Le festival Image + Nation édition 2024 s’est terminé sur un très grand film qui passera, hélas, inaperçu de la critique et des cinéphiles puisque nous étions 50 spectateurs dans un amphithéâtre de 1000 places: il s’agit du film Sebastian (Royaume Uni, 2023, 111 min VOA STF) du Finlandais Mikko Mäkelä oeuvrant depuis Londres.
L’histoire est pétrie d’actualité et fait songer à ces moments masculins très viscontiens par analogie, selon lesquels Lucchino a dû ressentir un désir volcanique s’emparer de lui lorsque Alain Delon lui est apparu, rue sainte-Anne, il y a maintenant près de 70 ans. Visconti en aura fait, bien sûr, depuis lors, l’inoubliable star éternelle inégalée en France.
Ruaridh Mollica: un éphèbe millésimé
L’intrigue glorifie le talent d’un jeune écrivain appelé Sébastian (Ruaridh Mollica) métamorphosé en escorte londonienne qui effectue une authentique exploration des rapports entre de braves hommes mûrs, fort défraîchis physiquement mais à la recherche du toucher essentiel, et, l’accessible elixir bouleversant offert par cette jeunesse splendide (ou nécessiteuse d’attention et de soins monnayés) qui prolifère partout sur les réseaux sociaux modernes.
Un toucher vibrant
L’objectif carriériste du magnifique, glabre cavalier et brillant écrivain Sébastian est d’écrire un grand roman à succès. Et, au coeur de chaque rencontre, nous apercevons surgir son toucher viscéral à l’âme, ce frémissement du sens bouleversant dépassant de beaucoup la vue, l’ouïe, le goût et l’odorat à l’objectif d’atteindre la volupté de vivre.
Le désir wildien
Oscar Wilde, en ses explorations sensuelles, lui aussi pourrait être évoqué ici en cette émotion partagée à la vue de la beauté de l’acteur Ruaridh Mollica que j’associerai sans détour à l’élégance et à l’intelligence du jadis étincelant Alain Delon, autrefois jeune.
Une magnifique présence
Mollica crève tout partout, sans relâche, l’écran: son jeu avisé et volcanique de passion reste impeccable de vérité tragédienne.
L’intrigue courante de ces services d’urgence tactile, de nos jours compris comme étant de franchise affective, ressuscite ce dilemme d’intégrité de la jeunesse masculine dotée d’une beauté spectaculaire provoquant l’amour mais surtout le puissant désir d’infinitude de l’âme sachant vouloir se laisser sensuellement emporter au paradis des voluptés. Ainsi s’étanche la solitude.
Une caméra à la James Ivory
On saura reconnaître chez le Finlandias Mäkelä, la finesse expressive de l’image de François Truffaut, l’ironie souriante de Robert Altman, l’audace des scènes charnelles à la Steven Frears, l’authenticité du sentiment de désarroi typique à Xavier Dolan lui-même et surtout l’art du velours visuel à la James Ivory en son grand art inégalé de la plus somptueuse intimité.
Toutes les scènes crédibles de Sebastian portent profondeur de jeu et sont exquises au regard envoûté.
Chaque scène, chaque décor léché de fines textures et de visages bien choisis parfaitement éclairés, sont ornés avec des esquisses sulfureuses de cet amour fabuleux qui existe, oui, parfois, tel un rare trésor, entre un homme jeune et un homme mûr séduit et bouleversé d’amour.