C’est véritablement un solide tour de force de tenir seule en scène les épisodes et réincarnations des moments marquants de la vie de l’auteure Gabrielle Roy sans autre recours que le verbe et l’éloquence des écrits choisis.
Pendant une passionnante récapitulation des hauts faits biographiques de la jeune écrivaine née au Manitoba, bien avant qu’elle n’atteigne la gloire, on aperçoit les métamorphoses de la prise de conscience de sa quête d’identité en France et en Angleterre. Au coeur d’un décor fluctuant, entre des scènes reconstituant des dialogues tenus au sein d’intérieurs successivement manitobains, québécois et puis européens, le metteur en scène Olivier Kemeid nous montre l’écrivaine toujours en partance vers un ailleurs, souvent assise au bord d’un rivage, puisque nous effectuons beaucoup plus qu’un voyage intérieur qu’anime vigoureusement l’actrice Marie-Thérèse Fortin.
Elle contrefait fort bien les voix des interlocuteurs français ou anglo-saxons de l’écrivaine, elle explique ses conflits familiaux, sa hantise de l’anonymat, son ferme désir de se distinguer. Le texte raconte aussi quelques fragments de la vie provisoire d’institutrice à l’élémentaire à Saint Boniface et au sein d’un autre village à proximité, premier gagne-pain crucial de la future détentrice d’un Prix Fémina pour le roman Bonheur d’Occasion publié au sortir de la Deuxième Guerre mondiale.
La pièce aura donc su tirer l’essentiel du message central de cette autobiographie intitulée La détresse et l’enchantement dont nous avions publié les grandes lignes dans notre texte de présentation et d’annonce de la reprise de l’adaptation théâtrale entre le 22 octobre et le 2 novembre 2019 inclusivement au Théâtre du Nouveau Monde.