L’idée était séduisante : insuffler une dimension acrobatique à un classique de Shakespeare : Le Songe d’une nuit d’été. Une pièce complexe, des personnages nombreux, une histoire pleine de ramifications… il en fallait plus pour décourager le metteur en scène, Olivier Normand. Pourtant, si on salue l’audace du projet, on reste pantois quant à sa réalisation.
À l’origine, l’histoire se passe en Grèce où nous suivons les amours contrariés de Lysandre et Hermia, et de Démétrius et Héléna. En parallèle, Obéron, roi des fées, ordonne à Puck, son faire-valoir, de verser une potion sur les paupières de sa femme. Et puisque c’était décidément trop simple, on suit en parallèle bis, la difficile mise en scène que s’apprête à faire un directeur, flanqué de deux comédiens plus ou moins à propos.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Olivier Normand avait matière à… faire beaucoup de choses et ne serait-ce pas là le problème ? Malgré, le texte et ses enchevêtrements imposants, il a décidé d’ajouter des éléments de scénographie qui n’apportent rien à l’histoire et qui peuvent même perturber l’attention du spectateur : trampoline, acrobates, perches lumineuses, grands draps traversant la scène de part et d’autre… Dans la mesure où ces éléments n’ont aucune complémentarité dans l’histoire, ils évoluent indépendamment les uns des autres et détournent notre attention des dialogues qui s’échangent.
Autre point problématique : les repères temporels et spatiaux. Tant que nous sommes supposés être en Grèce, tout va bien, mais lorsque l’on suit les péripéties de la troupe de théâtre, aucun lieu, aucune date ne sont sont avancés, des ellipses temporelles qui manquent elles aussi de logique, et qui au bout du compte, nous font irrémédiablement décrocher lorsque les deux mondes – comprendre Grèce et troupe de théâtre – se retrouvent ensemble, dans la même dimension ?!
Mais la véritable faiblesse réside dans la direction d’acteurs : tantôt caricaturaux, tantôt en surjeu, tantôt en attitude trèèèèèès décalée du caractère du personnage interprété, il est légitime de se demander – au bout de 15 minutes – si ce spectacle n’est pas destiné aux enfants. Un rapide coup d’œil dans l’assistance m’a fait comprendre que non, malheureusement… Les traits grossis jusqu’au ridicule, le manque de prestance des comédiens, les touches d’humour ajoutées à la truelle, les voix déformées, confèrent à l’ensemble une approche caricaturale. Le point d’orgue est que l’on ne sait pas si c’est ce que le metteur en scène a voulu, et les comédiens ne semblent pas le savoir non plus…
Pourtant la prémisse de départ était attirante : un homme s’endort et se fait réveiller par ces protagonistes grecques – Début de l’histoire. Au final, les acrobates comme valeur ajoutée n’ajoutent rien et la pièce est dénaturée au point que les deux heures de spectacle sont subies plus qu’appréciées. Mais puisqu’il faut tenter dans la vie, on souhaite à Olivier Normand de tirer un bilan constructif de cette essai.
Le spectacle Le Songe d’une nuit d’été est présenté à la Tohu jusqu’au 10 février.
Durée : 2 heures ans entracte
Compagnies
Le Théâtre du Trident et FLIP Fabrique
Texte
William Shakespeare
Mise en scène
Olivier Normand
Interprètes
Marc Auger (Flûte), Josué Beaucage (Comédien chanteur et musique originale), Emmanuel Bédard (LÉgoïne et Égée), Hugues Frenette (Bottom), Jean-Michel Girouard (Démétrius), Valérie Laroche (Hippolyta et Titania), Maude Boutin-St-Pierre (Hermia), André Robillard (Lysandre), Olivier Normand, Jean-Sébastien Ouellette (Thésée et Obéron), Mary-Lee Picknell (Héléna), Marilyn Perreault (Puck), Tristan Robquin (Acrobate), Mathias Reymond (Acrobate), Arielle lauzon (Acrobate)
Traduction
Michelle Allen
Musique originale
Josué Beaucage
Chorégraphe
Alan Lake