donne à coeur joie sur I Wish You Love, adaptation anglaise de Que reste-t-il de nos amours? de Charles Trenet.
Cela dit, la plupart des morceaux de cette «crooneuse» sont des ballades plutôt calmes, de sorte qu’au bout d’une heure, on ressent un certain essoufflement. Il faut aussi dire que ce spectacle, annoncé pour 19h 30, puis repoussé à 20h 30, n’a commencé que vers 21h 40. Il est regrettable que personne n’ait pris la parole pour expliquer ce retard aux nombreux spectateurs qui ont attendu Laufey durant plus de deux heures!
Prix Ella-Fitzgerald
Juste avant la fin du concert, le directeur de la programmation du FIJM, Maurin Auxéméry, est monté sur scène pour remettre à Laufey, la statuette du Prix Ella-Fitzgerald qui récompense une chanteuse ou un chanteur «qui a eu un impact et une influence majeure sur la scène internationale.»
Enchantée d’être ainsi honorée, la reine de la soirée a communiqué sa joie au public avec From the Start, au grand bonheur de ses admirateurs qui connaissent les mots par coeur!
Au rappel, elle a offert la douce Letter to My 13 Year Old Self. Puis, la jeune femme à qui tout semble réussir a conclu avec It Could Happen To You.
Bref, après avoir virtuellement piqué la curiosité de son public, Laufey nous a démontré qu’elle sait toucher le coeur des gens. En plus de sa musique, c’est l’ensemble de sa personnalité qui fascine, entre autres, les jeunes filles. Plusieurs spectatrices portaient d’ailleurs des noeuds de tissus dans leurs cheveux, comme le fait parfois Laufey.
Et, malgré l’heure tardive, on faisait encore la file devant la table de produits dérivés (t-shirts, chandails, etc.), après le concert qui s’est terminé vers 23h. Pas de doute, une nouvelle star du jazz est née!
Le Festival international de jazz de Montréal se poursuit jusqu’au 6 juillet. Programmation.
Crédit photo: Frédérique Ménard-Aubin