Concert mémorable des Petits Chanteurs du Mont-Royal qui ont fait salle comble, dimanche (5 mai), en interprétant le Requiem de Mozart, avec l’Orchestre classique de Montréal. Loin de la réverbération caractéristique de l’oratoire Saint-Joseph, on a pu apprécier la sonorité si particulière des voix de ces choristes, âgés entre 10 et 17 ans. La qualité de leur formation et la ferveur qu’ont ces jeunes garçons à chanter Mozart en 2024 suscite l’admiration. Les quelque 2000 spectateurs de 7 à 77 ans ont d’ailleurs fait preuve d’une qualité d’écoute sans failles avant d’ovationner longuement les héros de ce concert!
Le meilleur des mondes
Le Requiem de Mozart (version Süssmayr) interprété par un choeur d’enfants est en soi un événement rare! Le directeur artistique de l’OCM, Jacques Lacombe, nous a d’ailleurs raconté qu’il n’avait vécu pareille rencontre artistique qu’une seule fois, il y a 45 ans, avec les Petits Chanteurs de Trois-Rivières. C’est même au cours de ce concert que monsieur Lacombe, alors organiste, avait découvert son intérêt pour la direction d’orchestre.
Le maestro, tout juste rentré de Toronto où il avait dirigé, la veille, l’opéra Don Pasquale de Donizetti, s’est retrouvé devant des Petits Chanteurs fin prêts, grâce au travail du chef de choeur Andrew Gray. En entrevue aux ArtsZé, ce dernier a justement souligné à quel point ses choristes se sont investis dans ce concert, fascinés par le défi d’interpréter la musique tout en nuances de Mozart.
Cela dit, on sent que les Petits Chanteurs acquièrent une culture générale qui va au-delà de la musique. Leur prononciation du texte écrit en latin semble naturelle pour eux. Dies irae, dies illa Solvet saeclum in favilla (Jour de colère, que ce jour-là Qui réduira le monde en cendres)… Non seulement ils prononcent distinctement mais, de toute évidence, ils ont pris le temps de s’imprégner du sens de l’oeuvre.
Et surtout, il y a la signature sonore de ce choeur, enrichie par une tradition qui remonte à presque 70 ans. Le regretté directeur artistique des Petits Chanteurs, Gilbert Patenaude, estimait que la voix des garçons atteint une beauté unique juste avant la mue. «À 12-13-14 ans selon les cas, ça commence déjà à changer et ça ne reviendra jamais comme voix», précisait le pédagogue, lors d’une entrevue que relate Radio-Canada dans un texte intitulé Les Petits Chanteurs du Mont-Royal : entre rigueur scolaire et vocale (2019).
Il n’y a rien de tape-à-l’oeil chez les Petits Chanteurs du Mont-Royal. Ils ont beau être 150, leur entrée en scène se fait discrètement et harmonieusement, sans claquer du talon! Vêtus sobrement, il sont au service de la musique sans chercher à se faire valoir et pourtant ils irradient, aux côtés de quatre solistes très en voix: Emma Fekete (soprano), Ian Sabourin (contre-ténor), Matthew Dalen (ténor) et Matthew Li (basse)
En première partie du concert, l’OCM a interprété, entre autres, une magnifique symphonie de Joseph Bologne, Chevalier de Saint-Georges. Heureusement, depuis quelques années, on s’intéresse davantage à ce compositeur né en Guadeloupe. Homme de couleur, il a poursuivi une carrière artistique et sportive hors du commun dans la société de cour du siècle des Lumières, pourtant sujette à de nombreux préjugés sur la couleur de peau. On note, entre autres, que Saint-Georges s’est proposé pour la direction de l’Académie Royale de Musique (nom de l’Opéra de Paris sous l’Ancien Régime), mais qu’il s’est butté à l’hostilité de plusieurs chanteuses et danseuses refusant d’être dirigées par un mulâtre (voir source).
Bref, une fois de plus, la direction de l’OCM a réussi à créer un événement original avec quelques découvertes musicales et, qui plus est, en mettant en lumière un choeur emblématique de Montréal. Bravo!
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*Photos fournies par l’Orchestre classique de Montréal