La comédie musicale «Spring Awakening» est un grand classique dans lequel on suit un groupe d’adolescents à la découverte de leur sexualité et autres sujets tabous. Gagnante de 8 Tony Awards en 2007 (dont la meilleure comédie musicale) sur Broadway, le spectacle est présenté au Monument National jusqu’au 15 juin. Le Contact Theatre en a fait une superbe production, dans une mise en scène originale qui vous mettra au coeur des drames vécus par ces adolescents.
L’histoire poignante raconte la vie d’adolescents et d’adolescentes de la fin du XIXe siècle, chacun avec ses problèmes et ses découvertes. Wendla, Melchior et Moritz naviguent dans les eaux tumultueuses de la puberté et de l’éveil sexuel. Wendla ignore les réalités de la sexualité, tandis que Melchior est rebelle mais comprend le monde mieux que ses pairs. Moritz est un jeune anxieux et troublé qui prendra de grands moyens.
La mise en scène de Debora Friedmann utilise tout l’espace du studio-théâtre du Monument National avec une scène au centre et des entrées aux quatre coins. On ressent toute l’énergie mais surtout on se sent au coeur même de l’action, avec une certaine intimité avec les personnages. Des chorégraphies modernes et dynamiques viennent enrichir le spectacle.
Les trois personnages principaux sont campés à merveille par des interprètes de grands talents. Ne serait-ce que pour cela, le prix de billet en vaudrait la peine. Mais en prime, vous aurez tout un spectacle!
David Marino dans le rôle de Melchior est touchant et intense à chaque instant. On se souvient de lui quand il a été finaliste à La Voix de 2017 où il avait fait grande impression pour son jeune âge et sa merveilleuse voix de crooner. Sa voix est maintenant plus mature et il est toujours tout aussi attachant. Il est un excellent interprète et sa voix chantée est par moment puissante avec un vibrato naturel. Sa chanson « Left Behind » sur la tombe de son ami m’a donné des frissons.
Sa petite amie Wendla, incarnée par Éloïse Lagacé, impressionne par sa voix douce et expressive. Particulièrement dans « The Guilty Ones » tout en douceur et dans « Whispering » où on la sent émotive et pleine de tendresse. On ressent l’émotion dans son duo « The Word of Your Body » avec Melchior car leurs voix s’harmonisent à la perfection.
Mairead Rynne fait évoluer l’ado troublé Moritz tout au long du spectacle. Elle chante d’une voix tout en nuance, parfois pleine d’émotions, puissante dans les aigus à d’autres moments. On la remarque dans « And Then There Were None » pour son intensité à la fin et dans « Don’t Do Sadness/Blue Wind » avec Ilse, ce qui rend moins dramatique la scène du suicide.
La chanson de la fin « Those You’ve Known » nous montre tout le talent que ces trois interprètes possèdent et restera gravée en mémoire.
Deux nominées aux trophées META sont parmi les personnages secondaires: Julie d’Entremont (Martha) et Maria Jimenez (Ilse). Avec de belles voix expressives, elles se démarquent dans « The Dark I Know Well » tout en nuances.
Les autres interprètes sont aussi bons, avec de belles voix et font de magnifiques harmonies dans les numéros de groupe. Seul bémol, le jeu de certains est un peu inégal. Mais on sent l’énergie et la vigueur à chaque numéro musical. Dans une chorégraphie endiablée sur « The Bitch of Living » chantée par les garçons, on peut ressentir toute la testostérone qui s’en dégage!
J’ai été impressionné par « Totally Fucked » après le suicide, vraiment poignant. Aussi « The Song of Purple Summer » qui est superbement interprété par toute la troupe en finale, et qui ramène un peu d’espoir et un vent de fraîcheur.
Je dois souligner l’excellent orchestre qui surplombe la scène, dirigé par Giancarlo Scalia. Que ce soit pop-rock ou classique, l’ensemble est précis et harmonieux. La musique pop-rock pour une histoire du XIXe siècle permet de relier cette période au monde moderne d’aujourd’hui.
Les décors sont simples mais modulaires pour permettre la fluidité des changements de scènes. Les éclairages soignés mettent en valeur les personnages et l’action du récit.
En résumé, je recommande fortement ce spectacle. Contact Theatre nous a habitué depuis quelques années à des spectacles de bonne qualité avec des interprètes d’exception. Il met en valeur de jeunes talents énergiques, dans un texte intelligent et des chansons mélodieuses et complexes.
Les bons coups: belles voix chantées, orchestre, mise en scène, éclairages, sonorisation, chorégraphies, énergie
Les moins bons coups: jeu inégal des certains interprètes secondaires
Équipe de création
Livret/Paroles: Steven Sater
Musique: Duncan Sheik
Production: Ally Brumer
Mise en scène/Choréographies: Debora Friedmann
Direction musicale: Giancarlo Scalia
Direction technique: Miles Keily-Baxter
Décors: Emily Fennell
Accessoires: Lily Lachapelle
Éclairages: Chris Wardell
Sonorisation: Carmen Mansuco
Costumes/Coiffures: Leo Chupin, Kyra Evanochko
Direction d’intimité: Charlie Frost Olivares
Chorégraphies de combats: Justin Calla
Distribution
Éloïse Lagacé, David Marino, Mairead Rynne, Julie d’Entremont, Maria Jimenez, Kyanna Mondezie, Robyn Erin Ellison, Theodore Vlachos, Billy Iliopoulos, Santiago Montejo, Dylan Stanley, Caitlin Hawes, Mike Mastromonaco.
Musiciens
Giancarlo Scalia, Jason Ma, Alexander Cruz, Malika Pharand, Meiling Fong, Nicholas Gallant, Irene Toro.
Monument National (1182 Boul. St-Laurent, Montréal)
Présenté en anglais du 8 au 15 juin 2024.
Billets en vente (42$/6$ étudiant et QDF) au https://www.contacttheatre.ca/springawakening24
Site Web: https://www.contacttheatre.ca
Avertissement: Cette comédie musicale aborde le contenu réservé aux adultes, notamment le sexe, les abus sexuels, la violence verbale, le suicide, la violence parentale, la violence physique, l’avortement, la grossesse chez les adolescentes, la mort, la masturbation, la religion, la violence institutionnelle, les armes et le langage grossier.
Photos: Joshua Faier et Matt Sandoval