L’OSM a soulevé l’enthousiasme du public à chacune des pièces du concert présenté mercredi soir à la Maison symphonique et repris ce soir (13 octobre). Le pianiste invité, Víkingur Ólafsson, surnommé le «Glenn Gould islandais» par le New York Times, a fait grande impression dans une oeuvre de Ravel qu’il va rejouer ce soir. À quelques jours du départ de l’Orchestre symphonique de Montréal pour une tournée européenne, la toute première à être dirigée par Rafael Payare, l’énergique maestro rayonne !
Ouverture percutante
Belle entrée en matière avec Les Préludes, op. S 97 de Liszt, le plus populaire des treize poèmes symphoniques du compositeur hongrois. Après une introduction tout en douceur, l’orchestre va vrombir ! Tous les pupitres sont sollicités, puisque les Préludes sont écrits pour un grand orchestre de cordes, bois, cuivres, harpe et une variété d’instruments de percussion (timbales, grosse caisse, cymbales, etc.)
Quelle puissance dans cette partition ! Pas étonnant que cette musique ait été utilisée à des fins politiques. L’apothéose finale est électrisante ! Il est d’ailleurs plutôt rare de voir le public de la Maison symphonique se lever pour applaudir dès la première pièce d’un concert, surtout un mercredi soir !
Le «Glenn Gould islandais»
Pour plusieurs mélomanes, le clou de la soirée était de voir en chair et en os le pianiste Víkingur Ólafsson, reconnu pour son sens de la réinvention musicale. Le trentenaire en avait d’ailleurs surpris plusieurs, en 2017, avec son album consacré à la musique de Philip Glass, dont les interprétations originales ont été saluées par le compositeur lui-même.
Avec l’OSM, Ólafsson interprète le Concerto pour piano en sol majeur de Ravel, comme il le fera à Zagreb, Budapest et Londres. Cette musique qui rappelle parfois Gershwin, commence par un clap de fouet ! C’est souvent léger et parfois efferverscent ! Ravel définissait ce concerto comme un divertissement (divertimento), dans lequel deux mouvements vifs encadrent un mouvement lent.
Ólafsson est impeccable dans les mouvements rapides, mais c’est surtout dans le mouvement lent qu’il se distingue, par l’intériorité de son interprétation. D’abord seul au piano durant les premières minutes de l’Adagio assai, le soliste sera rejoint progressivement par divers instruments de l’orchestre avant d’arriver à un point culminant : cette longue phrase où l’artiste dépose ses doigts sur les touches avec une infinie délicatesse, évoquant une douce pluie.
Ovationné, il prend le temps de dire quelques mots au public montréalais. Le visiteur est enthousiaste à l’idée de partir en tournée avec l’OSM et de retrouver ainsi son ami de longue date, Andrew Wan, co-violon solo de l’orchestre. Puis, Ólafsson offre en rappel une transcription du mouvement lent de la Sonate no 4 en mi mineur pour orgue de Bach.
Une symphonie aux résonances bien actuelles
Après l’entracte, on passe à la Symphonie no 10 de Chostakovitch, une oeuvre d’une durée de près d’une heure, dans laquelle le chef Payare semble particulièrement à l’aise. Cette musique qui aurait été composée en 1953, peu après la mort de Staline semble avoir une résonance actuelle en ce temps de conflit armé en Ukraine.
L’Allegro, entre autres, est presque terrifiant, lors de la reprise du thème principal avec les trombones et le tuba. Chostakovitch qui était fortement critiqué par les autorités soviétiques pour ses partitions jugées discordantes, avouera d’ailleurs qu’il avait pensé à Staline en composant ce mouvement aux accents symbolisant l’oppression.
Chostakovitch et Ravel selon Payare
Orchestre symphonique de Montréal / Rafael Payare (chef)
Víkingur Ólafsson (piano)
Programme du 13 octobre : Samy Moussa, Elysium (12 min) / Ravel, Concerto pour piano en sol majeur (23 min) /
Chostakovitch, Symphonie no 10 en mi mineur, op. 93 (57 min)
Première tournée européenne de l’OSM dirigée par Rafael Payare
En 1962, l’OSM s’envolait pour l’Europe avec son maestro Zubin Mehta pour sa toute première tournée internationale. Afin de célébrer les 60 ans de cette tournée historique, l’Orchestre reprend le chemin de l’Europe sous la direction de Rafael Payare, du 21 au 28 octobre 2022.
Pour l’occasion, l’OSM collaborera avec les pianistes Víkingur Ólafsson et Bruce Liu, le violoniste Augustin Hadelich ainsi que la Wiener Singakademie. Cette tournée se déclinera en 6 concerts à travers 5 pays, passant par les villes de Zagreb, Budapest, Vienne, Bruxelles et Londres.
L’Orchestre interprétera, entre autres, la Symphonie no 5 de Mahler, la Symphonie no 10 de Chostakovitch ainsi que des œuvres de Liszt, Ravel, Brahms et du compositeur canadien Samy Moussa.