Texte de Vianney MOSSER
Samedi 27 août à Trélazé, le Festival Estival s’apprête à refermer son édition 2016 avec plus de 200 000 spectateurs venus se presser tout au long de l’été. Pour clore cette édition, un concert unique. L’invité exceptionnel est l’auteur-compositeur-interprète français le plus connu dans le monde, 200 millions d’albums vendus au cours d’une carrière de plus de 80 ans et quelques uns des plus célèbres titres de la chanson française : Charles Aznavour.
Quel programme!
Charles Aznavour, en concert unique et gratuit, dans une petite ville du sud-ouest d’Angers. On pouvait alors penser que le récital tiendrait en trois quarts d’heure avec une petite formation musicale. Faux. Ce sont deux heures de concert, 23 titres et une orchestration semblable à sa grande rentrée au Palais des Sports de Paris en 2015 qui ont été offerts par la légende de la chanson française. Et quel programme !
Près de 35 000 personnes sont venues assister à ce show hors-normes. De tous les âges, les premiers spectateurs se sont pressés dès l’ouverture des grilles, plus de deux heures avant l’entrée en scène du grand Charles. Même les balances ont été scrutées par des spectateurs impatients. À 92 ans, Aznavour déplace encore largement les foules, on peut le constater à chaque concert annoncé en France ou à l’étranger. 92 ans (et demi, comme il dit sur scène avec beaucoup d’autodérision.) et encore une forme exceptionnelle. Si, dès l’ouverture de son récital il annonce la couleur avec son âge, ses problèmes d’audition, de vue et – surtout – de mémoire, le public ne lui en tient pas rigueur et, fait important, ne s’en rendra même pas compte.
Beauté des textes et mélodies
Incroyable forme et incroyable programme. Nous savons tous que Charles Aznavour n’est plus tout jeune et ses écarts de voix, de ton ou de rythme sont aujourd’hui parfois présents dans ses spectacles. Mais la beauté des textes, des mélodies et la force de son interprétation mettent, ce soir-là, rapidement à l’index ces inquiétudes. Un concert gratuit, en plein air (le 4ème de sa carrière. Le plus important fut celui de Montréal avec 100 000 spectateurs.) pouvait laisser craindre quelques faiblesses. Aucunement. Une maîtrise totale de sa voix, comme portée par 35 000 spectateurs déjà acquis à sa cause, un rythme parfait, une maîtrise de l’espace comme à ses grandes heures du Palais des Congrès. Rien ne faute. Si certaines chansons laissaient des appréhensions chez les fans, Aznavour a prouvé que rien ne lui était impossible. Il est même meilleur que certains soirs au Palais des Sports. C’est dire.
Côté programme, les puristes ont été ravis. Si le tour de chant de 2015 avait réservé quelques jolies surprises comme « À ma femme », « Je bois », « Les amours médicales » ou « Ils sont tombés », il semblait difficile de retrouver ces titres à Trélazé. Néanmoins, Charles Aznavour a surpris son auditoire en interprétant quelques titres plus confidentiels au grand public : « Viens m’emporter » et « La vie est faite de hasards » tirés de son album « Toujours » sortis en 2011, mais aussi « Je n’ai pas vu le temps passer » ou la « cinquantaine » est devenue « Quatre-vingt-douze ans révolus ». Et le grand public n’a pas été oublié.
Un tour de chant regroupant les grands succès de l’artiste avec des réorchestrations surprenantes comme pour « La mamma » sur un rythme flamenco ou « Hier encore » à la façon « Yesterday when I was young », son pendant américain orchestré sur un rythme à 4 temps. L’« Avé Maria » est parfait, « Il faut savoir » et « Désormais » puissantes. « Les plaisirs démodés » font rire et chanter, « Mes emmerdes » devient jazz cuivré avec beaucoup d’autodérision du chanteur faisant mine de se référer à son prompteur pour le refrain. Les choeurs étaient assurés par Claude Lombard et Magali Ripoll.
« Avec un brin de Nostalgie », son dernier titre, est glissé parmi les classiques, comme s’il en était devenu un à part entière. « Comme ils disent » envoûte et impose le silence. Sans modestie, et de manière assumée, Charles Aznavour interprétera trois chansons en langue étrangère parce que « quoi qu’on en dise, 1m62 mais artiste planétaire, c’est pas mal pour un français, il faut le montrer ! ». Ce sera « Te espero », « Come triste Venezia » et « She » que les plus jeunes reconnaitront grâce au film « Coup de foudre à Nothing Hill ». Deux heures pour finir dans un final explosif avec « Les deux guitares », « La bohème » et un « Emmenez-moi » repris en choeur par tout le public. Pas de rappel, mais un feu d’artifice pour clore une soirée ou le grand Charles a mérité une fois de plus qu’on l’appelle Monsieur Aznavour.