Le scénariste et réalisateur Guillaume Sylvestre vient de publier, aux éditions XYZ, son premier roman La chute de Babylone. À la fois satire sociale cinglante et fable mythique, ce roman aborde autant les travers de notre société que les références à l’Antiquité. Un roman très verbeux, très descriptif, qui alterne entre humour cinglant et profonde vulgarité.
Résumé : Fort Lauderdale, Floride. L’intelligentsia québécoise partage son temps entre le bronzage, le magasinage des soldes dans les outlets, les liftings, les injections de Botox, le casino et l’étalage de sa réussite. L’intrigue se concentre sur trois personnages : Une adolescente haïtienne, nihiliste, adoptée par un couple blanc nihiliste, un moine défroqué, déchu et psychotique, marié de force à une journaliste vedette et un fils prodigue, petit bourgeois toxicomane, écœuré par le milieu dans lequel il baigne depuis son enfance. Ensemble, ces trois protagonistes forment un contrepoint à l’aveuglement collectif et formentent une révolte pour mettre fin à l’agonie d’une civilisation en péril. Un regard hallucinatoire sur la déchéance morale d’un monde aux relents de décadence antique.
Le Babylon Cove est le lieu de résidence de huit familles, des Québécois qui ont acheté ces appartements pour passer l’hiver en Floride. On y retrouve Hélène, une journaliste qui recherche les soldes dans les outlets, se défoule dans les casinos et forme un couple avec Peeters, cet ancien moine déchu. Elle ne jure que par son fils prodigue Alexandre, dont elle aimerait qu’il vienne vivre avec elle en Floride. Il y a également Geneviève et Sylvie, deux animatrices et productrice, ancienne amante, qui ont chacun un appartement et dont la popularité de leurs émissions est plus importante que leur amitié. Il y a aussi Maude, l’auteure-compositrice qui ne compose plus. Elle se décompose même dans son appartement, le penthouse. C’est grâce à sa bonne si elle survit encore. Il y a également Marc et Louise qui ont adopté une jeune Haïtienne Rose, qui leur cause bien des soucis.
Juste à la description de ces personnages, on voit tout de suite que ce roman ne sera pas de tout repos. Guillaume Sylvestre a une plume très riche en figures de style et en descriptions imagées. Ce roman offre un regard hallucinatoire sur les Québécois qui passent l’hiver en Floride, tout en faisant la critique du capitalisme et des valeurs occidentales. Il aborde entre autres le racisme, la manipulation politique, la lutte des classes sociales, les dépendances au jeu, aux drogues, à la chirurgie, bref, les dépendances en générales…
Voici un extrait pour donner le ton du livre et un avant-goût de la plume de l’auteur, qui a choisi d’y aller «all in» pour son premier roman : «Alexandre, quant à lui, arpentait la galerie en disséquant avec une fascination macabre les toiles de Cosme. Les corps dénudés des femmes, distordus, qui ne pouvaient être peints que par un esprit malveillant, lui levaient le cœur. Le sixième ou septième verre de champagne tiédasse qu’il venait d’ingurgiter n’aidant pas, il se faufila par une porte de service pour prendre l’air. Il s’assit sur une marche de grès, devant la vitrine d’une boutique adjacente. Deux mannequins anorexiques fixaient de grosses bagues de toc sur leurs mains obséquieusement tendues. Tout en soufflant pour lutter contre la nausée, il se perdit dans la contemplation d’une frite séchée au pied d’un petit mandarinier en fleur qui embaumait l’air d’un parfum acidulé. La vieille frite paraissait défier avec ironie le chic West Palm Beach, comme si elle démentait à elle seule tout le faste des boutiques hors de prix qui affriolaient les vieilles juives en vacances.»
Personnellement, j’ai bien apprécié la plume de cet auteur, qui sait bien instaurer une ambiance et imager son propos. Par contre, tout ce cynisme m’a un peu déprimé. Je ne suis pas le genre de personne à passer mes hivers en Floride, mais je n’ai pas vraiment reconnu mes amis «Snowbirds» qui le font. J’imagine que cette faune de québécois existe, mais je ne la connais pas et je l’ai trouvé bien déprimante au lieu d’en apprécier l’ironie.
Guillaume Sylvestre est scénariste et réalisateur. Il a à son actif plus d’une vingtaine de longs métrages documentaires, dont plusieurs ont été sélectionnés dans des festivals prestigieux. Notons Irvin Blais, la voix du peuple (2020), DPJ (2017), La poudre aux yeux (2017), Le steakhouse (2014), Secondaire V (2013), Sauvage(2011) et Durs à cuire (2007). Il a aussi signé le documentaire Le prix du paradis (2016), un portrait sarcastique sur des Québécois qui passent l’hiver en Floride.
Date de Parution : 19 octobre 2022
Nombre de pages : 283 pages
Prix : 27.95$
Collection : Quai No5
Éditions XYZ : https://editionsxyz.com/