Après avoir été présenté en ouverture du FICFA (Festival international du cinéma francophone en Acadie) en novembre dernier, et en grande première à Montréal au Rendez-Vous QuébecCinéma le lundi 27 février dernier, le long métrage Notre Dame de Moncton sortira sur les écrans du Québec le 24 mars prochain.
Le 14 mars dernier, la réalisatrice Denise Bouchard, ainsi que les actrices Laurie Gagné et Louise Turcot, de même que l’acteur Gilles Renaud, sont venus présenter le film au cinéma Le Clap Ste-Foy.
Voici mes entrevues avec les artisans de ce film tourné entièrement à Moncton au Nouveau-Brunswick.
Synopsis : Anna (Laurie Gagné), vit un moment particulièrement stressant : elle se prépare à renouer avec Jason (Thomas Lapointe), le fils qu’elle a été obligée de placer en adoption il y a presque 20 ans. N’arrivant pas à aller au bout de cette rencontre, elle se réfugie, clandestinement, dans la maison d’un couple âgé. Un événement dramatique vient tout bousculer et force Anna à tisser une relation impromptue avec Victorine (Louise Turcot). L’étrange cohabitation de ces deux femmes les aidera à retrouver le courage d’affronter leurs épreuves.
DENISE BOUCHARD, réalisatrice
Denise Bouchard occupe le paysage culturel acadien depuis les années 80. Actrice et réalisatrice, elle réalise et écrit son premier long métrage Pour mieux t’aimer, qui obtient le Prix La vague Léonard-Forest en 2019. Notre Dame de Moncton est son deuxième long métrage de fiction.
Racontez-moi la genèse de ce projet.
«À la base, ce projet est une idée originale de Mélanie Léger. Une fois le projet bien entamé, les productions Bellefeuille m’ont approchée pour collaborer avec Mélanie, finaliser le scénario et réaliser le film. Il faut dire aussi que dans mon premier long métrage, Pour mieux t’aimer, Mélanie était actrice sur mon projet. Donc, on se connaissait déjà et on aimait travailler ensemble. L’Acadie francophone n’est pas grande, alors on se connaît tous un peu, les créateurs dans notre coin.»
Vous avez choisi Laurie Gagné, dont c’est le premier tournage au grand écran. Qu’est-ce qui a fait d’elle votre premier choix ?
«Tout d’abord, on a fait des auditions autant en Acadie qu’au Québec, car on voulait avoir un partenariat avec le Québec. » Écoutez-la parler de : Laurie. « Aussi, je voulais cette énergie pour Anna, qui était en fait à l’opposé de l’énergie de l’autre personnage principal, Victorine, qui est joué par Louise Turcot ; deux énergies complètement différentes qui se mariaient bien. »
C’était intéressant de voir le passé d’Anna se dévoiler peu à peu, sans en faire d’elle une victime.
« Exactement, je voulais qu’on sorte des clichés. Avec Anna, au départ, on est distant, car on ne connaît pas son univers et qu’elle ment pour s’en sortir. Mais peu à peu, on comprend d’où elle vient, ce qu’elle vit et elle devient plus sympathique. Anna est dans une situation précaire, mais elle n’est pas une victime. Elle ne pleure pas. Elle ne se laisse pas aller au découragement. Elle est en mode survie et elle trouve des solutions pour s’en sortir. Elle a une dignité même si elle est dans la rue. Et ça je voulais qu’on le voit. »
Le duo Victorine et Anna fonctionne vraiment, tout en complicité. C’était comment de les diriger ? Écoutez-la parler des la : direction des acteurs partie1 et direction des acteurs partie2
Il y a une chanson dans le film que l’on entend au complet, Comme j’ai toujours envie d’aimer, alors qu’on alterne des scènes avec Anna, mais aussi avec Victorine, parlez-moi de votre intention avec ce beau moment de cinéma.
« C’est un moment qui n’existait pas au scénario et que je tenais à avoir. J’en ai parlé à la scénariste que je voulais faire cette séquence féminine avec trois générations. Victorine, Anna et Estelle. Je voulais montrer que malgré les épreuves que ces femmes vivent, elles ont toujours envie d’aimer et d’aller de l’avant. On a Victorine dans une belle scène qui évoque sa féminité, Anna qui regarde avec amour son fils patiner, mais aussi un regard d’envie envers cet amour naissant entre son fils et Estelle. C’est une belle scène que je voulais voir sans avoir non plus à trop l’expliquer, juste laisser le spectateur la vivre. »
Parlez-moi un peu de Moncton, l’endroit où vous avez tourné le film.
« Tout d’abord, je dois dire que c’est seulement le 4e long métrage qui est tourné à Moncton. Il n’y en a pas eu plus que cela. Donc, c’est important que les gens de cette région se reconnaissent dans les films parfois. » Écoutez-la parler de : Moncton partie1 et Moncton partie2.
ANNA Interprétée par LAURIE GAGNÉ
La comédienne granbyenne tourne le film Notre-Dame de Moncton, dans lequel elle joue son tout premier « premier rôle » au cinéma.
Comment vous êtes-vous préparé pour interpréter ce personnage touchant, une ex-toxicomane au passé difficile ?
« Tout d’abord, je dois dire que Denise m’a tout de suite mise en confiance. Lors de notre première rencontre en zoom pour préparer mon rôle, elle m’a dit : ne doute jamais ! Je t’ai choisie et je t’assume jusqu’au bout. Et cela m’a grandement sécurisé. »
Comment avez-vous réussi à la rendre sympathique, car au départ, on n’est pas trop certaine qu’on va aimer ce personnage ? Avez-vous fait des recherches ?
« C’est vrai que mon personnage n’est pas très loquace. Mais dans chaque phrase, elle se révèle, c’est un chapitre, voire même un roman. Car elle en a tellement vécu des épreuves dans sa vie. Je me suis donc décidée à mettre sur papier sa vie, son passé. Puis, j’ai voulu rendre ce personnage avec justesse et non dans le cliché. Comme je ne connaissais personne dans mon entourage qui vit autant de difficultés, je me suis tournée vers l’organisme Portage mère-enfant, qui est un organisme qui aide les femmes avec un problème de dépendances. Il les soutienne et les encadre fermement, pour empêcher qu’on leur enlève leurs enfants. Je suis donc allée rencontrer trois femmes avec un passé difficile et une dépendance à surmonter. » Écoutez-la parler de ses : recherches partie1 et recherches partie1.
Il y a une belle complicité qui est présentée entre le personnage de Victorine (Louise Turcot) et Anna. Est-ce qu’elle s’est fait facilement cette complicité sur le plateau ?
« On dirait que Victorine et Anna c’est un peu Louise et moi au niveau de la complicité. J’ai ce grand respect pour Louise et elle m’intimidait. Et pourtant, elle ne souhaitait pas cela. Tout comme Victorine, Anna est intimidée, mais elle ne souhaite pas cela. De façon très adroite, Louise est venue me guider, sans me donner des conseils constamment, ce qui m’aurait encore plus gênée. À ma demande, elle me guidait avec beaucoup d’adresse. »
Étalé sur 20 jours, le tournage s’est déroulé à Moncton, au Nouveau-Brunswick, où l’équipe s’est installée pour un mois. Parlez-moi de ce tournage en location, comment c’était pour vous ? Écoutez-la parler du : tournage_Moncton
VICTORINE Interprétée par LOUISE TURCOT
Parlez-moi de votre personnage, comment vous la percevez et qu’est-ce qui vous plaisait dans l’idée de jouer ce rôle dans ce film ?
« À la lecture du scénario, ce qui m’a plu, c’est le caractère de cette femme-là. On imagine que malgré sa fragilité, dû aux circonstances, c’est quand même une femme forte. J’aimais aussi qu’au début du film on nous montre le couple qu’elle forme avec Hergé. On voit d’emblée le genre de couple qu’ils sont, leur personnalité.»
Écoutez-la parler de son : personnage et son couple partie1 et personnage et son couple partie2.
Vous avez joué avec Laurie Gagné, dont c’était le premier grand rôle au cinéma. La complicité semble là à l’écran. Elle s’est fait facilement cette complicité sur le plateau ?
« Oui. Dès nos premières rencontres, on a vu qu’on avait des affinités et on s’est senties en confiance l’une et l’autre et cela a donné lieu à de belles scènes. Et comme on a très peu de mots entre nous, c’était important d’avoir un bon feeling ensemble. Et avec Laurie, qui commence dans le métier, le but recherché, c’était d’arriver qu’elle se sente parfaitement à l’aise, en confiance et libre de créer. »
Et la réalisatrice, c’était comment que d’être dirigé par elle ?
« Le caractère de Denise a beaucoup influencé la façon de voir mon personnage. Denise est féministe et elle me rappelait souvent que ma génération, c’est nous qui avons jeté nos soutiens-gorge par la fenêtre et on a dû gagner notre place dans la société d’hommes. »
Écoutez-la parler de : Denise et son personnage.
Le film a été présenté en Acadie déjà. Vous y étiez ? Qu’elle a été la réaction du public ?
« Ils ont beaucoup aimé ça. Ils se sont reconnus dans les personnages. Mais aussi, ils ont vu que le cinéma, ça ne se passe pas juste ailleurs. Ça peut se passer chez eux aussi, dans leurs rues, leurs décors. »
Vous avez une belle et longue carrière, autant comme actrice, au théâtre, télé, cinéma, mais aussi en doublage, et en écriture. Pensez-vous à la retraite parfois ?
« Bien sûr que non. C’est une passion notre métier. On a 78 ans et l’autre jour on parlait de nos amis qui ont pris leur retraite de leur métier à 50 et 55 ans. Et on se disait, imagine si on avait pris notre retraite aussi à leur âge. On aurait passé toutes ces années-là sans travailler. C’est impensable. Parce que le travail c’est quelque chose qui m’allume, qui me nourrit, qui me donne le goût de vivre, qui me rend joyeuse. »
Vous avez d’autres projets dont vous pouvez me parler ?
« Il y a le film de Louise Archambault, Le Temps d’un été qui sort au cinéma le 2 août prochain et j’ai participé au film de Denys Arcand Le Testament. »
HERGÉ interprété par GILLES RENAUD
Parlez-moi de votre personnage, comment vous le percevez et qu’est-ce qui vous plaisait dans l’idée de jouer ce rôle dans ce film ?
« Tout d’abord, le scénario m’a séduit. J’aimais beaucoup cette histoire-là, simple, originale. Une histoire qu’on n’a jamais vue vraiment, comme cela. C’est rafraichissant de voir ça. »
Écoutez-le parler de : moncton et son role
« Aussi, concernant mon personnage, au début, il n’est pas très sympathique. Il engueule une fille dans la rue. Il engueule ensuite sa femme qui n’a pas fermé la porte. Ensuite, il refuse toutes les activités que sa femme lui propose, marche, voyage, etc. Il lui annonce même qu’il a une maîtresse et veut la quitter. Il fait sa valise en urgence de partir. Et c’est là, juste avant de quitter qu’il voit que l’ampoule du sous-sol est brûlée et il va vouloir la changer. J’ai trouvé ça beau. On voit alors qu’il se préoccupe tout de même de sa femme qu’il veut quitter. Il se dit que c’est sa job de changer les ampoules. Il veut le faire une dernière fois, une bonne action pour elle. Car dans le fond, il s’inquiète pour elle malgré tout. »
Et la réalisatrice, c’était comment d’être dirigé par elle, car vous la connaissiez déjà comme actrice ?
« Elle est très dynamique et aussi très ouverte aux propositions des acteurs et ça, c’est intéressant pour un acteur d’avoir cette liberté de proposer des choses. »
Écoutez-le parler de tourner en : temps de COVID.
Vous avez une belle et longue carrière, autant comme acteur, au théâtre, télé, cinéma, mais aussi comme enseignant de l’interprétation à l’école de théâtre. Qu’est-ce qui vous comble de faire tous ces métiers et pensez-vous à la retraite ?
« Moi, je n’ai jamais fait autre chose. Je n’aurais probablement pas été capable de faire autre chose. C’est mon seul talent. »
Écoutez-le parler de sa : passion du metier
Réalisation Denise Bouchard
Scénario Mélanie Léger
Direction photo John Barrett Ashmore
Direction artistique Xavier Georges
Création de costumes Lynn Losier et Claudie Landry
Montage Yvann Thibaudeau
Conception sonore Serge Arseneault
Musique originale Pierre Guy Blanchard
Producteur Jean-Claude Bellefeuille
PRODUIT ET DISTRIBUÉ PAR BELLEFEUILLE PRODUCTION
35 rue Toombs, Moncton, Nouveau-Brunswick
SORTIES EN SALLE
LE 2 DÉCEMBRE 2022 – PROVINCES DE L’ATLANTIQUE
LA SORTIE EN SALLE AU QUÉBEC ET LE RESTE DU CANADA 24 mars 2023
Crédit photo : Réjeanne Bouchard