Accompagnée par la pianiste nippo-américaine Natsuki Iratsuka et le percussionniste montréalais Patrick Graham, la flûtiste québécoise Yuki Isami a offert à un public d’environ trois cents fervents mélomanes du Festival International de Jazz de Montréal des oeuvres immortelles du répertoire nippon. Des airs brefs, certes, mais évocateurs de la spiritualité poétique des îles japonaises. Ces oeuvres ont reçu chaque fois une explication et élucidation en français, puisque le Japon a brillé de légendes et d’oeuvres littéraires jalonnant sa riche histoire de pays très influent tant en Orient qu’en Occident.
Debussy joué maintes fois
Ainsi Yuki Isami a mis en valeur des chants d’avant l’ère Meiji et encore d’autres subséquents à cette ère: cette époque fut appelée une période d’occidentalisation du Japon millénaire.
Alors que les airs ont défilé au cours d’un récital d’une durée d’environ une heure, c’est le musicien impressionniste français Claude Debussy qui fut mis à l’honneur : plus de trois de ses courtes oeuvres ont surgi dont une interprétation de Pagodes pour piano acoustique (mais joué ici, en plein air, sur piano électrique). Il s’agissait du premier des trois volets des Estampes de Debussy composées en 1903, toutes fort connues mondialement et Pagodes fut fort bien rendue sous les mains habiles de la pianiste Natsuki Iratsuka.
Les flûtes anciennes
Avec les instruments à percussion de l’Antiquité, la flûte reste le plus vieil instrument musical si on exclut la voix humaine et le chant des oiseaux emporté par les murmures oniriques du vent de chaque saison qu’ils soient des îles japonaises ou grecques. Les mélodies naquirent de la flûte ancestrale elle-même tirée des os longiformes évidés des oiseaux par les premiers primates. Ces airs de flûte balayaient toute mer et océan confondus, tous les paysages musicaux illuminés de la Terre éclatante de cette lumière si particulière du soleil Levant ou couchant qui a su éblouir, jadis, les impressionnistes français.
Un concert faisant suite à l’album Rives
Tout récemment, Yuki Isami et cette même équipe de musiciens ont sorti un album de musique traditionnelle japonaise intitulé Rives. Y furent ressuscités de nombreux airs japonais, à la flûte traversière, ainsi que via des instruments à vent traditionnels japonais tels que le shinobue, le koto et le shamisen, tous employés d’ailleurs, sur scène, ce lundi premier juillet.
Le théâtre de plein air de la salle dite Montréal-TD a donc retenti de ces diverses flûtes : l’amphithéâtre jouxtait le mur externe de la Maison Symphonique soit à quelques mètres des murs extérieurs de la salle Wilfrid-Pelletier.
Un rappel incontournable des grands flûtistes d’hier encore
Pour ceux qui ont connu l’époque de James Galway, Zamfir, Jean-Pierre Rampal et enfin tous les artisans du répertoire pour flûte, ce récital était un écho lointain de cette époque faste en disques et concerts de flûte multipliés à travers le monde entier par ces étoiles artistiques aujourd’hui disparues du firmament des mélomanes tant classiques que jazz.
Émotions intenses au lyrisme japonais
Un des plus beaux airs de poésie japonaise (celle de Hikaru Hayashi) mise en musique par Eddy Marnay fut intitulé L’Île nue et participa d’un célèbre film japonais tel que cet air fut jadis chanté de manière bouleversante par la grande voix que fut Frida Boccara. À la flûte, on eût pu encore entendre, si je me permettais une suggestion, le magnifique Prélude à l’Après-midi d’un faune de Debussy et on eût cru entendre de la musique d’inspiration japonaise tellement ses harmonies évoquent un monde d’îles amoureuses de poésie et mu d’élans volcaniques surplombant des vallées de floraisons aux mille parfums enchanteurs.
Photo: Serge Vaillancourt