Après le succès de Comme des animaux, avec toujours sa plume crue, imagée et poétique, Ève Lemieux signe ici son deuxième roman tout aussi percutant, voire même déstabilisant, Mercure plein la gueule, aux éditions XYZ.
Résumé : Marie a passé la majorité de sa vie devant les caméras. Elle forme d’ailleurs un couple chéri des médias avec son partenaire de jeu, Émile. Et aimer Émile, être aimée par lui, c’est quelque chose qu’elle veut vivre et revivre à l’infini. Tant mieux, tant pis, on ne sait pas trop : derrière le masque de la comédienne, quelque chose de fragile s’effrite, grugé par cette relation toxique. Et lorsque leur couple implose, Marie Mercure en prend plein la gueule.
Ce roman n’est pas de tout repos. Il explore les relations amoureuses toxiques et les effets dévastateurs d’une peine d’amour pour une femme qui ne vivait que pour son homme.
Pour nous raconter l’histoire de Marie, l’autrice a choisi d’alterner entre le présent et le passé. Elle nous présente Marie, en pleine peine d’amour, qui tente de remonter à la surface et continuer de vivre sans sa moitié. Puis on revient peu à peu sur les débuts de leur relation, comment tout a commencé, leur travail, leurs moments magiques ensembles, et leurs trop souvent descentes aux enfers de la mésentente, la jalousie et les chicanes explosives.
Eve Lemieux, que je découvre avec ce roman, a une belle musicalité dans sa plume d’autrice. Son style d’écriture est à la fois cru et percutant, tout en amenant une poésie rythmée à notre lecture. Pour quelqu’un de très sensible, comme moi, qui se laisse imprégner des émotions d’un roman, Mercure plein la gueule, je l’ai reçu comme un coup de poing dans la gueule justement, avec ses descriptions qui créent dans ma tête des images très puissantes, par exemple, avec sa façon presque violente, mais poétique de dépeindre les scènes d’amour, de baise.
Extrait : « C’est la chaleur qui est marquante, la chaleur de ta queue et l’impression qu’elle me remplit entièrement. Juste ça, ça me fait friser les orteils. Mais quand tu te déposes sur ma poitrine, que ton souffle lèche mon cou, que ton bassin ondule contre le mien, c’est mon point G qui frise comme un boudin. Plus tu t’enfonces, plus je serre les cuisses, plus je serre les cuisses, plus tu accentues les coups, plus je gonfle, plus tu accélères, plus j’halète, plus tu râles, plus je griffe, plus tu mords, plus je cambre les reins, plus tu comprimes mes poignets, plus ma vessie se remplit, plus ton pubis roule sur mon clitoris, je jouis comme la Jouvence et tu décharges dans ton Magnum Ultra Fuck. La clope goûte le miel et ta peau le sel. Je voudrais m’endormir contre toi comme dans un sac de couchage. »
L’histoire racontée se passe dans le milieu du vedettariat québécois, avec une comédienne et son partenaire de jeu dans une série télé, qui vont devenir amants aussi dans la vie. On apprend aussi à connaître Daphnée, Christina, J-P, bref les autres personnages qui gravitent dans le vedettariat avec eux. Entre les tournages, il y a des séances de photos, des entrevues, des auditions. Il y a aussi les partys, où l’alcool coule à flots et la drogue est omniprésente et les transferts de partenaires sont fréquents. À la longue, ce genre de descriptions, bien que ce soit extrêmement bien écrit, rythmé, avec fougue et passion, personnellement, j’ai graduellement trouvé les relations entre ces personnes et surtout celle de Marie et Émile trop malsaines pour y trouver un intérêt.
Pourtant, ce roman est important à lire, ne serait-ce que pour montrer les effets dévastateurs des relations toxiques. Ce roman aborde la maladie mentale, la dépression, la détresse psychologique, le suicide, bref c’est un roman utile qui nous permet de voir ce qu’on ne veut pas toujours voir, et ça fait mal, mais ça ouvre les yeux et ça fait réfléchir.
Il y a également, à la fin du livre, une page qui donne des références pour de l’aide en cas de détresse. Je dois aussi mentionner la très belle page couverture de l’illustrateur Mathieu Potvin. Cela décrit très bien les émotions que Marie et le lecteur ressentent à la lecture du roman. C’est une superbe image, une œuvre d’art à la fois sombre et lumineuse.
Eve Lemieux est une artiste multidisciplinaire, qui fait du théâtre, de la voix, de la télévision et du cinéma et qui signe avec Mercure plein la gueule, après Comme des animaux (2019), un deuxième roman comme une passion à fleur de peau, aux canines aiguisées, qui lèche, qui mord, mi-rêve et mi-cauchemar.
Nombre de pages : 256 pages
Prix : 24.94$
Date de parution : 31 aout 2022
Éditions XYZ : https://editionsxyz.com/