La pièce Membrane, à l’affiche au Théâtre Prospero, est épatante au point de vue visuel! La conception de l’éclairage, la scénographe et la mise en scène de Cédric Delorme-Bouchard entraînent le public dans un monde futuriste, où l’urgence écologique a obligé l’humanité à se réfugier dans des cités sous-marines. La sexualité et la fluidité de genre sont parmi les principaux thèmes de ce roman de science-fiction queer en langue chinoise du Taïwanais Chi Ta-wei, adapté par la québécoise Rébecca Déraspe.

Crédit: Maxim Paré Fortin
Dans cette étrange fable, Momo (Larissa Corriveau), est une esthéticienne très respectée, étant la seule à offrir de mystérieuses membranes invisibles qui protègent la peau et contribuent à magnifier l’existence. On apprend que, durant son enfance, Momo a contracté un virus l’obligeant à vivre durant plusieurs années en isolement, dans une bulle aseptisée. De multiples transplantations d’organes artificiels lui ont sauvé la vie, mais cette expérience traumatisante a miné sa relation avec sa maman.
À la veille de son trentième anniversaire, la jeune femme, remplie d’appréhensions, s’apprête à revoir sa mère (Evelyne de la Chenelière), pour la première fois depuis vingt ans. Des retrouvailles qui éclaireront le passé de Momo et chambouleront son avenir.

Crédit: Maxim Paré Fortin
Si ce résumé peut sembler relativement simple, le texte est, néanmoins, difficile à décoder, alternant entre monologues, dialogues et voix enregistrées.
Toutefois, il est clair que la question du genre ne dérange plus personne dans cet univers, où l’on peut changer de sexe à souhait et même fusionner avec des humanoïdes pour prolonger sa vie.
Alors que les identités et les corps sont en constante métamorphose, des questions troublantes se posent : qu’est-ce qui définit l’être humain? Comment déterminer si certaines transformations le déshumanisent?
En ce sens, les spectateurs ne sont pas en territoire inconnu, puisque ces interrogations se dessinent, depuis quelques années déjà, à travers le rôle de l’intelligence artificielle dans nos vies.
Cela dit, cette fiction plutôt cérébrale qui décrit une sombre société imaginaire, ne m’a pas ému. Cependant, j’ai été emporté, entre autres, par la conception sonore de Simon Gauthier, dont les extraits musicaux et le bruitage maximisent le climat anxiogène de la pièce.
Puis, le metteur en scène Cédric Delorme-Bouchard qui s’est distingué, au fil des ans, à travers de nombreux spectacles dont Le vaisseau-cœur (Salle Bourgie, 2019) et Intérieur (Usine C, 2022), se dépasse une fois de plus!
Du début à la fin de cette pièce d’une heure trente sans entracte, les murs carrelés changent de couleur au gré des éclairages et semblent refléter les différents états d’âme des personnage. Plus encore, un néon suspendu se déplace pour délimiter un espace de jeu, à différents endroits sur le plateau, ce qui ajoute au dynamisme visuel du spectacle.
Quant aux costumes de Marie-Audrey Jacques, ils apportent une touche de noblesse à ces personnages plus ou moins irréels. Larissa Corriveau et Evelyne de la Chenelière ainsi que Sébastien René se distinguent dans cette distribution où les autres comédiens défendent des personnages plutôt flous.

Crédit: Maxim Paré Fortin
Membrane
Texte: d’après le roman Membrane de Chi Ta-wei / Traduction: Gwenaël Gaffric
Adaptation: Rébecca Déraspe
Mise en scène, scénographie et lumière: Cédric Delorme-Bouchard
Avec:
Larissa Corriveau, Evelyne de la Chenelière, Pascale Drevillon, Marie-Christine Lê-Huu, Sébastien René, Ines Talbi
Au Théâtre Prospero, jusqu’au 10 février
Mardi, jeudi à 20 h
Mercredi, vendredi à 19 h
Samedi à 16 h
Infos
*Photo d’accueil: Evelyne de la Chenelière et Larissa Corriveau / Crédit: Maxim Paré Fortin