Le temps s’est arrêté, cet après-midi, au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, où le chanteur et comédien Jules Grison a fait revivre les grandes mélodies de Gilbert Bécaud, avec la collaboration d’Emily Bécaud. Je reviens te chercher, La maison sous les arbres, C’est en septembre, etc., il en a eu des tubes, celui qu’on surnommait «Monsieur 100 000 volts» ! On constate aussi que plus de vingt ans après sa mort, son oeuvre demeure percutante et drôlement d’actualité !
Jules Grison est une fois de plus épatant ! Après avoir séduit le public avec son formidable hommage à Aznavour présenté un peu partout dans la francophonie, il nous revient avec un autre spectacle que je qualifierais de nécessaire ! En effet, même si Bécaud a écrit plus de 600 chansons, il est bien rare qu’on entende ses refrains, de nos jours.
Pourtant, cette figure emblématique de la chanson française a marqué son époque au point de se produire 33 fois au célébrissime Olympia de Paris ! Pas étonnant que Grison ouvre son spectacle avec L’Olympia, troublante pièce où Bécaud décrit ses états d’âme, au moment d’entrer en scène dans cette salle mythique.
Pas de doute, il en faut du talent et du métier pour marcher sur les traces de ce monstre sacré ! Entouré de quatre musiciens et une choriste, l’interprète que plusieurs ont découvert dans la comédie musicale Roméo & Juliette, s’en donne à coeur joie ! Les tantes Jeanne, Quand Jules est au violon, etc., il faut voir les pas de danse endiablés de l’élégant Grison, passionné par le music-hall et la grande variété française ! Voix juste et puissante, diction parfaite, gestes précis et appropriés au texte, etc. En plus de tout cela, notre homme joue parfois du piano et de la guitare.
Emily Bécaud interprète quelques classiques de son père
L’un des moments les plus attendus du spectacle était, sans doute, la présence sur scène d’Emily Bécaud. Fille de Gilbert Bécaud et de sa deuxième épouse, le mannequin américain Cathryn Lee St. John, Emily ne dira toutefois que quelques mots, en guise de présentation de Je reviens te chercher : «Papa a écrit cette chanson pour maman et je suis ravie de l’interpréter.» Plutôt effacée, la dame enchaîne avec L’indifférence en duo avec Grison. Elle reviendra pour un autre duo (C’est en septembre) et on ne la reverra qu’à la toute fin du spectacle.
Pourtant, on nous promettait que madame Bécaud allait raconter divers moments vécus avec son père et qu’on verrait même des vidéos d’archives de sa famille. Il n’y a rien eu de tout cela et c’est dommage car les plus jeunes qui accompagnaient leurs parents ou grands-parents n’auront pas vu une seule photo de l’artiste à qui on rendait hommage.
Bien sûr, cela n’enlève rien à la richesse du répertoire de Bécaud dont on se permet parfois d’actualiser les paroles. C’est ainsi que dans Nathalie où l’on va de Moscou jusqu’aux plaines d’Ukraine, le tombeau de Lénine a été remplacé par celui de Poutine; un changement que plusieurs spectateurs ont d’ailleurs applaudi.
Cela dit, les noms de Barack Obama et Donald Trump sont maintenant intégrés à la chanson L’Indien qui évoque la détresse d’un amérindien face à l’appropriation des terres ancestrales de son peuple par les blancs.
Demandes spéciales du public
Très bonne idée de consacrer le dernier quart d’heure du spectacle aux demandes spéciales du public ! C’est à ce moment qu’on entendra Le petit oiseau de toutes les couleurs, Quand il est mort le poète, Qui a volé l’orange du marchand ? et Dimanche à Orly.
Jules nous présente alors son «Monsieur Pointu», le violoniste Claude Tedesco avec qui il s’amuse dans La vente aux enchères, un peu comme le faisait Gilbert avec le violoneux québécois Paul Cormier. Souvenirs retrouvés ! On tape des mains dans la salle ! C’est le bonheur ! On en oublie presque qu’on vient de reculer nos montres d’une heure et qu’on en a pour plusieurs mois de grande noirceur.
On est dans la lumière de Bécaud et on en redemande ! Place à la colossale Et maintenant que Grison interprète avec fureur et ses longs bras grands ouverts ! On crie bravo et ce n’est pas seulement par nostalgie car la magie de ces chansons opère encore indéniablement aujourd’hui !
Et maintenant est présenté à Québec, au théâtre Petit Champlain, les 7 et 8 novembre. / Billets
Enfin, le producteur de Et maintenant, Gil Marsalla, annonce que le spectacle Piaf sera à l’affiche en janvier prochain et Brel ! nous arrivera au printemps 2023, à la Place des Arts et au théâtre Petit Champlain.
*Photos fournies par Directo Productions