Dans la prestigieuse salle Claude-Léveillée de la Place des Arts, une centaine d’artistes chaque année se suivent et ne se ressemblent pas grâce au tremplin qu’offre les Week-ends de la chanson Québécor. Et bien que les grands noms se présentent dans les salles d’à-côté, les talents de cet antre de 128 places, aux allures de boites à chansons de l’époque où le public était collé sur l’artiste, valent autant le déplacement car ils sont la source de découvertes épatantes. Serge Bedrossian, malgré une longue feuille de route, est un de ces interprètes insoupçonnés, dont le répertoire va de la chanson française à quelques titres du Great American Song Book.
Outre plusieurs succès de son idole Charles Aznavour, de Michel Delpech avec Pour un flirt, de Serge Lama avec Je t’aime à la folie, de Jean Ferrat avec C’est beau la vie, de Pauvre diable par Juglio Iglesias, le chanteur né en Syrie mais d’origine arménienne, Canadien et Montréalais d’adoption, a produit quelques compositions de son cru avec Au fil des jours pour célébrer Charles Aznavour à qui il a présenté la chanson en main propre, Prête-moi ta voix, et Viens voir Montréal. De sa voix grave, avec une aisance et une assurance étonnantes sur scène, on se laisse facilement emporter par ses interprétations des célèbres Fly me to the moon, Sway, et Can’t help falling in love with you que son autre idole, Elvis Presley, avait popularisée.
Appuyé par deux musiciens chevronnés aux claviers et aux percussions, Bedrossian ne boude pas son plaisir non plus quand il livre avec aplomb les vibrantes For me formidable, Je m’voyais déjà, Qui, La Bohème, la difficile Emmenez-moi, puis une autre, cette fois, rarement chantée en public par Aznavour soit Dormir avec vous Madame. Puis, il rendra à sa façon un certain hommage à Marie Laforêt décédée quelques jours auparavant en chantant La playa qu’elle avait popularisée.
Il excelle également, grâce à son registre très bas, dans la performance de chansons du folklore arménien comme Karoun Karoun, mais il chantera également Ahwak, de Habdel Halim Hafez, un artiste décédé et inconnu ici mais une idole au Moyen Orient dont les ventes d’albums dépassent les 80 millions.
Au fil de 22 chansons livrées avec beaucoup de passion au cours de ce spectacle plein d’émotions, dans une ambiance amicale et chaleureuse, on comprend que Serge Bedrossian, qui, en plus, tourne avec un spectacle d’Aznavour depuis 5 ans, est un artiste complet et dévoué à la chanson francophone qu’il livre avec excellence.
Photo ©Lynn Berthiaume